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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/991

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WANGNERECK — WAHI) (WILLIAM-GEORGE)


Lors des tractations pour la paix qui devait mettre lin à la guerre de Trente ans, Wangnereck soutint violemment le parti des intransigeants qui rejetaient toute paix avec les protestants et toute concession politique. En 1646, certains de ses amis extrémistes publièrent, sous le pseudonyme Eusebius de Eusebiis et à l’insu de l’auteur, un manifeste de Wangnereck intitulé Judicium theologicum super quæslione an pax qualem desiderant Protestantes sit secundum se illicita (Ecclesiopoli, en réalité Munster). L’écrit, qui soutenait l’illégitimité de la paix avec les protestants, fit beaucoup de bruit et fut vivement attaqué, mais il fut approuvé par le nonce Chigi et le pape Innocent X, qui envoya sa bénédiction à l’auteur. Le P. Jean Vervaux, confesseur de l’électeur de Bavière, fit circuler une réfutation manuscrite sous le titre de Notse in Judicium theologicum. Wangnereck répondit par un Responsum theologicum, destiné, comme le Judicium, à circuler en manuscrit ; mais il fut, lui aussi, publié en 1648 (sans indication de lieu) par ses amis politiques, qui l’aggravèrent encore par diverses additions. À la suite de vives réclamations de l’électeur Maximilien de Bavière, particulièrement visé dans les deux écrits, le Père général Vincent Carrafa interdit sévèrement aux jésuites-d’intervenir dans les discussions au sujet de la paix et, sans se prononcer sur le fond du débat, imposa au P. Wangnereck une sévère pénitence pour la forme violente et offensante de ses manifestes ; sur l’intervention du nonce, il dut cependant retirer peu après la punition. Il réussit, non sans peine, à empêcher la publication d’un nouvel écrit du polémiste impénitent intitulé Apologeticum.

Parmi les autres ouvrages du P. Wangnereck, les plus importants sont : De creatione animée rationalis, Dillingen, 1628, contre le traducianisme. — L’ne édition des Confessions de saint Augustin annotées de réflexions ascétiques, Dillingen, 1631, plusieurs rééditions. — Vindiciee motivorum fidei catholicse, en allemand, contre le pasteur protestant Tobie Wagner, I re partie, Augsbourg, 1643 ; IIe partie, Ems, 1648 ; l’auteur établit que la foi véritable et salvifique se trouve uniquement dans le catholicisme. — SS. Angelorum prœdestinatio ex meritis, prsedestinationi gratuits ? ss. hominum opposita, ex mente S. Augustini, thèse soutenue à Dillingen, 1644 ; cet opuscule déplut à Rome ; pour éviter une condamnation, l’auteur corrigea sa doctrine dans une nouvelle thèse, Antithèses catholicse de ftde et bonis operibus arliculo IV, vi, xx Confessionis Augustanse oppositse, Dillingen, 1645. — Commentarius exegeticus ss. canonum seu expositio brevis et clara omnium pontificiarum decretalium. .., ouvrage posthume, Dillingen, 1672.

Sommervogel, Bibl. de la Comp. de Jésus, t. viii, col. 979986 ; Hurter, Nomenclator, 3e éd., t. iv, col. 257-259 ; B. Duhr, S. J., Geschichte der Jesuiten in den Làndern deutscher Zunge, t. Il a, p. 472-490 ; L. Pastor, Geschichte der Pàpste, t. xiv a, p. 83-85 ; Steinberger, Die Jesuiten und die Friedensfrage, 1906, passim ; Wetzer und Welte, Kirchenlexikon, 2’éd., t. xii, col. 1212-1213 (N. Paulus).

J.-P. Grausem.


WARD William-George, philosophe et théologien catholique anglais (1812-1882). — Deux périodes sont à distinguer dans la vie de Ward, séparées par sa conversion au catholicisme (28 août 1845) : les années passées dans l’anglicanisme (1812-1845) et celles qui suivirent sa conversion (1845-1882).

