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CANO — CANON DE LA MESSE


0. P. : Opéra utilissima délia cognilione et vittoria di se stesso, Venise, 1545. On possède différentes consultations théologiques de Cano, dont six ont été éditées par son historien Cahallero. La plus importante est celle sur le catéchisme de Barthélémy de Carranza. Le même historien a puhlié un curieux mémoire de Cano sur lui-même, adressé à Philippe II, pour qu’il renonçât à le prendre comme confesseur. On trouve vingt-deux lettres de Cano dans le même ouvrage. La célèbre censure de Cano sur la Compagnie de Jésus, dont tant d’auteurs ont parlé, et que presque personne n’a vue, fut publiée en Espagne sans lieu ni date, au temps de la suppression de la Compagnie, mais elle fut confisquée en 1777, après son apparition. Elle a été rééditée, d’après deux manuscrits, dans Crisis de la Compahia de Jesùs, Barcelone, 1900, p. 152-159. On possède des annotations manuscrites de Cano sur la IIa-IIæ de saint Thomas. Elles se trouvent dans les manuscrits vaticans 4647 et 4648 ; le manuscrit original est conservé aujourd’hui dans la bibliothèque de l’université de Salamanque.

III. Doctrines.

C’est le De locis theologicis qui a fait la réputation théologique de Melchior Cano et l’a placé au premier rang des théologiens classiques. Cette œuvre, en effet, n’est pas seulement remarquable par la forme littéraire qui l’égale aux plus belles productions de la Renaissance, ni par la liberté d’esprit, la finesse de jugement, le sens critique et l’érudition de son auteur ; elle est surtout une création, et marque, à ce titre, une étape dans l’histoire de la théologie. Cano a voulu établir scientifiquement les bases de la science théologique. Son œuvre est un traité de la méthode en théologie. Il suffit d’en indiquer le plan général pour en révéler l’économie et l’importance. Après un court avant-propos dans lequel il indique son dessein, il emploie le I er livre, qui n’a que quelques pages et peut être considéré comme une introduction, à distinguer entre l’argument d’autorité et l’argument de raison et à énumérer les parties de l’ouvrage. Il énumère dix lieux ou sources théologiques. Chacun d’eux fait l’objet d’un livre spécial. C’est ainsi qu’il traite successivement : 1° de l’autorité de l’Écriture sainte ; 2° de l’autorité de la tradition orale ; 3° de l’autorité de l’Église catholique ; 4° de l’autorité des conciles ; 5° de l’autorité de l’Eglise romaine ; 6° de l’autorité des saints Pères ; 7° de l’autorité des théologiens scolastiques ; 8° de la valeur de la raison naturelle telle que la manifestent les sciences humaines ; 9° de l’autorité des philosophes ; 10° de l’autorité de l’histoire. Ces matières sont traitées dans les 1. II-XI. Le 1. XII est consacré à l’usage que l’on doit faire des lieux théologiques dans la dispute scolastique, c’est-à-dire dans la théologie polémique. C’est la section la plus étendue de l’ouvrage. Cano devait traiter, dans le I. XIII, de l’emploi des lieux théologiques dans l’iNposition de l’Kcriture sainte ; et, dans le dernier livre, de l’usage des lieux théologiques contre les différentes catégories d’adversaires de la foi catholique. Sa mort prématurée ne lui permit pas d’achever une œuvre à laquelle il avait travaillé pendant de longues années.

Le De lotis theologieis est un véritable manifeste théologique. Il est le résultat de l’action rénovatrice exercée sur la théologie en Espagne par François de Victoria dont Cano fut le plus brillant et le plus fidèle disciple. Retour à l’érudition patristique et emploi d’une langue littéraire dans les sciences théologiques, tels furent les points de vue prédominants dans la direction créée par Victoria, et que Cano réalisa avec une remarquable maîtrise dans l’œuvre qui a illustré son nom. On peut se demander si la forme littéraire préconisée par Cano se prête aisément a l’exposé et à la discussion des matières théologiques, et si l’érudition ecclésiastique n’expose pas à placer au second plan la partie systématique de la théologie. En tout cas, la

direction donnée par Victoria et Cano aux études théologiques répondait au vœu de beaucoup d’esprits de leur temps, et elle brisait, entre les mains des humanistes malveillants à l’égard de l’école, un argument dont ils ne cessaient depuis longtemps d’abuser.

