se contenter d’espérances sur le premier point, les Serbes reçurent pleine satisfaction sur le dernier ; car ils jouirent dès lors, au point de vue religieux et ecclésiastique, des mêmes droits que les catholiques, et virent disparaître les quelques légères traces qui subsistaient encore d’une inégalité de traitement en leur défaveur. Le congrès national de 1790 avait aussi sollicité et obtenu du gouvernement impérial la création à Carlovitz d’un séminaire de théologie pour 120 élèves, et l’ouverture dans chacun des sièges épiscopaux d’écoles ecclésiastiques préparatoires. Mais, comme l’entretien de ce séminaire et de ces écoles était, aux termes du rescrit impérial, à la charge du métropolite et des évoques, ceuxci préférèrent ne pas donner suite au projet et laissèrent enfouie dans les archives l’autorisation impériale. C’est du moins l’accusation que porte contre eux l’auteur de l’article Narodni congressi publié en 1862 dans le Lélopis, t. I, p. 81. Cependant, Carlovitz aurait vu s’ouvrir dès 1791, et, à sa suite, Versecz, Arad et Pakraz, de modestes écoles ecclésiastiques. Goloubinski, op. cit., p. 022.
IV. De 4818 a nos jours. — La révolution de 1848 eut un profond retentissement en Autriche. De toutes parts, les nationalités s’y levèrent, pour marcher à la conquête de leur indépendance politique et même religieuse. Les Serbes ne furent point des derniers. Comme pour leurs frères de Croatie, c’était moins d’Autriche que de Hongrie que leur venait le danger d’une oppression. Aussi, en même temps que les Croates offraient au gouvernement de Vienne leur concours contre celui de Pest, les Serbes envoyaient-ils des députés à Pest pour demander le respect des conventions conclues avec leurs ancêtres par Léopold I’r. On ne répondit à leurs requêtes que par des injures et des violences. Les représentants de la nation se réunirent alors à Carlovitz sous la présidence de l’archevêque Rajacliich (1812-186I). Le congrès national vota, le 3 mai, entre autres décisions, les résolutions suivantes : 1° les dignités de voïévode et de patriarche sont rétablies ; 2° la nation serbe jouira désormais de son indépendance politique, sous l’autorité de la maison d’Autriche et de la couronne de Hongrie ; 3° elle exprime le désir que la Syrmie, le banat de Témesvar, la Ratchkie, etc., soient proclamés voïévodie serbe, conformément aux pacta conventa conclus a^ec Léopold I er ; 4° le congrès reconnaît l’union politique de la voïévodie avec les royaumes de Croatie, Esclavonie et Dalmatie, tous placés sur le pied d’une liberté et d’une égalité parfaite ; 5° le congrès supplie l’empereur-roi de proclamer et d’assurer dans les mêmes conditions, l’indépendance de la nation valaque en Transylvanie. A. d’Avril, op. cit., p. 342.
Peu de temps après, les Serbes marchaient avec les Croates contre les Hongrois. L’empereur, pris entre la révolution hongroise triomphante et les revendications nationales des populations slaves, courut au plus pressé et, pour se conserver l’appui des régiments serbes et croates, fît quelques concessions et de nombreuses promesses. Par un décret en date du 15 décembre 1818, il confirma à Chouplikatz, ex-officier français au service de l’Autriche, la dignité de voïévode qui lui avait été conférée par le congres national, mais, quand l’élu mourut subitement quelques jours après, se garda bien de le remplacer. Rajachich lut autorisé, par le même décret, à porter désormais le titre de patriarche, qui resta acquis à sis successeurs. Toutefois le gouvernement impérial se vengea de cette concession forcée en détachant du diocèse de Carlovitz les trois quarts de la circonscription pour les annexer au diocèse de Novisad (Neusalz), dont le titulaire, l’Ialon Athanaskovich, un gouvernemental forcené-, nommé sans le concours de la nation et du patriarche, fut considéré par l’une et par l’autre, jusqu’en 1856, comme un intrus. A. d’Avril, op. cit., p. 343 ; Radich, op. cit., p. GO-02 ; Markovich,
