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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/530

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VAUDOIS. ORGANISATION


un supérieur à eux. Valdès répliqua que, lui vivant, il ne souffrirait pas d’autre supérieur auprès de lui. Un schisme s’ensuivit, qui entraîna peut-être la réconciliation de certains humiliâtes avec l’Église. On a vii, en effet, que l’ordre fut approuvé, en 1201. Toutefois, il n’est pas sûr qu’il y ait eu un lien entre les deux séries de faits. Il semble que ce soit vers 1210 que la scission s’opéra définitivement entre lombards et pauvres de Lyon. Les lombards nommèrent un chef, Jean de Ronco. Mais il mourut à peu près dans le même temps que Valdès, avant mai 1218. À cette date, en effet, un congrès des deux branches eut lieu à Bergame, pour rechercher un terrain d’entente. Les vaudois français exigeaient que Valdès fût honoré comme bienheureux, ainsi qu’un de ses compagnons, nommé Vivet, et que les lombards abandonnassent leur doctrine eucharistique spéciale. L’accord ne put se faire sur ces deux points et la rupture entre vaudois français et lombards fut consommée, en 1218, sauf quelques échanges de relations d’un camp à l’autre.

IL Organisation. — Dès le principe, l’organisation des pauvres de Lyon est à peu près celle des ordres religieux, avec des vœux en règle et, par suite, un nombre relativement restreint de membres. Les pauvres renoncent au monde, font profession d’imiter les apôtres et d’observer strictement la loi du Christ. Mais, comme ils se regardent comme appelés par Dieu même à la prédication, il s’ensuit qu’il y a, dès le début, deux sortes de personnes parmi les vaudois : les pauvres proprement dits et leurs disciples ou amis. Dans le groupe lombard-allemand, on nomme les premiers : maîtres, maîtresses, car il y a des membres des deux sexes. Parfois, on leur donne même le titre A’apôtres. Eux seuls sont membres de la secte ou société. Avant d’être admis dans leurs rangs, les convertis appelés novellani, subissent une sorte de noviciat qui dure un an ou deux en Lombardie et jusqu’à cinq ou six ans, en France. Comme on apprend par ailleurs que les vaudois savaient par cœur des fragments considérables de la Bible et surtout les évangiles, il est aisé de comprendre que le noviciat consistait surtout en une initiation biblique très poussée, sinon vers l’intelligence scientifique du texte, du moins vers un effort de mémoire pour connaître les textes sacrés et se mettre en état de les réciter imperturbablement.

A la suite de ce noviciat prolongé, le novellanus ou nuper conversus était admis dans les rangs des maîtres, par une cérémonie assez semblable à la profession religieuse, qui se déroulait au cours d’une assemblée générale des frères, appelée commune. Le novellanus faisait vœu de pauvreté parfaite, c’est-à-dire < de ne pas se préoccuper du lendemain et de n’accepter ni argent ni or en dehors îles besoins du jour pour la nourriture et le vêtement ». Il faisait vœu aussi d’observer strictement l’Évangile, de porter le costume apostolique et de garder la chasteté. Ce vœu devait rompre tout lien matrimonial antérieur, mais par la suite, dans les deux branches, on prit l’habitude de n’accepter comme frères que des célibataires. Enfin, le novice faisait vœu d’obéir à ses supérieurs. Il recevait alors le costume apostolique, selon toute apparence, une simple robe de laine. Au début, les frères allaient nu-pieds. Mais de très bonne heure, ils utilisèrent des sandales, attachées par un lacet en croix, avec une semelle de bois. (L’est cette sandale que l’on appela sabot. Les pauvres y attachaient la

plus grande Importance. Le novice devenu profès prenait le nom de sandaliatua. De là les noms souvent donnés aux vaudois dans les documents rie tandaliati, iruabbatati, iabbatatt, totularii, eotularii, ençabols, etc. Les ensabottés n’étaient pas tous égaux, à l’origine. Ils reconnaissaient une hiérarchie, qui

disparut peu à peu au cours des âges, pour laisser place à la simple ancienneté. Avant 1210, Valdès