Quelques idées ou jugements émis par Cano ont soulevé des critiques. On les trouvera indiqués et débattus dans l’apparat littéraire que Serry a placé en tête de son édition des Lieux théologiques. Nous devons néanmoins signaler pour mémoire l’opinion soutenue par Cano sur le ministre du sacrement de mariage. En présence de l’incertitude des théologiens antérieurs sur cette question, Cano a cherché à établir que les contractants dans le mariage peuvent former par eux-mêmes le contrat, mais le contrat n’est sacrement que par l’intervention du prêtre. Cette doctrine, exposée au c. v du 1. VIII, eut assez d’autorité pour entraîner un grand nombre de théologiens, et en faire, un instant, l’opinion commune.

Quftif-Echard, Scriptores ordinis prædicatorum, t. ii, p. 176 ; F. Cahallero, Vida del lit. Melchior Cano, in-8° Mailrid, 1871 ; M. Menendez Pelayo, Historia de los heterodoxos espaiioles, Madrid, s. d., t. ii, p. 359 sq. ; Crisis de la Compahia de Jesùs, Barcelone, 1900, p. 126-168 ; E. Schater, Beitraçie zw Geschiclite desspanisclienProtestantismus und der Inquisition ini sechzehnten Jalirhundert, Gutersloh, 1902 ; voir l’index du t. m.

P. Mandonnet.


1. CANON DE LA MESSE. On appelle ainsi cette partie principale et à peu près invariable de la messe qui commence, dans le missel romain, après le Sanctus et qui finit au Pater. Son nom lui vient de sa fixité réglée par les lois de l’Église ; de là les termes de prière légitime, legitimum, S. Optât de Milève, 1. II, P. L., t. xi, col. 965, ou canonique, canon, S. Grégoire le Grand, Epist., I. IX, epist. xii ; 1. XIV, epist. ii, P. L., t. lxxvii, col. 956, 1305, employés pour la désigner. On l’appelle encore secretum ou secretam, prière secrète, en raison de l’usage existant à Rome, mais qui ne devint général en Occident que vers la tin du Xe siècle, de réciter le canon à voix basse. Enfin, attendu que le canon comprend l’acte essentiel du saint sacrifice, celui par lequel se consomme l’immolation mystique de Jésus-Christ, il est une prière mystique, mysticam precem, S. Augustin, De Trinitate, 1. III, c. v, n. 10, P. L., t. xill, col. 874, ou encore la prière par excellence, preeem, S. Innocent I er, Epist., xxv, ad Décent. r P. L., t. xx, col. 553 ; S. Grégoire le Grand, Epist. r 1. IX, epist. xii, P. L., t. lxxvii, col. 956, et surtout l’action par excellence, aclio, puisqu’en récitant le canon oh répète, conformément à l’ordre de Notre-Seigneur : Hoc facite in meam commenwrationem, ce qu’il a fait à la dernière Cène. A la vérité ce nom d’action, encore employé aujourd’hui, ne désigne strictement que la consécration, Walafrid Slrabon, De rebus ecclesiaslicis, c. xxii, P. L., t. exiv, col. 948 ; cf. t. lxxviii, col. 273-274, mais il était naturel de l’étendre aux autres parties du canon, vu leur intime liaison avec l’action sacramentelle proprement dite. De là l’expression : infra aclionem, qui sert, dans le missel, à repérer l’endroit du canon où doivent se faire, à certaines fêtes de l’année, les intercalations qui leur sont spéciales. Dans les textes liturgiques, le canon est souvent désigné par le nom de canon aclionis. Cf. Dictionnaire d’archéologie chrétienne ci île liturgie dedom Cabrol, 1. 1, col. 146 -449. — I. Genèse. IL Composition actuelle et signification du canon de la messe, et principalement du canon en usage dans l’Église d’Occident.

I. Genèse du canon de la messe. —

D’après le concile de Trente, sess. XXII, Detacrif. » iiss ; r, c. iv, le canon de la messe est composé des paroles de JéSUS-Christ, des traditions apostoliques ci des Institutions des saints pontifes. Toutes sommaires qu’elles Boient, ces indications résument bien l’histoire des origines du canon et même