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221 BAPTÊME DES HÉRÉTIQUES (COxNTRO VERSE RELATIVE AU) 222

insuffisante sans la collation préalable du baptême. Epist., lxxii, 1, P. L., t. iii, col. 1046. Cyprien fait part de cette lettre à l’évéque de Rome, en y joignant la copie de la synodale précédente et de sa réponse à Quintus. En même temps, pour répondre à une nouvelle consultation, il expédie à Jubaianus ces trois documents, et dit du baptême des hérétiques : Quod nos necratum possumus nec legitimum computare, quando hoc apud eos esse constet iLLicii’UM, Epist., lxxiii, 1, P.L., t. iii, col. 1110 ; ac per hoc non rebaptizari sed baptizari a nobis quicumque ab adultéra et profana aqua veniunt abluendi et sacrificandi salutaris aquse veritate. Ibid. Le cas semblait pourtant avoir été bien posé par le correspondant de Jubaianus : Quzerendum non est QUIS baptizaverit, quando is, <jui baptizalus sil, accipere remissam peccatorum potuerit secundum quod credidit…, ut nec ab ipso (Marcione) venicntes baptizari oportere, quod jam in nomine Jesu Christi baptizati esse videantur. Ibid., 4, P. L., t. iii, col. 1112. C’était affirmer la validité du baptême, à cause de la tormule employée, et son efficacité, d’après les dispositions du sujet, abstraction laite du ministre. Or, ce sentiment s’était manifesté en .Mauritanie dans un écrit que Jubaianus avait adressé à Cyprien. Le traité De rebaptismate, P. L., t. iii, col. 1183-1201-, s’il n’est pas cet écrit même, comme l’a soutenu J. Ernst, dans la Zeitschrift fur katholisclte Théologie, 1896, p. 193 sq., est, suivant l’opinion générale, l’œuvre d’un évêque africain, composée en 256. Or, il soutient la tradition de la non-rebaptisation et la déclare unique et universelle. Ernst, Die Lehre des Liber de rebaptismate von der Taufe, dans la même Zeitschrift, 19C0, p. 429-462 ; P. Monceaux, Histoire littéraire de l’Afrique c/irétienne, Paris, l%2, t. ii, p. 91-97. Mais Cyprien déclare que le ministre étant indigne ne peut conférer validement le baptême, et que le sujet, jalsum credens, verum accipere non potuit, sed potius adultéra et profana, secundum quod credebat, accepit. Epist., lxxiii, 5, P. L., t. iii, col. 1113. Reste la coutume invoquée, et qui comptait encore des tenants même en Afrique ; Cyprien lui opposa une fin de non-recevoir, parce » qu’elle ne saurait être au-dessus de la vérité, ibid., 13, P. L., t. iii, col. 1117, et que non quia aliquando erratum est ideo semper errandum est. Ibid., 23, col. 1125.

Le pape Etienne n’accepta pas la décision du concile d’Afrique ; il menaça même de rompre avec ceux qui s’obstineraient dans leur manière de voir. Sa réponse intégrale ne nous est pas parvenue ; mais le dispositit principal nous en a été conservé par saint Cyprien. Epist., lxxiv, 1, P. L., t. iii, col. 1128. Plus de doute, il y avait désaccord entre la coutume d’Afrique et celle de Rome ; et dès lors l’affaire pouvait prendre une tournure des plus graves, si les évêques d’Atrique ne se rangeaient pas à l’avis du pape. De fait, ils ne s’y rangèrent pas.

Cyprien, en notifiant la décision d’Etienne à son collègue Pompée, évêque de la Tripolitaine, y relève vel supcrba, vel ad rem non pertinentia, vel sibi ipsi contraria, imperite atque improvide scripta. Epist., lxxiv, 1, P. L., t. iii, col. 1128. Il s’étonne que le pape juge omnium hsereticorum baptismala justa esse et légitima. Ibid., 2, col. 1129. Il continue à repousser la validité du baptême des hérétiques par les arguments déjà donnés. Il ajoute : si les hérétiques peuvent validement baptiser, ils peuvent de même conférer le Saint-Esprit. Or, ils ne peuvent pas donner le Saint-Esprit ; donc ils ne peuvent pas baptiser, fiaptème et confirmation sont tellement unis, dans sa pensée, qu’ils ne sauraient aller l’un sans l’autre. Ibid., 15, col. 1132. Il traite ironiquement la tradition, invoquée par Etienne, de præclara et légitima, déclare qu’elle doit céder à la vérité, ibid., 4, 9, col. 1131, 1134, et c’est au nom de la vérité qu’il maintient, à rencontre de la décision pontificale, l’usage d’Afrique.

