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BACHKINE — BACON

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André Khotiéev, imbus tous les deux des enseignements hérétiques des judaïsants (ères jidovstvouiouchtchikh), il se prit à formuler des théories nouvelles sur les dogmes et la discipline de l’Eglise orthodoxe russe. Ces théories étaient un mélange de rationalisme luthérien et de judaïsme rajeuni. Les inlluenc.es luthériennes, en effet, se faisaient déjà sentira Moscou, où Ivan le Terrible (1533-1581) avait permis aux disciples de Luther d'élever deux temples. Dobroklonski, Manuel d’histoire de l'Église russe, i- édit., Riazan, 1889, t. I, p. 285. Mathieu Bachkine fit parade de ses nouveautés doctrinales à un pope de l'église de l’Annonciation à Moscou (1553). Ce pope, appelé Siméon, reçut l’hérétique à confesse, et à son grand étonnement, l’entendit lui demander l’explication de maints textes de l’Ecriture sainte. Siméon se trouva fort embarrassé dans ses réponses. Bachkine lui-même le remit sur la bonne voie et lui énonça des théories qui, sur bien des points, étaient contraires au catéchisme orthodoxe. Siméon en fut surpris. Cependant il le laissa s’expliquer à son aise, et eut avec lui plusieurs entretiens. Il finit par se persuader que les opinions émises par son pénitent étaient étranges, et fort peu soucieux du secret de la confession, il en rendit compte au protopope Sylvestre, qui jouissait de la faveur du tsar. Sylvestre ne tarda pas à apprendre que l’orthodoxie de Bachkine éveillait des soupçons justifiés par les faits. Il se crut dès lois eu devoir d’en référer à Ivan IV. Bachkine fut arrêté et soumis à un interrogatoire. Il exposa par écrit son enseignement, et dévoila les noms de ses disciples et admirateurs.

Le tsar réunit un synode dans son palais (1553-1551) et y convoqua Bachkine et ses adhérents, qu’on accusait : 1° de ne pas reconnaître la divinité de JésusChrist et sa parfaite ressemblance avec le Père ; 2° de ne pas admettre la présence réelle de Jésus sous les espèces eucharistiques ; 3° de rejeter la confession, en partant de ce principe que le pénitent n’est pas responsable de ses fautes, puisqu’il continue à souiller son âme par le péché, même après l’absolution ; 4° de renoncer aux traditions des Pères, au culte des saints et aux décisions des conciles ; 5° d’interpréter à leur guise et sans tenir compte de la tradition, les livres du Nouveau Testament ; 6° de qualifier les saintes images par l'épithète malséante d’idoles ; 7° de nier l’utilité des églises en pierre et en bois, sous le prétexte que la véritable Église n’est que l’assemblée spirituelle des fidèles ; 8° de s’insurger contre la légitimité des biens acquis parles monastères ; 9° de stigmatiser l’ignorance et l’avarice du clergé de leur temps, et de le discréditer en présence des fidèles ; 10° de regarder la liturgie de l’Eglise orthodoxe comme un corps sans âme, comme un recueil de formules purement extérieures, et partant dénuées de toute influence sur la vie surnaturelle.

Prirent part à ce concile : Macaire, métropolite de Moscou, Nicanor, archevêque de Rostov, et les évêques Athanase de Souzdal, Cassien de Riazan, Acace de Tuer, Théodore de Colomène, Sabbas de S ; trski. Le tsar, des boyards en grand nombre et une foule de prêtres intervinrent aux débats. Les adhérents de Bachkine qui avaient tout à craindre de la cruauté d’Ivan IV, essayèrent de nier tout ce qu’on leur reprochait. Les uns soutinrent qu’ils n’avaient jamais renoncé au culte des saintes images. Ceux-ci on les remit en liberté', après qu’ils eurent prêté serment de ne pas renouveler l’hérésie des iconoclastes. Les autres affirmèrent hardiment que les points d’accusation portés contre eux étaient absolument faux. L'évêque de Biazan prit la défense des accusés, mais il se heurta au mauvais vouloir des membres du synode qui ne surent pardonner à Bachkine ses justes critiques sur l'état déplorable du Clergé russe. Bachkine et quelques-uns de ses adhé rents furent envoyés en exil. Renfermé dans un monastère (Volokolokamsky), Bachkine mourut le 22 décembre 1554.

De lui date l’infiltration du protestantisme dans la théologie russe. Il marque donc une étape importante dans le développement de la pensée théologique russe, et nous nous étonnons que la récente Encyclopédie orthodoxe de M. Lopoukhine n’ait pas consacré au fameux hérétique une courte notice.

