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BENEDICTION NUPTIALE


matrimonium conjungo, in nomine Patris jji et Filii et Spiritus Sancti. Amen. Ou bien qu’il se serve d’autres paroles selon le rite reçu de chaque province. Ensuite qu’il les asperge avec l’eau bénite. »

Ce n’est qu’au moyen âge qu’on voit paraître la formule Ego vas conjungo, dans quelques liturgies. D’après Martène, loc. cit., c. IX, a. 3, n. 6, p. 608, elle n’est guère antérieure au xve siècle, puisqu’on ne la trouve ni dans |i’rituel île l’abbaye du liée, ni dans celui de Bourges, ni dans le missel de Paris, ni dans les pontificaux de Sens, de Lyon, d’Amiens, qui sont à peu près de l’an 1 iOO. Parmi les quinze documents liturgiques antérieurs au xvie siècle que publie cet auteur, loc. cit., p. 614-G 61, un seul renferme la formule en question, et c’est le plus récent : ordo xv, rituel de Milan, loc. cit., p. 619. Les théologiens qui ont considéré la bénédiction Ego vos conjungo comme la forme du sacrement de mariage, conviennent eux-mêmes que l’emploi de ces paroles ne remonte pas à une date très éloignée. L’un d’eux, Gibert, qui est du xvin 5 siècle, écrit : « La forme Ego vos conjungo a 400 ans d’ancienneté ; elle a été substituée à la forme Deus Abraham… conjungat vos, laquelle de forme principale est devenue ensuite forme accidentelle. » Tradition de l’Église sur le sacrement de mariage, Paris, 1725, t. i, p. 206.

Les autres formules auxquelles font allusion le concile de Trente et le rituel romain, assez nombreuses autrefois, mais presque parlout remplacées aujourd’hui par la formule romaine, présentent des différences appréciables dans les termes sinon dans le sens. Nous relevons les suivantes dans l’ouvrage cité de Martène. Missel de Rennes, XIe siècle : Deus Abraham, Deus Isaac, Deus Jacob, ipse vos conjungat, implcatq ne benedictioncm suam in vobis. Ordo II, loc. cit., p. 617. — Pontifical d’Arles, xiiie siècle : Deus Abraham…, ipse sit vobiscum, ipse vos conjungat, impleatque benedictionem suam in vobis. Ordo v, loc. cit., p. 625. — Rituel de Châlons, XVe siècle : Benedical vos Pater et Filius et Spiritus Sanclus qui trinus in numéro et unus in Deitate vivit et régnai per omnia sæcula sœculorum. Ordo xi, loc. cit., p. 039. — Manuel à l’usage du diocèse de Reims, xve siècle : Desponso vos in facie Ecclesise. Ordo xiii, loc. cit., p. 645. — Les théologiens de Wurzbourg citent les rituels de Constance et de Wurzbourg en usage de leur temps, xviiie siècle. Rituel de Constance : Matrimonium per vos contractum secundum oi’dinem mains Ecclesise, ego auctoritate qua in hac parte fungor, ratifiée-, confirmo, et benedico, in nomine Patris, etc. De Wurzbourg : Idco matrimonium per vos contractum confirmo, rali/ico et benedico. Theologia dogm., Paris, 1854, t. v, p. 492. Perrone de son côté mentionne les formules usitées encore dans quelques diocèses d’Allemagne à l’époque où il écrivait (1860). A Wurzbourg, celli’que nous venons de citer. A Eichstâtt : Matrimonium inter vos contractum Deus confirmet et ego in facie Dci illud solemnizo. A Munich et à Frisingue : Matrimonium in facie Dei inter vos contractum Deus confirmet, et auctoritate Ecclesioe Dei, ego illud approbo, perficio atque solemnizo. In nomine. etc. De matrimonio christiano, Liège, 1861, t. i, p. 151.