— que l’on a aussi appelé en français Valdo — s’était adjugé les pouvoirs d’évêque. Et il avait dû instituer lui-même des prêtres et des diacres, avec l’aide du commune ou assemblée des frères. Cette hiérarchie à trois degrés fut probablement adoptée pour des raisons bibliques, car les saints livres ne parlent que de ces trois degrés. Le diacre était un jeune profès, le prêtre un profès plus ancien, mais faisant toujours partie des juniores. Les évêques formaient la classe des majores ou anciens. L’ordination consistait surtout dans l’imposition des mains. La fonction essentielle des maîtres étant de prêcher, ils devaient toujours voyager par deux, un prêtre et un diacre. Le diacre avait le droit de prêcher et de confesser, mais, en principe, il était au service de son compagnon plus âgé qui était prêtre. Celui-ci prêchait et confessait dans un secteur déterminé, sans avoir de domicile fixe. L’évêque seul consacrait l’eucharistie, une fois l’an, le jeudi saint au soir. Souvent on consacrait aussi un poisson en plus du pain et du vin. On attribuait une vertu de guérison pour les malades aux aliments ainsi consacrés, au pain surtout. Y avait-il un chef suprême, au-dessus des évêques ? Cette question ne peut recevoir une réponse uniforme selon les branches et les régions. La branche lombarde, séparée, on l’a dit, da la branche française, dès 1210, conserva un souverain pontife, élu par le commune, jusqu’à la fin du xve siècle. Il eut longtemps sa résidence dans la Fouille ou dans le centre de l’Italie. En dehors du pouvoir épiscopal, il avait le droit de réunir le commune, ce qu’il faisait une ou deux fois par an. Le commune, que les textes catholiques appellent capilulum, à l’instar des chapitres généraux des ordres religieux, réglait toutes les affaires spirituelles et matérielles de la société vaudoise. Dans les pays allemands, où l’on avait fait partie du commune de Lombardie et où l’on en avait suivi les prescriptions, il devint nécessaire, en raison des dillicultés matérielles, de s’organiser à part. Il n’y eut jamais de recteur majeur ou souverain pontife. Dans la branche française, où Valdès s’était au début adjugé tout pouvoir, il n’y eut pas, après sa mort, de gouvernement individuel permanent. Il semble qu’une réaction se soit produite contre l’autoritarisme du fondateur. On a vu que cet autoritarisme avait été la cause principale de la sécession des lombards. Il est permis de conjecturer que c’est aussi à cause de cet excès d’autorité qu’il n’y eut, pendant un temps, que des procureurs, au nombre de deux, élus pour un an seulement, par le commune. Plus tard, cependant, c’est-à-dire vers la fin du XIIIe siècle, on voit reparaître un major minister élu à vie par l’assembler’générale.

Il va sans dire que toute cette hiérarchie n’avait d’autre fondement que la volonté de Valdès, qui n’avait jamais reçu d’ordination régulière. Mais il était admis qu’il avait été investi de tous ses pouvoirs directement par Dieu comme Moïse ou saint Paul.

Tout ce qui précède ne concerne que les maîtres proprement dits, à l’exclusion des amis ou adhérents. Les textes concernant les vaudois ou ensabottés, à l’origine, ne désignent que ceux-là. Au surplus. les amis, tout en se défiant du clergé cal Indique, continuaient à fréquenter les églises, en évitant seulement de recevoir la communion catholique. La persécution rie la part des autorités catholiques eut pour résultat t’de faire disparaître peu à peu le costume aposto liquc des maîtres, qui les trahissait trop aisément ; 2° de resserrer les amis autour des maîtres, en sorte qu’avec ! < temps, le terme de vaudois désigne à la

fois le clergé et les li < le tes de la secte ; 3° d’accroître