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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 2.2.djvu/611

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CIRCUMINSESSION — CISTERCIENS


tout pourquoi la tradition patristique et théologique a parlé de permealio, de circumpemieatio, de circuminsessio, de’îrepiY_(opr ( <riç, c’est-à-dire d’attraction mystérieuse par laquelle les trois personnes sont portées l’une vers l’autre, vont l’une à l’autre. C’est une sorte de mouvement qui, dans la génération du Fils ou la procession du Saint-Esprit, conduit l’un à l’autre et réciproquement. Petau a fait consister plus particulièrement la circuminsession dans ce mouvement. C’était oublier la parole même de Notre-Seigneur qui n’a pas dit seulement Pater ad Filium, ou apurf Filium ni Filins ad Palrem ou apud Patron, mais Pater in me est et ego in Paire. Il y a donc une réelle présence des personnes qui résident l’une dans l’autre et celle idée est mise en relief surtout par la consubstantialité de nature, et traduite par le mot de circuminsessio.

3° Enfin, les relations elles-mêmes, tout en constituant les personnes et en les distinguant, les rapprochent et appellent la circuminsession. Le Père, parce qu’il est Père, appelle le Fils, il se l’oppose, mais il l’enveloppe, il ne peut être Père si le Fils n’est pas ; un concept entraîne donc l’autre et lui est attaché par un lien analytique essentiel. Pareillement le Fils appelle le Père et ne peut être conçu sans lui. Mais il y a plus que ce rapport logique entre les différents termes des relations. Comme les relations sont intrinsèques à la divinité et qu’elles sont constituées par des actes immanents, les personnes elles-mêmes sont inséparablement unies dans la nature indivisible qu’elles se communiquent réciproquement, lia nobis hoc dignala est ipsa Trinitas evidenter oslendcre, ut eliam in /lis nominibus quibus voluit sigillatim personas agnosci, unani sine allera non perniitlal intelligi ; nec enim Pater absque Filio cognoscitur, nec sine l’aire Filius invenitur. Belaiio q nippe ipsa vocabidi personalis j/ersonas separari vetat, (jims eliam dum non simul nominat, simul insinuât. Aemo auteni audire potest unumquemque istorum nominnm, in quo non intelligere cogatur et alterurn. XIe concile de Tolède, Donzinger, n. 227, 228.

IV. Une erreur a ce sujet, — Certains théologiens, comme Suarez, De Trinitate, t. IV, c. xvi, n. 11-13 ; Ruiz, De Trinitate, disp. CVII, sect. vii, ont pensé devoir établir la circuminsession sur L’immensité divine. Le Père est partout, le Fils est partout, le Saint-Esprit est partout, ils se rencontrent donc toujours et on ne peut citer un point de l’espace réel ou possible où ne se trouvent simultanément ou ne puissent et ne doivent se trouver les trois personnes divines. Files sont dune partout présentes l’une à l’autre, elles coexistent, elles agissent en tout de concert et d’une seule action commune et identique. Certes, il est vrai que la divinité est omniprésente, qu’elle n’est enfermée en aucun lieu et limitée par aucune frontière, que dès lors les personnes divines coexistent partout. Mais outre la confusion que cette théorie introduit entre l’immensité et l’omniprésence divines, il faut remarquer que cet aspect de la circuminsession est très secondaire et ne constitue donc pas primitivement ce concept. Ce qui fonde avant tout la circuminsession, c’est la consubstantialité des trois personnes divines. Ftant consubstantielles, elles se rencontrent et sont présentes l’une à l’autre dans cette nature. Ftant consubstantielles et présentes mutuellement, elles agissent ensemble, créent de concert le monde >(

ace, et coexistent dans 1 ii ensilé. Mais cette

coexistence suppose l’immensité, laquelle suppose l’espace et la création, el la circuminsession est un fait i’inl. antérieure toute création età toute étendue. Iiu reste, s’il fallait entendre la circuminsession a la façon de Suarez el île Ruiz, on devrait l’étendre à loul le créé : car Mien est présent i toutes éludes ; il n’en est aucune qu’il n’enveloppe ei ne pénètre, el toutes choses Boni en lui. /// ipso enim vivimus, nwvetnur et sumus, disait saint Paul à l’Aréopage. Aci.. xvii, 28, cꝟ. 24.

