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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/920

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    1. VOLONTÉ##


VOLONTÉ. DE DIEU, SALVIFIQUE UNIVERSELLE

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de la réprobation négative, la permission du péché n’est pas postérieure à sa prévision : tout est voulu et prévu simultanément. Cf. col. 3013-3016.

b) École moliniste : — Autre est la conception moliniste de la volonté antécédente et de la volonté conséquente. Le moyen terme de la discrimination est ici la prévision du consentement « futurible » de la volonté à la grâce. L’explication du mot « futurible » a été donnée à Molinisme, t. x, col. 2117. Il s’agit des futurs contingents ou libres « que toutes les causes secondes réaliseraient… si (Dieu) établissait tel ordre de choses et de circonstances ». Voir aussi Prédestination, t.xii, col. 2973 et Science de Dieu, t. xiv, col. 1612. Ainsi, de sa volonté antécédente

— conditionnelle, parce que sa réalisation dépend du libre jeu de l’activité créée — Dieu veut que tous les hommes soient sauvés. Mais ils ne le sont pas tous parce que ses préceptes ne sont pas observés. Le pécheur qui s’écarte de la volonté de Dieu n’y échappe pas par ailleurs, car la volonté absolue par laquelle Dieu veut punir ceux qu’il prévoit devoir mourir en état de péché se réalise toujours. Une telle conception est très différente de la conception semi-pélagienne qui fait dépendre l’initium salutis de la volonté humaine. Molina, en effet, rappelle que « la prévision des moyens de salut pour chacun, dans l’hypothèse où il sera (plus exactement : serait) placé dans tel ou tel ordre de choses, ne relève pas de la science libre (science des simples possibles), mais de la science moyenne qui précède tout acte de volonté libre ; il en conclut que l’ordre des moyens qui conduiront chaque prédestiné à sa fin n’est pas postérieur à l’élection qui, de la part de Dieu, est tout à fait libre », Molinisme, col. 2120, 2122-2123. En bref, la prédestination reste absolument gratuite, car Dieu, tout en connaissant ce que ferait la volonté créée dans tel ou tel ordre de choses, reste libre de réaliser cet ordre ou de ne point le réaliser. Cf. Science de Dieu, col. 1612.

Sur ce principe fondamental, fourni par la science moyenne, trois conceptions plus ou moins fidèles à la pensée de Molina, se sont greffées touchant le rôle de la volonté divine dans le salut des hommes. — Pour Suarez, Bellarmin, Coninck, Antoine, de Lugo, la prédestination relève de la volonté antécédente et absolue de Dieu, comme dans l’opinion thomiste. C’est une élection gratuite, sans égard à la prévision des mérites futurs ou futuribles. Mais, après cette prédestination à la gloire, Dieu fait usage de la science moyenne pour distribuer les grâces "congrues », s’assurant qu’en telles circonstances déterminées elles seraient efficaces. Voir Conqruisme, t. iii, col. 1125 sq. ; Prédestination, col. 2975 sq. La réprobation négative, qui correspond également ici à la prédestination, appartient à la volonté conséquente en tant qu’elle comporte l’exclusion du salut par la réalisation d’un ordre où la science moyenne montre que les secours, d’ailleurs suffisants, accordés aux damnés en vue de leur salut, resteront, par leur faute, inefficaces. Pour Suarez, comme pour les thomistes, la non-élection, ou réprobation négative, est antérieure aussi à la prévision des démérites. Prédestination, col. 2977. — Pour Vasquez, Lcssius, Petau, Tolet, saint François de Sales, Tournoly et, de nos jours, Franzelin, Hurler, C. Mazzclla, Pesch, etc., la prédestination et la réprobation appartiennent l’une et l’autre à la volonté conséquente : elles répondent l’une et l’autre à la prévision des mérites futurs des élus et des démérites dos damnés, les uns et les autres connus, comme futuribles, par la science moyenne. avant le libre choix fie Dieu touchant l’ordre à réaliser. Il semble quf Ce soit là la vraie pensée de Molina.

