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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/667

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VICTOR l pr — VICTOR II


montanistes d’Asie, fut sur le point de leur accorder des lettres de communion. À la dernière minute, l’intervention de Praxéas ° qui allégua auprès du pape les mesures prises par ses prédécesseurs, obligea celui-ci à révoquer les lettres de communion déjà émises et à revenir sur la résolution où il était de reconnaître les charismes ». Si ces agissements n’eurent pas lieu sous Victor, ce fut sous son successeur immédiat, Zéphyrin. En tout état de cause, la communauté romaine en fut troublée, et l’on signale aux dernières années du siècle une polémique littéraire entre un certain Proclus, d’esprit montaniste, et le prêtre romain Caius. Cf. Eusèbe, H. E., II, xxiv, et ici l’art. Caius. t. H, col. 1310 et surtout 1311.

De plus grande importance était l’effervescence provoquée à Rome par les enseignements et les agissements du parti théodotien. lequel professait ce que les critiques modernes appellent le monarchianisme dynamiste qu’il vaudrait mieux appeler l’adoptianisme pur et simple. Voir l’art. Monarchianisme, t. x, col. 2197. Suivant ces hérétiques, Jésus n’est Dieu que par simple appellation ; dans la réalité, c’est un homme ordinaire, ’^îXoç avOpcoTOç, que Dieu a adopté pour fils, l’élevant ainsi au rang divin. D’après Eusèbe qui se réfère à un traité anonyme

— longtemps attribué à Hippolyte — Contre l’hérésie d’Artémon, Kocrà tÎ)ç’Ap-rqjiwvoç atpéasco ;, dans H. E., V, xxviii, les premiers représentants de cette hérésie avaient paru à Rome sous le pape Victor et prétendaient être les authentiques représentants de la tradition ecclésiastique. La doctrine qu’ils enseignaient aurait été, disaient-ils, continuellement tenue jusqu’aux temps de Victor, qui l’aurait encore gardée. Impudent mensonge, continue l’anonyme, « car si Victor avait eu ces sentiments, comment aurait-il chassé de l’Église Théodote, l’inventeur de cette hérésie ? » C’est tout ce que nous savons d’une intervention doctrinale de Victor dans cette affaire. Le conventicule théodotien se perpétua, d’ailleurs, sous le successeur de Victor, le pape Zéphyrin ; cependant, une autre hérésie, plus subtile mais non moins dangereuse, devait alors faire contre-poids à l’adoptianisme théodotien, nous voulons parler du modalisme dont Noët (à Smyrne), puis Sabellius, à Rome et ensuite en Lybie, devaient être les protagonistes. En dépit du Libellas sijnodicus, qui mentionne un synode où Victor aurait condamné Sabellius et Noët, cf. Jaffé, Reyesta, posl n. 78, il n’est pas vraisemblable que ce pape ait eu à prendre position contre cette erreur, qui lui est certainement postérieure. Le Liber pontificalis, de son côté, attribue à Victor un décret reconnaissant la validité du baptême administré en cas de nécessité par n’importe quel fidèle, sous réserve d’une profession de foi correcte faite par le néophyte. Mais ceci paraît être une anticipation.

Le Liber pontificalis marque au 28 juillet la date obituaire du pape Victor, date conservée par le martyrologe et le calendrier romain. Les anciens martyrologes la fixent, par contre, au 20 avril. Victor aurait été enseveli au Vatican avec les papes ses prédécesseurs.

Jaffé, Hegesta pontificum Romanorum, t. i, p. 11-12 ; L. Duchesne, Liber pontificalis, t. i, p. xcv, 4-5, 60-61, 137-138 ; L. Duchesne, Histoire ancienne de l’Église, t. i ; Batiffol, L’Église ancienne et le catholicisme, p. 267-276 ; J. Lebreton, dans Fliche-Martin, Histoire de l’Église, t. ii, p. 87-93 ; Caspar, Geschichte des Papsltums, t. i, p. 19 sq. ; se reporter aussi à la bibliographie des articles Monarchianisme, t. x, col. 2209, et Pâques, t. xi, col. 1970.