op. cit., p. 420. La voïévodie serbe subsista de nom jusqu’en 1860 ; mais, en fait, l’empereur, au lieu de nommer un voïévode, en prit lui-même le titre, et rattacha en 1849 les provinces qui la composaient au gouvernement de Zagreb (Agram). De 1851 à 1860, ce fut, chez les Serbes de la voïévodie, le triomphe de la centralisation allemande. Mais ces événements, d’ordre purement politique, n’eurent pas de répercussion dans le domaine religieux et ecclésiastique. Ils ne se rattachent à l’histoire de l’Église serbe que par la part prépondérante que prit le patriarche Rajacliich à toutes les négociations dont ils furent le prétexte ou l’occasion. Les revers subis par l’Autriche dans la guerre d’Italie, en 1859, provoquèrent un nouveau réveil des aspirations nationales. Les Serbes y prirent leur part en adressant à l’empereur, par l’intermédiaire du patriarche, en juillet 1860, une pétition demandant que les évêchés de Rukovine, de Dalmatie et de Transylvanie soient complètement subordonnés au patriarcat de Carlovitz ; que les évêques puissent se réunir en synode, et qu’après la clôture du synode un congrès national ecclésiastique soit autorisé ; qu’une section spéciale, destinée à l’administration de l’Église grecque non-unie, soit constituée au ministère des cultes sur le modèle de celle qui existe pour l’Eglise évangélique ; que le gouvernement autorise la construction à Vienne d’une église, d’un presbytère et d’une école pour le rite grec ; qu’il décrète la création de deux universités, l’une pour les Serbes, l’autre pour les Roumains ; qu’il interdise légalement tout prosélytisme ; qu’il exempte les couvents serbes de tout impôt ; enfin, que le collège supérieur de Carlovitz et le collège secondaire de Neusatz soient reconnus comme d’utilité publique. A. d’Avril, op. cit., p. 318. La plupart de ces propositions furent agréées, en principe du moins, par l’empereur. En mars 1861, les provinces qui composaient la voïévodie serbe se virent réincorporées dans le royaume de Hongrie. Le congrès national qui se réunit le 2 avril suivant, sous la présidence du vieux patriarche, et avec le concours des représentants des orthodoxes de Hongrie, d’Esclavonie, de Croatie, de Transylvanie et des Confins, émit des vœux et lança des projets pour la réorganisation de la voïévodie, mais sans aucun résultat. Celui de 1864, convoqué pour nommer un successeur à Rajachich, mort en 1860, refusa d’examiner la question des revendications roumaines soulevée parles représentants roumains. Depuis 1860, en effet, la Bukovine et la Transylvanie réclamaient énergiquement leur autonomie religieuse. Un patriote ardent, l’évêque transylvain Schaguna, dirigeait le mouvement séparatiste. Il obtint gain de cause devant le synode épiscopal de Carlovitz, et le 24 décembre 1861 (5 janvier 1865), l’empereur approuvait la décision du synode et érigeait Hermannstadt en métropole indépendante des Roumains de Transylvanie. L’Eglise serbo-roumaine de Rukovine, elle, dut attendre neuf ans encore son autonomie. Verein, op. cit., p. 372 ; Radich. op. cit., p. 64. Le compromis austro-hongrois de 1867, en établissant le dualisme dans l’empire, eut pour résultat de morceler, politiquement et administrativeinent, la nationalité serbe. L’Esclavonie unie à la Croatie forma avec elle le royaume tri-unitaire, à qui il manquait toutefois la Dalmatie, rattachée à la Cisleithanie, pour justifier son titre. Ce royaume tri-unitaire tronqué constituait avec le royaume de Hongrie la Transleithanie. La voïévodie proprement dite et le banal restaient incorporés à la Hongrie ; de sorte que les Serbes se trouvaient finalement partagés, au point de vue civil, en trois groupes distincts : Serbes cisleithans de Dalmatie et de Rukovine, Serins transleithans du royaume tri-unitaire, Serbes transleithans de Hongrie. Ce partage entraîna avec lui. au point de vue religieux, une organisation nouvelle dis groupements ecclésiastiques. La métropole, roumaine d’Hermannstadl jouissait depuis 1865 d’une complète autonomie. Lu 1873, l’Église