Molinisme, col. 2122 sq. Lue solution intermé DICT. DE 1 ni OL. CA1 nui..

diaire, qu’on voudrait mettre sous le patronage de Molina, voir Prédestination, col. 2966, a été proposée par Billot, suivi de Van der Meersch, de Bætz, Orazio, Mazzella, etc. ; la prédestination, quelle que soit la lumière apportée à l’intelligence divine par la connaissance des mérites futuribles des élus, relève uniquement d’un acte de volonté antécédente et absolue de Dieu, mais la réprobation n’existe que conséquemment aux démérites prévus et permis des damnés ; elle relève de la volonté conséquente. Cf. Prédestination, col. 2964-2975.

Malgré la divergence des opinions, tous les théologiens restent donc fidèles à la doctrine fondamentale de saint Jean Damascène et de saint Thomas : la volonté salvifique universelle, en ce qu’elle a de conditionnel, relève de la volonté antécédente.

2° La volonté salvifique universelle et la distribution de la grâce nécessaire au salut. — Nous avons dit plus haut que « la volonté antécédente n’est pas une velléité stérile ; c’est une volonté efficace en son genre, en ce sens qu’elle prépare à tous les hommes, même aux enfants privés de l’usage de la raison, les moyens indispensables au salut. » Quelles que soient leurs divergences d’opinions, les théologiens catholiques doivent donc tous admettre, contre Jansénius, que Dieu tout au moins a préparé les secours suffisants pour le salut de tous les hommes. Sinon, la volonté salvifique ne serait pas une volonté sincère : elle ne concerne pas la nature humaine considérée dans l’abstrait, mais des hommes vivants, sujets concrets, appelés, même après le péché d’Adam, à la vie éternelle. Cf. Garrigou-Lagrange, De Deo uno, p. 432. Mais, pour que la volonté salvifique soit vraiment agissante, il ne suffit pas, semble-t-il, que Dieu ait préparé les secours nécessaires au salut, il faut également qu’il les confère à tous et à chacun.

1. Opinion restrictive de certains thomistes.

a) Exposé. — Certains thomistes ont enseigné jadis que, tout en préparant et en offrant à tous les grâces suffisantes nécessaires au salut, Dieu se réserve cependant de ne pas les conférer effectivement à cert aines catégories d’hommes qu’il prévoit devoir résister à la grâce, ou encore qu’il veut punir de leurs péchés. Gonet, logique avec sa théorie « infralapsaire » discriminant volonté antécédente et volonté conséquente, voir ci-dessus, col. 3368, va même jusqu’à penser que Dieu refuse d’accorder effectivement ses grâces en punition du péché originel : Deus non dat omnibus reprobis média seu au.rilia ad salutem sujjicientia, sed plurrs illis privantur in p&nam peccati mortalis aclualis vcl originalis. Chjpeus theol. thom., tract. V, De prsedest. , dis]). V, a. 5, § 2, n. 160. Et il donne comme exemples : les enfants morts sans baptême, les infidèles négatifs (auxquels souvent les secours nécessaires ne peuvent parvenir), les pécheurs obstinés et endurcis, ces derniers tout au moins pour un certain laps de temps de leur existence. Ibid., § 6, n. 186. Sur ce dernier point, Gonet invoque l’autorité de Cajétan, Jentacula Noui Testamenti, viii, q. 1 et, avec moins de vérité, relie de Bellarmin, De nratia et libero arbitrio, t. III, c. vi. On peut ajouter Baiicz, In /" », q, xxiii, a. 3, sent. 10 ; Alvarez, De aux. qratiæ, disp. CXII, et d’autres thomistes de renom comme Zumel, Jean de Saint-Thomas, Ledesma. Lemos, Contenson, etc. Cf. Beraza. De qratia, n. 411-413.

Ces dures assertions soulèvent de graves difficultés, du moins en ce qui concerne les adultes pécheurs ou infidèles. Saint Thomas n’a-t-il pas écrit : 1 Dire qu’il a un seul pé< lié dont on ne puisse faire pénitence en (elle vie, c’est avancer une erreur. » Sum. theol., IIP. q. i.xxxvi, a. 1. À cette objection directe et difficile, Gonet, s’inspiranl de BancL, répond qu’il y a toujours possibilité de faire pénitence, dés lors que l’homme

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