Cyprien convoque à Carthage un concile plénier, pour le 1 er septembre 256, où se rendent 87 évêques de l’Afrique proconsulaire, de la Numidie et de la Mauritanie. On y lit la lettre de Jubaianus et la réponse de Cyprien ; Cyprien prie chacun des évêques présents de donner librement son avis, sans juger, sans excommunier personne, sans se faire évêque des évêques, et sans^ forcer les autres à partager sa manière de voir, chaque évêque ayant la plénitude de son libre arbitre. Concil. 111, de bapt., P. L., t. iii, col. 1054. A la suite des 85 évêques, Cyprien opina le dernier par ces mots : meam sententiam planissime exprimit epistola quæ ad Jubaianum, collegam noslrum, scripta est : hæreticos secundum evangelicam et apostolicam contestalionem adversarios Christi et antichristos appellatos, quando ad Ecclesiam venerint, unico Ecclesise baptismo baptizandos esse, ut possint fieri de adversariis a>nici et de antichristis christiani. Ibid., col. 1078. Selon l’usage, les actes de ce concile durent être notifiés au pape. Mais Etienne refusa de recevoir les députés africains, et lit défense à son clergé de communiquer avec eux.

Or, en Orient, les évêques de plusieurs provinces pensaient et agissaient comme ceux d’Afrique. Etienne leur avait écrit qu’il ne voulait plus communiquer ni avec Hélénus de Tarse, ni avec Firmilien de Césarée, ni avec les autres évêques de la Galicie, de la Galatie, de la Cappadoce et d’ailleurs, s’ils persistaient à vouloir rebaptiser les hérétiques. Eusèbe, H. E., vii, 5, P. G., t. xx, col. 645. Il avait dû faire part de cette décision aux autres évêques. Cyprien, de son côté, avait fait parvenir, par le diacre Rogatien, les actes des conciles d’Afrique aux évêques d’Asie, et l’épiscopat d’Orient se trouva dans l’alternative de suivre ou le pape ou l’évéque de Carthage. Firmilien, qui avait assisté au synode d’Iconium, approuva la conduite de Cyprien, et écrivit une lettre des plus vives contre l’évéque de Rome. Cette lettre n’apporte aucun argument nouveau. Firmilien, en elfet, en est au même point que Cyprien. Il ne voit dans le débat qu’une mesure disciplinaire, où la liberté de chacun n’empêche pas l’union de tous, comme dans l’affaire de la Pàque, Epist., lxxv, 6, P. L., t. iii, col. 1159 ; il refuse à tout ministre hérétique le pouvoir de conférer le baptême, et à n’importe qui de le recevoir de sa main, ibid., 7, 8, 9, col. 1161-1163, quand même le baptême aurait été conféré régulièrement, selon la formule trinitaire ; il traite d’erreur la coutume invoquée par le pape, ibid., 19, col. 1170 ; il renouvelle les arguments de Cyprien, et conclut de même. Ibid., 25, col. 1176.

Cette double opposition des évêques d’Afrique et d’Asie au décret du pape arracha-t-elle à Etienne une sentence d’excommunication ? Aucun document ne l’atteste. Il n’y eut qu’une menace, non suivie d’effet. Cyprien, Epist., lxxiv, 8, P. L., t. iii, col. 1133, dit : Abstinendos pulal. Ab illorum communione discessurum, note Denys d’Alexandrie, dans sa lettre à Sixte. Eusèbe, H. E-, vii, 5, P. G., t. xx, col. 645. Nullius anathematis interpositione, remarque [acundus, Cont. Mocian., P. L., t. lxvii, col. 864. Et saint Augustin : Abstinendos putaverat. .. Vicit tamen pax Christi in cordibus eorum ut in tali disceptatione nullum inter eos malum schismatis oriretur. De bapt. contr. donat., v, 25, 36, P. L., t. xliii, col. 194. Cf. De unico bapt. contra Petil., 23, ibid., col. 607 ; De Smedt, Dissert, seleclse, diss. VII, c. i, n. 4, p. 242 ; Grisar, Cyprians Opposilionsconcil gegen Papst Stéphane, dans la Zeitschrift fur katholische Théologie, 1881, p. 193 sq. ; Ernst, War der hl. Cyprian excommunicirl" ? Ibid., 1894, p. 473-499. Le schisme fut évité. Peut-être la lettre de Denys d’Alexandrie, annonçant au pape Etienne que les troubles occasionnés en Orient par la faction de Novatien avaient cessé et que toutes les Églises étaient heureusement rentrées dans l’unité, Eusèbe, H. E., vii, 5, P. G., t. xt