V. Autre sens et portée théologiqtje de la circuminsession. — Notons enfin un sens secondaire de la circuminsession ou Trîpr/uJp^Ti ;, chez les Pères : c’est la présence du Verbe dans l’humanité à laquelle il s’est uni par l’incarnation. L’union hypostalique fait assister l’humanité par le Verbe et la rend présente à celui-ci. C’est une circuminsession particulière au Verbe et nie, dans le temps, du lait de l’incarnation. Elle diffère de l’autre circuminsession par plusieurs cotés. D’abord, la première est propre aux trois personnes divines et marque leur compénétration mutuelle, la. seconde est propre au seul Verbe, à la nature divine considérée comme possédée par le seul Verbe, et marque son rapport avec la nature humaine du Christ ; la première est fondée sur l’unité de nature et accuse la multiplicité des personnes habitant une même nature unique, la seconde est fondée sur l’unité de personne et accuse la multiplicité des natures unies l’une par l’identité, l’autre par l’incarnation au Verbe divin. Enfin la compénétration des personnes, indiquée par la première, diffère grandement de la compénétration de la nature humaine par la nature divine et la personne du Verbe signifiée par la seconde. Les deux sont une arme excellente conlre l’hérésie, puisque la première, en affirmant la consubstantialité des personnes divines, détruit l’arianisme, et, en supposant la distinction des personnes, réfute le sabellianisme ; la seconde, en établissant la circuminsession des deux natures du Christ dans l’unité de la personne, combat du même coup le nestorianisme avec ses deux personnes dans le Sauveur et le monophysitisine avec sa confusion des éléments du Christ en une seule nature. Cf. Franzelin, De Deo trino, th. xvi, p. 225 sq.

Outre les auteurs cités, voir le Maître des Sentences, IV Sent., t. I, dist. MX, P. L., t. CXCII, col. 573 sq. ; S. Bonaventure, In PSent., t. I, dist. XIX, p. i, q. iv, Opéra, 1882, t. la, p. 341 sq. ; Auréolus, In I V Sent., t. I, dist. XIX, p. H, a. 1 ; fiénébrard. De Trinitate, t. II ; Vitasse, De sacrosancta Trinitate, dans le Cursus theol. complétas de Migne, t. viii, p. 602 sq. ; Suicer, Thésaurus ecclesiasticus, Amsterdam, 1728, v Tfi « ;, v, t. ii, col. 1299 sq. ; Jungmann, De Deo uno et trino, c. ii, a. 4, Ratisljonne, 1870, p. 322 ; de Ginoulhiac, Histoire du dogme catholique, t. XV, Paris, 1866, t. iii, p. 516 sq. ; Kleutgen, De ipso Deo. part. I, I. I, q. v, c. il, a. 2, Ratisbonne, 1881, p. 694 ; Pesch, l’i wlectiones dogmatiese, t. ii, De Deo trino, sect. iv, prop. LXXXVI, 1’ribourg-en-Brisgnu, 1895, p. 322 ; Th. de Régnon, Études île théologie positive sur la sainte Trinité, 3’série : Théories grecques des processions divines, Paris, 1898.

A. Chollet.


CISTERCIENS. - I. Origines de l’ordre. II. Règle et organisation. III. Réformes et congrégations diverses. IV. Privilèges et liturgie. V. Services rendus. VI. Personnages célèbres, saints et bienheureux. VII. Ecrivains.

I. Origines de l’ordre. —

Les cisterciens doivent leur nom à l’abbaye de Citeaux (Cistercium), qui lut le berceau de leur ordre. Ce monastère eut pour fondateur (1098) saint Robert, abbé de Molesmes, qui voulut y pratiquer avec quelques-uns de ses religieux la règle de saint Benoit au pied de la lettre. Il ne songeait, pas plus que ses deux successeurs, le lî. Albéric et saint Etienne Harding, à établir un ordre nouveau. Celle création leur fut imposée par l’aflluence des vocations ci le grand nombre (les monastères qui sortirent de la filiation de Citeaux. L’entrée (le saint Bernard au noviciat (1113) fut le peint de dépari de ce développement extraordinaire. La fondation de la Ferté (1113), l’ontign 1 1 1 1 i). Clairvaux et Morimond 1 1 1 15) ne se til guère attendre. Ces maisons reçurent dans la suite le titre de premières tilles de Citeaux. La sainteté de saint liernaici, l’élévation de sa doctrine, le feu de son éloquence, l’éclat de ses miracles, l’étendue d son action religieuse ei politique attirèrent dans 1rs abbayes cisterciennes les âmes éprises de l’idéal religieux. Sous la