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BÉNÉDICTION

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permises par le saint-siège. Il y a des bénédictions non réservées approuvées pour certains diocèses, des bénédictions réservées aux évêques, mais généralement déléguées aux missionnaires, des bénédictions propres à plusieurs ordres religieux, pour lesquelles les prêtres séculiers ont besoin d’une délégation spéciale, enlin des bénédictions de diverse nature, très récemment autorisées par Léon XIII et la S. C. des Rites.

3° Sous le rapport du rite, les bénédictions sont dites réelles, lorsqu’elles comprennent l’onction faite avec le saint chrême, ou verbales, lorsqu’elles ne comportent que des paroles ou prières ; elles sont solennelles ou simples, selon qu’elles sont données avec ou sans apparat. Chaque bénédiction a son rite propre. On trouve au rituel romain, tit. viii, c. I, les règles générales nui concernent les bénédictions données en dehors de la messe.

IV. Effets et mode d’efficacité. — 1° Effets. -Comme les bénédictions de l’Église sont un des principaux sacramentaux, nous pourrions dire d’un mot qu’elles produisent les effets ordinaires des sacramentaux. Voir Sacramental. Toutefois, elles ne produisent pas toutes les mêmes effets, et comme leur efficacité vient principalement de la prière de l’Église, il faut considérer les formules elles-mêmes des bénédictions pour savoir quels heureux effets l’Église attend de chacune d’elles. Or, dans quelques formules, telles que celle de la bénédiction des vases destinés à contenir les saintes huiles, il n’y a pas d’effet spécial demandé et la bénédiction n’a d’autre but que de destiner ces vases exclusivement à la conservation des saintes huiles par respect pour ces choses saintes. Mais d’autres formules, telles que celle de l’eau bénite, demandent à Dieu de communiquer à l’objet bénit virtutem benedictionis ou gratiam benedictionis, etc. Or, les théologiens se sont demandé si les objets bénits avaient en eux, en raison de leur bénédiction, une vertu spéciale inhérente, une force spirituelle propre. Saint Thomas, Sum. llieol., III", q. lxxxiii, a. 3, ad3um, a déclaré que : Ecclesia et altare et alia hujusmodi inanimata consecrantur, non quia s171t gratise susceptiva, sed quia ex consecratione adipiscuntur quamdam spiritualem virtutem, per quant apta redduntur divino cultui, ut scilicel homines devotionem quamdam exinde percipiant, ut sint paratiores addivina, nisi hoc propler irreverenliam impediatur. Et le saint docteur en fournit plusieurs preuves. Les théologiens postérieurs ont généralement admis cette doctrine, au moins pour les bénédictions dites consécration et constitutives. Mais ils n’ont pas entendu cette vertu spirituelle d’une vertu inhérente à l’objet consacré. Ils n’y ont reconnu qu’une virtus transiens. Suarez, In III* iii, disp. XV, sect. iv, n. 7, Opéra omnia, Paris, 1877, t. xx, p. 291-292, a expliqué cette vertu divine des lieux consacrés et bénits en disant : propler orationes Ecclesise Deuni ibi spéciale aliquod auxilium prsebere. Il ajoute, en effet, quando hsec sacramentalia insuabenedictione specialiter ordinantur, per Ecclesiæ orationem, ad tales effcclus, lune per modum impetrationis specialiter conferri a Deo laies e/fectus adhibitis hujusmodi sacramentalibus ; ut, verbi gratia, credendum est, in templo consecrato ralione consecralionis Deuni specialius assistere ad exaudiendas fidelium orationes, vel eoruni animos ad devotionem excilandos, et sic de aiiis. Cajetan, In III* iii, q. lxxxiii, a. 3, dans Opcra D. Thomæ, Anvers, 1612, t. XII, p. 277, avait interprété un peu différemment la pensée de saint Thomas. Il avait « lit : quodper hujusmodi consecraiiones adipiscuntur res consecratæ spiritualem virtutem inchoative et in hoc ipso sorliuntur divinam præscntiam speciali modo. Consecraiiones siquidem eeclesiaslicæ. non sunt humana lantum opéra, sed sunt efficaces ex Christi tacerdotio, a quo sicut per scipsum efficaciam habent sacramentales operaliones, quia ab ipso immédiate sunt inslituta sacrunwnla, itaparlicipatum inministris