Dobroklonski, op. cit., t. I, p. 270-271 ; Znamenski, Manuel d’histoire de l'Église russe, Saint-Pétersbourg, 1890, p. 133-184 ; Macaire, Histoire de l'Église russe (période de la division des deux métropoles), Saint-Pétersbourg, 1870, t. VI, p. 248-253 ; Philaréte, Geschichte der Kirche Russlands, trad. Blumentlial, Francfort, 1872, p. 296-298 ; Soloviev, Histoire de la Russie, t. vii, col. 124-131 ; Les conciles tenus à Moscou contre les hérétiques du xvie siècle, Moscou, 1847, paru d’abord dans les Lectures (Tchténia) de la société d’histoire de Moscou, 1847, t. m ; Emélianov, Sur l’origine de l’enseignement de Bachkine et de Kosoï en Russie, Travaux (Troudy) de l’Académie ecclésiastique de Kiev, 1862, n. 5, p. 31-78 ; Notices sur les conciles tenus dans l'Église russe depuis le.^jusqu’au xvr siècle, Lecture ch retienne (Khristianskoe 7°c/iîém’e), 1852, t. I, p. 301-353 ; t. il, p. 529570 ; Golokhwastov et Léonidas, Sylvestre, prêtre de l'église de l’Annonciation à Moscou, et sur l’hérésie de Bachkine, Lectures de ta Société d’histoire et d’antiquité russe, 1874. n. 1 ; Kostomarov, Histoire de la Russie, ou biograpliies de ses principaux auteurs, Saint-Pétersbourg, 1874, t. Il ; Id., Rapport sur les esprits forts (volnodoumtzy) de la Grande Russie au xvr siècle, Recueil de monographies historiques, Saint-Pétersbourg, 1863, t. i ; Andréiev, Le raskol et son importance dans l’histoire du peuple russe, Saint-Pétersbourg, 1870, p. 21-22 ; A. Palmieri, L’ancienne et la nouvelle théologie russe, Paris, 1901, p. 15-16.

A. Palmieri. BACKER (Augustin de), jésuite belge, né à Anvers* le 18 juillet 1809, novice le 26 juin 1835, consacra presque toute sa vie aux recherches bibliographiques, et mourut à Liège, le 1 er décembre 1873. Il n’est connu par aucun ouvrage de théologie ; il a néanmoins un titre à être mentionné ici ; c’est à lui, en effet, qu’on doit la connaissance exacte de tout ce qu’ont écrit et publié les théologiens de la Compagnie de Jésus. De 1853 à 1861, le P. de Backer fit paraître, en sept séries, ses premières recherches sous ce titre : Bibliothèque des écrivains de la Compagnie de Jésus ou Notices bibliographiques i° de tous les ouvrages publiés par les membres de la Compagnie de Jésus, etc., Liège. Ce grand ouvrage qui n'était qu’un essai, reçut un favorable accueil de la part des savants. L’auteur commença la publication d’une seconde édition, qui parut en trois volumes dans le format in-fol., à Liège, 1869, 1872, 1876. Son frère Aloys fut son collaborateur assidu et dévoué pour la préparation et l’exécution de ces deux éditions ; il termina la deuxième après la mort d’Augustin. Un jésuite français, le P. Sommervogel, prêta aussi son concours aux PP. de Backer pour la deuxième édition, et, après leur mort, il en entreprit une troisième en neuf volumes, gr. in-8°, imprimée à Bruxelles de 1890 à 1900.

De Hacker et Sommervogel, Bibl. de la C'° de Jésus, t. i, col. 753-755.

C. Sommervogel.

    1. BACON Roger##


BACON Roger. — I. Vie. IL Écrits. III. Bacon et les sciences. IV. Bacon et la correction de la Vulgate.. V. Bacon et la scolastique.

I. Vie.

Bacon naquit près d’Ilchester, dans le comté de Sommerset. Ou admet généralement que ce fut vers 1210 ou 1215. Cf. Opus majus, part. I, c. x ; Opus tertium, c. xx ; V. Cousin, Journal des savants, 1843, p. 130, 226 ; E. Charles, R. Bacon, sa vie, ses œuvres, su doctrine, Paris, 1861, p. 4, 5.

Issu de parents riches et puissants, qui dans la suite prirent fait et cause pour le roi d’Angleterre contre ses barons révoltés, Op. terl., c. iii, il voulut, dès son jeune âge, acquérir une culture d’esprit en rapport avec son rang. A peine eut-il la connaissance des premiers élé-