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BEATITUDE


donné un corps aux traités scolastiques. rectifie les données platoniciennes, qui d’ailleurs, en harmonie avec les données révélées, ont largement contribué à élargir le cadre aristotélicien.

Etliic Nie, 1. I, X, c. vi-vm ; Metaph., 1. XI, c. x ; 1. XIII, c. v ; Brucker, op. cit.. p. 830-840 ; Ritter, op. cit., t. iii, p. 203 sq. ; Zeller, op. cit., t. ii, part. II, Aristoteles, p. 607-672 ; UbervegsHeinze, op. cit., p. 236-250 ; card. Gonzalez, op. cit., t. I, p. 315 sq. ; Brocbard et Sertillange ?, La morale ancienne et la morale moderne, dans la Revue philos., t. m (1901), p. 1, 280 ; Sertil. Les bases de la morale et les récentes discussions, dans la Ben de »lnfus., t. n. n. 5, 0 ; t. iii, n. 1, 2 ; Piat, Aristote, Paris, 1903, 1. IV, c. i, p. 287 sq.

Cicéron.

Il mérite une mention spéciale à cause

de la grande influence qu’il a exercée sur saint Augustin. Malheureusement le texte de VHortensius qui devait contenir des renseignements sur notre sujet (cf. Confessions, 1. X, c. iv) est perdu. Des cinq livres De finibus bonorum et malorum, et du Ve livre des Tusculancs, il ressort que la doctrine cicéronienne est une doctrine purement pratique. Elle établit une équation entre le bonheur et la vie honnête, pratique de la vertu morale. Grâce à la vertu l’homme n’a besoin de rien pour être heureux, ni des biens du corps, ni des biens extérieurs (contre Aristote et les épicuriens). La vertu se suffit à elle-même. Elle abandonne aux animaux les plaisirs des sens. Elle supprime les perturbations de l'àme (passions). Elle ne craint pas la douleur. La tendance générale est celle de la doctrine stoïcienne. Elle s’en distingue cependant sur plusieurs points. Sa signification dans l’histoire de la béatitude est celle d’un résumé éclectique et critique de tous les placita des doctrines de morale pratique antérieures. C’est par là surtout qu’elle a rendu service aux théologiens, spécialement à saint Augustin. Cf. Table des œuvres de saint Augustin au mot Cicéron.

Ciceronis opéra phil.. édit. V. Leclerc-Bouillet, 1829-1830, t. ii, m.

4 » Pltilon le Juif. — Sa doctrine représente, du point de vue judaïque, la première adaptation des notions platoniciennes aux données de l’Ancien Testament. D’où le contraste qu’elle olfre, par sa teneur théologique, avec les doctrines antérieures. La félicité consiste, selon PhiIon, dans la réunion des biens (définition reprise par Boèce et saint Thomas). IIsp toû to xe 'P ov > p. 156. Elle est le fruit de la vertu, lbid., p. 166. Elle consiste dans l’usage de la vertu parfaite dans la vie parfaite. Ibid. Le souverain bien, qui réunit tous les biens, n’est autre chose que Dieu, llepi ipiXavÔpioTrta :, p. 717. Les richesses ne sont qu’un moyen du bonheur : la fin du bonheur en ce monde c’est de se souvenir du Dieu qui donne la force pour agir, Ilepî ys^pYia ;, p. 212 ; c’est la connaissance du créateur. Ilspi toû tô -/eîpov, p. 171. Bienheureux celui auquel il est donné de consacrer la plus grande partie de sa vie (car toute sa vie ce serait trop difficile) à ce qu’il y a de meilleur et de plus divin, llepi twv |ieTovo|j.aïo| J.évu>v, P- 1073.

Philon, Opéra omnia. Francfort, 1091 ; E. Herriot, PlU’nn le Juif, Paris, 1898, p. 289-302.

Plotin.