E. Amann.


VICTOR II, pape (1054-1057). — Successeur de saint Léon IX († 1 !) avril 1054), Victor fut appelé au trône pontifical de la même manière que l’avaient

été ses trois prédécesseurs : Clément II, Damase II et Léon IX, c’est-à-dire par désignation directe de l’empereur Henri III. Quelque temps après la mort de Léon, une délégation romaine, dont faisait partie Ilildebrand, le futur Grégoire VII, se mit en route pour l’Allemagne et rencontra le souverain à Mayence au début de septembre. Obéissant, dit Bonizon de Sutri, qu’il ne faut pas prendre au mot, aux suggestions des envoyés romains, Henri III désigna pour la chaire apostolique, le jeune évêque d’Eichstàdt, Gebhard, qui lui était apparenté. Administrateur zélé et intelligent, Gebhard pourrait servir en Italie la cause impériale, quelque peu compromise depuis les événements qui s’étaient récemment déroulés en Toscane. La veuve du marquis Boniface († 6 mai 1052), Béatrice, venait d’épouser le duc de Lorraine, Godefroy le Barbu, un des plus rudes adversaires de l’empereur. Ce mariage faisait de Godefroy le tuteur des enfants mineurs de Boniface et de Béatrice et lui donnait ainsi une situation prépondérante dans l’Italie moyenne. C’est pour conjurer ce péril que l’empereur germanique tenait à mettre sur le trône pontifical quelqu’un dont il fût sûr. L’évêque d’Eichstàdt se rendit-il compte de toutes les difficultés que ce changement de siège lui donnerait à résoudre ? Toujours est-il qu’il ne se pressa pas d’accepter. Sa désignation comme pape est de septembre 1054 ; c’est seulement en mars suivant qu’à Ratisbonne il donne son consentement. Puis, se hâtant vers Rome, il se fait introniser à Saint-Pierre, le jeudi saint 13 avril (ou le jour de Pâques), devenant ainsi le pape Victor II. Il y avait presque un an, jour pour jour, que son prédécesseur était mort.

Dès la Pentecôte (4 juin), Victor II a rejoint l’empereur à Florence, où, sous la présidence du pape et du souverain, se tient un grand concile qui rassemble cent-vingt évêques. Jaffé, Regesta, t. i, p. 549 au bas. Il y fut, vraisemblablement, question de la réforme ecclésiastique et, au dire de Bonizon, Liber ad amicum, t. V, dans Libelli de lite, t. i, p. 590, que transcrit le cardinal Boson, plusieurs évêques y furent déposés pour simonie ou fornication. Mais l’assemblée s’occupa surtout, au dire de Pierre Damien, de l’aliénation et de l’inféodation des biens ecclésiastiques. Aussi bien les questions politiques demeuraient-elles au premier plan. Ce n’était pas pour presser la réforme de l’Église que l’empereur était, une nouvelle fois, descendu en Italie. Il voulait surtout mettre à la raison le duc Godefroy. Celui-ci ne l’avait pas attendu ; Henri III se dédommagea en prenant comme otages Béatrice et sa fille Mathilde (la future grande-comtesse), qu’il emmena en Allemagne.

Pendant que l’empereur rentrait chez lui, Victor II regagnait Borne, où sa présence est signalée par quelques actes pontificaux aux derniers mois de 1055 et au début de 1056. Il était alors préoccupé du progrès continu des Normands de l’Italie méridionale, tout grisés du succès qu’ils avaient remporté sur Léon IX. On le voit encore dans les Abruzzes en juillet 1056, essayant de sauvegarder les intérêts de l’empereur. Finalement, à l’automne, il se mettait en route pour l’Allemagne. Les Annales romaines disent expressément que c’était pour les mêmes raisons qui y avaient conduit son prédécesseur. Il s’agissait toujours d’obtenir, contre les « nouveaux Agarènes (Sarrasins) », c’est-à-dire contre les Normands, la protection impériale. Le 8 septembre. Victor était à Goslar, où une réception somptueuse lui avait été ménagée par l’empereur. Voir rénumération des textes historiques dans Jaffé, posl n. 4348. Profitant des bonnes dispositions d’Henri, le pape obtint la réconciliation entre lui et le duc de Lorraine, qui fut autorisé à reprendre le chemin de