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CEREMONIES — CERINTHE


le respect de Dieu, le respect des autorités religieuses et civiles, des lieux consacrés et des choses saintes, des fidèles et de tous les hommes les uns pour les autres. Encensements, révérences, salutations, baisers à l’autel, au livre des Evangiles, à la croix, aux reliques, sont autant de leçons de respect. Il suffit de lire dans le pontifical les cérémonies du baptême des catéchumènes, de la réconciliation des pénitents, de la bénédiction du chevalier, du sacre des empereurs et des rois, pour comprendre quelles leçons s’en dégageaient autrefois pour les peuples : humilité devant Dieu et devant les hommes, prix du salut de l’àme et du corps consacré membre du corps mystique du Christ, horreur de l’injustice et nécessité de l’expiation, amour désintéressé des petits et des faibles jusqu’au sacrifice de sa propre vie pour les défendre, sentiment profond que toute autorité, même la plus haute, vient de Dieu, sera jugée par lui, est un service et une dépendance et non pas seulement une supériorité et un honneur.

Les principaux liturgisles du moyen âge du ix" au xiiie siècle : Ainalaire, De ecclesiasticis officiis, P. L., t. cv, col. 985-1252 ; Hildebert de Tours, Versus de mysterio missse, P. L., t. clxxi, col. 1177-1106 ; Honorius d’Autun, Gemma animai, de antiquo ritii minorum, P. L., t. clxxii, col. 541-738 ; Rupertde Tuy, De (U nuis officiis per anni circulant, P. L., t. clxx, col. 1-332 ; Innocent III, De sacro altaris mysterio, P. L., t. ccxvii, col. 763916. Cet ouvrage, le plus précieux, le plus pieux et le plus profond de tous, a été très bien traduit par l’abbé Couren, in-12, Paris, 1875. Voir aussi S. Thomas, Sum. theol., III*, q. lxxxiii, a. 1-5 ; Suarez, De sacramentis, disp. XV, De cxremoniis sacramentorum in génère. Les Institutions liturgiques de dom Guéranger, 3 in-8° Paris, 1840-1841 ; 2’édit., 4 in-8° Paris, 1878-1885, initient à la connaissance des cérémonies liturgiques, de leur histoire et des liturgistes de tous les siècles, h’Année liturgique, du même auteur, 1841-1904, est un des ouvrages les meilleurs pour faire comprendre et aimer les cérémonies de l’Église. Dom Cabrol l’a complété et en a en quelque sorte donné l’introduction en écrivant : Le livre de la prière antique, Paris, 1900. M"’Duchesne, Origines du culte chrétien, Paris, 1889 ; divers articles dans Martigny, Dictionnaire des antiquités chrétiennes, 2e édit., Paris, 1877, et dans Cabrol, Dictionnaire d’archéologie et de liturgie, en cours de publication. Les ouvrages d’archéologie sont des sources d’information précieuse. Le livre du chrétien, Tours, contient l’explication substantielle de la liturgie et beaucoup de cérémonies : baptême, confirmation, extrême-onction, office des funérailles, toutes les prières du rituel romain pour la recommandation de l’àme.

R. COMPAING.

    1. CERINTHE##


CERINTHE. - I. Vie. IL Doctrine. III. Disciples.