suis efficaciam prsebet consecrationibus qux ab ipsis fiunt, ilaquod ex Christi sacerdutio diffuso, participalo in nobis reverentiam et devotionem, sicut aquæ ex tætu carnis Christi redditse sunt habiles ad baptismum et hujusmodi habilitas vocatur spiritualis virtus inchoative. Par suite, Dieu devient présent aux choses consacrées d’une façon spéciale, sicut novo instrumenta ad excitandam reverentiam et devotionem. circa divinum cultum. Cette vertu spirituelle s’exerce, cum divina hujusmodi assistentia actualilerulitur re consecrala ad excitandum devotionem, reverentiam vel alinuem alium effeclum ad quem res consecrala est faciendum. Quelques théologiens étendent cette doctrine, même aux objets non consacrés, mais simplement bénits, tels qu’une médaille. Par le fait de leur consécration ou de leur bénédiction, ces objets n’ont aucune nouvelle qualité inhérente ; ils ont avec Dieu une relation réelle en vertu de laquelle ils amènent Dieu à produire des effets spirituels en ceux qui se servent d’eux. Cette relation est permanente, puisqu’il reste toujours vrai qu’ils ont été bénits ou consacrés. Il y a donc dans les objets bénits une vertu indépendante du mérite du ministre et de celui qui s’en sert. Mais comme elle résulte des prières de l’Église et de la consécration de l’objet, elle ne produit pas physiquement son effet. Les bénédictions ne sont donc pas des causes efficientes proprement dites ; ce sont seulement des causes occasionnelles, en vertu desquelles Dieu excite dans l’âme de pieux mouvements.

Il y a dès lors lieu de s’étonner des sarcasmes lancés contre l’Église catholique au sujet des bénédictions et des consécrations par un écrivain, ordinairement mieux renseigné, Ilarnack, Lehrbuch der Dogmengescliichtc, 1890, t. iii, p. 604, note. Dans notre doctrine, il n’y a rien qui soit contraire à la religion en esprit et en vérité, et l’Eglise romaine n’a pas réintroduit dans le christianisme le pharisaismeet le rabbinisme, repoussés par Jésus-Christ.

Mode d’efficacité.

Les bénédictions n’opèrent

donc pas, comme les sacrements, ex opère operato ; malgré le sentiment contraire de quelques théologiens, elles agissent seulement ex opère operantis, per modum impetrationis Ecclesiæ. Toutefois, il ne faudrait pas les considérer comme de simples prières, comme des vœux, des souhaits, des invocations des secours divins. L’impétration est sans doute le caractère dominant de la bénédiction. Mais ce n’est pas une simple demande, telle que les fidèles en font en leur nom particulier et qui peut ne pas être exaucée. C’est une impétration faite au nom de l’Eglise, qui s’adresse à Dieu avec confiance. La demande est en quelque sorte impérative, parce que l’Église a reçu de Dieu le droit d’intercéder pour les fidèles et de leur appliquer par mode d’intercession les moyens de salut. Dieu, à cause de la prière de l’Église, accordera au fidèle pour qui elle intercède la grâce demandée, si d’ailleurs il est capable et digne de la recevoir. Toutelois, l’effet n’est pas certain et n’est pas produit infailliblement, parce que Dieu n’a pas promis expressément d’exaucer toujours la prière de son Eglise. Dans une étude savante et habilement conduite, le P. G. Arendt s’est efforcé de démontrer que les sacramentaux en général et les bénédictions ecclésiastiques en particulier avaient, de par leur institution, le droit d’exiger de Dieu la distribution des grâces suffisantes, el seulement la valeur déprécative pour demander les grâces efficaces. Il pense que Dieu, en accordant à l’Eglise le pouvoir de bénir, a promis absolument d’accorder â sa prière les secours suffisants, el il affirme que l’Eglise peut les exiger de Dieu au moins d’une façon générale, car il reconnaît qu’il est impossible de déterminer in specie et in individuo quelles sont les grâces suffisantes et quelles sont celles que l’Kgli-e, par ses bénédictions, exige que Dieu donne. Cette opinion, qu’il serait trop