I. Ward anglican (1812-1845). — William-George Ward naquit à Londres le 21 mars 1812. Il reçut sa première formation à l’école latine de Winchester et entra à Oxford en 1831. Il devint fellow de Balliol Collège en même temps que Tait, le futur archevêque de Cantorbéry, qui lui garda toute sa vie

une fidèle amitié. Il enseigna à Balliol les mathématiques et la philosophie. Entré à Oxford en disciple de Bentham et de Stuart Mill, il ne tarderait pas à se séparer de ce dernier et à critiquer sa « logique illogique ». II devait être toute sa vie un dialecticien redoutable, ne voyant rien en dehors de la logique, poussant ses déductions jusqu’aux conséquences les plus extrêmes, semblant prendre une sorte de plaisir à effaroucher les timides.

Ce tempérament influera sur ses préoccupations religieuses ; il le portera plus tard, quand il sera devenu catholique, à l’intransigeance dans les controverses que soulèveront les questions du pouvoir temporel et du pouvoir doctrinal du Saint-Siège. Dans sa recherche d’une religion vraie, logique, efficace, qu’il ne trouvait pas dans l’anglicanisme officiel, il se laissera d’abord séduire par les deux chefs de la nouvelle école libérale, Wathely et Arnold (cf. art. Oxford, t. xi, col. 1677). Il aimait leur élévation morale, leur doctrine lui plaisait en tant que réaction contre la religion tout extérieure de la respectability, contre le protestantisme formaliste, conventionnel et sans vie. Cf. Thureau-Dangin, La renaissance catholique en Angleterre, 9e éd., t. i, p. 166 sq.

Sans doute ne se rendait-il pas compte de prime abord de ce que cette doctrine libérale avait de dissolvant ; en tout cas, elle ne put satisfaire longtemps ce penseur épris de logique. Ce fut seulement en 1836, quand un ami l’eut décidé à aller par curiosité entendre Newman, puis à suivre les lectures que celui-ci donnait sur la via média dans la chapelle Adam de Brome, qu’il se rendit compte de l’insuffisance dogmatique et spirituelle de l’arnoldisme. Il se laissa gagner aux idées tractariennes et, bientôt, il n’y aura plus pour lui d’autre alternative que de se soumettre à l’Église sous une forme ou sous une autre ou de tomber dans un rationalisme sans limites.

Les Remains de Froude, publiés par Newman en 1838 (cf. supra, t. xi, col. 1687) le détachèrent d’Arnold. Il trouva dans cet ouvrage un haut idéal de sainteté ; l’exposé de l’idéal chrétien du Moyen Age, la critique des Réformateurs, la loyauté avec laquelle Froude allait droit au but lui plurent et l’attirèrent vers le mouvement tractarien, auquel l’attachèrent définitivement les lectures de Newman sur la nécessité d’une Église pour l’interprétation des Écritures. Newman reconnut tout de suite l’importance de l’entrée de Ward dans le mouvement : « La seule vraie nouvelle, écrivait-il à Bowden en mai 1839, est l’accession de Ward de Balliol aux bons principes. C’est une accession très importante. Je le connais fort peu, mais je ne puis pas ne pas l’aimer beaucoup, bien qu’il professe encore être un radical en politique. » Lett. and Corr. of J.-H. Newman, t. ii, p. 182, cité par Thureau-Dangin, op. cit., t. i, p. 169 sq.

Tout de suite, avec sa fougue habituelle, Ward prend position. L’attitude adoptée par les premiers chefs du mouvement, Newman, Keble, Pusey, ne lui suffit pas : ceux-ci voulaient insuffler à l’anglicanisme une nouvelle vie, conforme à l’idéal qu’ils s’étaient formé de l’Église primitive. Pour Ward et ses jeunes disciples, Faber, Oakley, Dalgairns, le christianisme primitif est séparé du protestantisme par un abîme infranchissable, tandis qu’il concorde avec l’Église romaine. Il faut choisir : conserver ou rejeter l’anglicanisme (cf. supra, t. xi, col. 1698). Ce n’est pas qu’il fût dès lors prêt à faire sa soumission à l’Église romaine : il avait trop confiance en Newman : Credo in Newmanum, disait-il ; mais il était séduit a par la consistance dogmatique de l’Église de Rome, par son principe d’autorité, par son idéal de sainteté, par ses habitudes de piété », qu’il ne trouvait pas dans l’anglicanisme. Thureau-Dangin, op. cit., t. i, p. 199. Il