I. VIE.

A défaut de l’histoire, qui est sobre de détails et nous laisse ignorer la date de la naissance et de la mort de Cérinthe, la tradition, dont saint Épipbane i lait l’écho, abonde en renseignements sur cet hérétique. Cérinthe est né en Egypte, probablement de parents juifs ; il était circoncis. Il aurait reçu à Alexandrie une instruction assez développée, recueillant les données de la philosophie grecque et orientale ainsi que les essais de conciliation tentés par I’hilon entre la sagesse païenne et l’enseignement mosaïque. S. Épiphane, User., xxviii, 2, P. G., t. xi.i, col. 380. Puis, quittant l’Egypte, parcourant lu Palestine à l’époque de la prédication apostolique, séjournant successivement à Jérusalem, à Césarée, à Antioche de Syrie, il se serait fiv on Asie, où il tint école et fonda une secte. S. Irénée, Vont, hær., i, 26, 1, P. G., t. vil, col. 681 ; S. Épiphane, Hxr., xxviii, 1, P. G., t. xi.i, col. 377. Il laissa ut dos traces de son passage, créa des embarras iristianisme naissant en cherchant à paralyser la igation évangélique. Partisan résolu de la fidélité à la loi et de la circoncision, il estimait qu’elles étaient niiient nécessaires pour le salut et prétendait les Imposer à quiconque voulait abandonner le paganisme pour embrasser la foi chrétienne. Chrétien lui-même, il ne comprit rien aux tendances catholiques du christianisme, il conserva ses uos étroites et n’accepta pas l’admission des gentils, telle que l’entendait et la prati quait saint Paul. D’après lui, comme d’après les judaïsants, le mur de séparation devait être maintenu et non renversé. C’est donner à entendre qu’il aurait été l’àme de l’opposition juive, le chef occulte mais très écouté des juifs intransigeants et sectaires, critiquant le baptême donné par saint Pierre au gentil Corneille, blâmant comme une apostasie la direction que saint Paul imprimait à l’Église en faveur des non-juifs, tenant pour non avenues les décisions arrêtées à la réunion de Jérusalem, exigeant la circoncision de Tite et organisant sur les pas de saint Paul une sorte de contre-prédication qui aurait abouti, en cas de réussite, au maintien du christianisme sous la dépendance étroite du judaïsme. S. Épiphane, Hær., xxviii, 2-4, P. G., t. xli, col. 380-381. En passant de la Palestine en Syrie, de la Syrie en Galatie et en Asie, il ne fit que développer trjç a-JTOû à71<i)Xet’aç pâpadpov, Hær., xxviii, 2, àvô^Toç ita àvorjTwv StSâo-xaXoç. lbid, , 6, P. G., t. xli, col. 380, 381. Si bien qu’à la fin du ie siècle il était regardé comme une peste ; d’où le mot de saint Jean, aux thermes d’Éphèse, quand il sut que Cérinthe était là : « Fuyons de crainte que la présence d’un tel ennemi de la vérité ne fasse écrouler les murs. » Ce mot, recueilli par saint Irénée sur les lèvres de saint Polycarpe, a été consigné par Eusèbe, H. E., iii, 28, P. G., t. xx, col. 276.

Ces divers renseignements paraissent vraisemblables dans leur ensemble. Il faut constater cependant que saint Paul, très au courant des menées judaïsantes qu’il dévoile et flétrit énergiquement, traitant de faux apôtres et de faux frères ceux qui sèment l’erreur et jettent la division dans les communautés qu’il a fondées, <it^c<xrcôoroXot, II Cor., XI, 13, 71apst(raxT01 e^euSdtSeXçot, Gal., H, 4, ne nomme jamais Cérinthe parmi les meneurs. Quant à saint Jean, qui connaît Cérinthe et sa doctrine, on sait simplement par la tradition qu’en composant son Évangile pour affirmer et démontrer la divinité de Jésus-Christ, il visait en particulier Cérinthe. S. Irénée, Cont. hær., iii, 11, 1, P. G., t. vii, col. 880.

Cérinthe se borna-t-il à un enseignement purement oral ? Neconsigna-t-il pas dans quelque ouvrage les points principaux de son système ? Nous n’avons aucun renseignement à ce sujet. A la suite des aloges, Caius de Rome l’accuse d’avoir composé une Apocalypse sous le nom d’un grand apôtre, dans laquelle il avait inséré maints prodiges, TepaToXoffaç. Eusèbe, IL E., ni, 28, P. G., t. xx, col. 273. Voir t. i, col. 1469. Cependant quelques critiques ont pensé que Caius, au courant de l’enseignement traditionnel et sachant que l’Église de Rome regardait l’Apocalypse comme un livre canonique dû à saint Jean, n’a pas mis ce livre sur le compte de Cérinthe. Selon eux, il parlerait plutôt d’un apocryphe, dont c’est ici l’unique mention ; et c’est l’hypothèse que suggère Théodoret quand il nous représente Cérinthe, au sujet des révélations, u>ç aÙTo ; TêÔeauivoç- Hæret. fab., II, 3, P. G., t. i.xxxin, col. 389.

II. Doctrine.

A lenir compte des renseignements qui sont fournis, d’abord pur saint Irénée, les Philosophouviena et le pseudo-Tertullien, ensuite par Eusèbe, saint Épiphane, saint I’hilastrius et saint Augustin, on constate que Cérinthe n’est qu’un écho des idées qui s’agitaient de son temps dans les milieux cultivés. On rêvait, en effet, soit d’accommoder le judaïsme avec l’hellénisme platonicien, soit de combiner un système religieux avec les anciennes données de la philosophie et l’enseignement nouveau de l’Évangile, en réservant une place spéciale à la gnose à cé-té ou au-dessus de la foi. Or le système de Cérinthe ressemble à un syncrétisme judéo-gnoslique de mosatsme défiguré, de philosophie orientale et de christianisme travesti ; il n’est ni complètement gnostique, encore moins chrétien ; il porte l’empreinte de ces influences diverses et paraît & un moment où le judaïsme partiel est ànb u.épov ;.