1. Sa doctrine. — Il complète et corrige

par les dires de Platon et des stoïciens les doctrines d’Aristote. Le livre IVe de la 1° Ennéade, qui traite du bonheur, en est un exemple : a) N’est capable de béatitude que la nature rationnelle : les animaux n’ont pas le bonheur proprement dit. — b)Nalure. — La béatitude ne consiste pas dans la bonne vie vulgaire, mais dans la bonne vie complète, privilège de l'être complet, c’està-dire de l'être rationnel. La vie parfaite, véritable, réelle, est la vie intellectuelle. Le bonheur consiste à tourner ses regards vers le bien seul, à s’efforcer de lui devenir semblable et de mener muvie analogue à la sienne. L’homme ne possède pas le bonheur comme

une chose étrangère à soi ; il l’a toujours, au moins en puissance, du seul fait qu’il est rationnel. — c) Contre Aristote. — L’homme heureux par l’union avec ce qu’il y a de meilleur n’a besoin d’aucun bien inférieur. Sa tendance principale est rassasiée et s’arrête. Les choses extérieures ne contribuent pas à son bonheur, mais à son existence. La béatitude ne consiste pas à cumuler les biens et le Bien. Il est convenable de rechercher les biens du corps, la santé par exemple, mais ce n’est pas le but de l'âme. Le corps est une lyre que l’on doit dédaigner lorsqu’elle est hors d’usage : on peut chanter sans elle. Elle sert néanmoins tant qu’elle existe. Le bonheur ne dépend ni des biens inférieurs, ni du malheur contingent, fût-on malheureux comme Priam, ni de la santé, ni de la durée (le Bien ayant pour mesure l'éternité), /" Enn., 1. V, ni du souvenir du passé, ni du nombre des belles actions ; mais uniquement de la disposition de l'âme, unie au Bien, source des opérations.

— d) Vie future. — Après la mort, l'âme possédera d’autant mieux le bien qu’elle exercera ses facultés sans le corps. Le rang obtenu dans la béatitude parfaite dépend du progrès actuel dans la vertu où l'âme se rencontrera en quittant le corps. — e) L’acte béatificaleur.

— Il est décrit à plusieurs reprises dans la VIe Ennéade, 1. VII. Il dépasse la région de l’intelligence et du beau, pour se fixer immédiatement dans le bien. Il n’est pas cependant le plaisir du bien, sa jouissance. C’est un tact, r, toû àyaôoO àrcaçr, (n. 36). « Quand l'âme obtient ce bonheur et que Dieu vient à elle, ou plutôt, qu’il manifeste sa présence, parce que l'âme s’est détachée des autres choses, qu’elle s’est embellie, qu’elle est devenue semblable à lui par les moyens connus de ceux-là seuls qui sont initiés, elle le voit tout à coup apparaître en elle ; plus d’intervalle, plus de dualité, tous deux ne font qu’un ; impossible de distinguer l'âme d’avec Dieu, tant qu’elle jouit de sa présence. » VIe Enn., 1. VII, n. 31, trad. Douillet, Paris, 1861, t. iii, p. 472 sq.

Les Ennéades dePlotin, trad. Bouillet ; Ubervegs-IIeinze, op. cit., t. i, p. 330-339 ; Gonzalez, op. cit., t. i, p. 010.

2. Importance île Plotin.

Il est une source avouée par saint Augustin, qui voit par lui certaines doctrines de Platon, spécialement celles relatives à l’intuition immédiate de Dieu. Cf. Œuvres de saint Augustin, tables, au mot Plotin. Voir t. i, col. 2325, 2330. On peut attribuer à l’intermédiaire du pseudo-Denys de nombreuses concordances entre Plotin et les théologiens. Par saint Augustin et le pseudo-Denys, il aurait ainsi influé sur les scolastiques, saint Thomas en particulier. M. Bouillet, dans sa traduction des Ennéades, a établi de nombreux rapprochements entre la doctrine de Plotin sur la béatitude et celles d’Aristote, des stoïciens, t. i, de saint Basile et du théologien Thomassin, t. m.

Proclus.

La théologie élémentaire de Proclus,

dont la paraphrase arabe a été traduite en latin sous le nom de De causis, a exercé une influence du même genre. La teneur en est purement néoplatonicienne. Les hypostases supprimées par le pseudo-Denys y subsistent. Sauf cela, les idées générales de conspiration de tout être vers le Bien et de communication du Bien à tous les êtres par les intermédiaires hiérarchiques y sont identiques. Et la doctrine platonicienne de la béatitude est par conséquent implicite dans cette synthèse, comme dans la synthèse dyonisienne. Saint Thomas s’inspire directement du De causis qu’il cite dans son traité.

Liber de emisis, dans les Opéra S. Thotnm, édit. l’arme, t. xxi ; Uberwegs-Heinze, Grundriss, t. t, p. 856.

III. Données sciupturaires.

l’Ancien Testament. — La question de la béatitude est nettement abordée sous son aspecl eudémoniste dans les livres sapientiaui. On peni considérer le pléonasme : Beatus es </ bene tibi eril, Ps. CXXVII, 2, comme formulant l’idée courante du