Une conclusion se dégage de ces citations. Puisque toutes ces formules, malgré leurs différences, sont admises comme équivalentes à la forme ordinaire Ego vos conjungo, le sens de celle-ci n’est pas : « Je constitue le lien du mariage entre vous, » mais : « Je vous déclare unis au nom de Dieu et à la face de la sainte Église. »

II. USAGE.

Nous ne discutons pas ici l’opinion d’après laquelle la bénédiction qui nous occupe serait la forme essentielle du sacrement de mariage. Cette maii ii n de penser, qui n’eut crédit que dans îles milieux de tendances gallicanes ou jansénistes, est aujourd’hui complètement abandonnée et d’ailleurs insoutenable. Voir Mariage. Mais pour n’être pas essentielle, la béné diction Ego vos conjungo n’est pas cependant d’un usage facultatif. Elle est obligatoire en raison : 1° de la pratique universelle et constante de l’Église ; 2° des prescriptions positives des papes et des conciles, particulièrement du concile de Trente, loc. cit. ; 3° de la rubrique du rituel romain, Inc. cit. Donc le prêtre qui l’omettrait de propos délibéré commettrait une faute. Quelle serait la gravité de cette faute ? Saint Liguori, Theol. mor., 1. VI, n. 1094, Paris, 1883, t. iii, p. 816, cite des auteurs d’après lesquels il y aurait seulement péché véniel. Mais le plus grand nombre sont d’avis qu’il y aurait péché mortel, et le saint docteur considère cette seconde opinion comme plus probable, « parce qu’il semble bien, dit-il, qu’il s’agit là d’une obligation en matière grave. » — Le prêtre qui doit prononcer les paroles de la bénédiction est le même qui reçoit le consentement des époux ; c’est-à-dire le propre curé ou son délégué. Concile de Trente et rituel, loc. cit.

Le prêtre doit-il prononcer ou non les paroles Ego vos conjungo, dans les mariages mixtes, contractés entre catholiques et hérétiques’? La S. C. du Saint-Oflicea répondu à cette question, le 26 novembre 1835 : « Le prêtre assistant à un mariage mixte doit s’abstenir de prononcer ces paroles. » Gasparri, Tract, can. de matrimonio, Paris, 1891, t. i, p. 306. Une réponse identique avait été donnée déjà par le Saint-Office le 1 er août 1821. Cf. Collectanea S. C. de Propaganda fide, n. 1543. L’instruction Etsi sanctissimus adressée par la secrétairerie d’Etat, au nom du pape Pie IX, à tous les archevêques et évêques du monde catholique, sur l’empêchement de religion mixte, renouvelle cette prohibition : Insuper in tribuendis hujusmodi dispensationibus prseter enuntiatas cautiones… adjectse quoque fuerunt conditiones, ut hæc mixta conjugia extra ecclesiam et absque parochi benedictione ulloque alio ecclesiastico rilu celebrari debeant. Acla sanctæ sedis, t. vi, p. 456.

La bénédiction nuptiale, qui se trouve au rituel, doit être donnée aux conjoints catholiques, même en temps prohibé, dummodo non ads-it consuetudo non contrahendi matrimonium, etiam sine solemnitate, tempore vetito. S. C. de la Propagande, 21 juillet 1844, Colleclanea, n. 1551, ad l, , iii, 2° m. Une décision de la S. C. des Rites, en date du 14 août 1858, exige, dans ce cas, l’autorisation de l’évêque, lbid., n. 1556, ad 3’"". Si la bénédiction du rituel est suppléée aux conjoints qui ont auparavant validement contracté mariage, le prêtre doit prononcer la formule : Ego vos conjungo, sans faire renouveler le consentement, lbid., n. 1551, ad 4um.

III. Bénédiction solennelle.

I. forme. — On lit nu missel romain dans la messe pro sponso et sponsa : « Quand le prêtre a dit Pater noster et avant qu’il ne dise Libéra nos, queesumus, Domine, il se tient debout au coin de l’épître, tourné vers l’époux et l’épouse qui sont agenouillés devant l’autel, et il dit sur eux les oraisons suivantes : Orcmus. Propitiare, Domine, supplicationibus nostns… Oremus. Drus qui potestate rirtiitis tuas… Per eumdem Donùnum. Après quoi le prêtre, retourné vers le milieu de l’autel, dit : Libéra nos. » Plus loin : « Après avoir dit Benedicamus Domino ou ltemissa est si la messe du jour le comporte, le prêtre avant de bénir le peuple se retourne vers les époux et dit : Deus Abraham… Puis il les asperge avec l’eau bénite. »

Cette bénédiction ne doitpasétre séparée de la messe. « Si les noces doivent être bénites, dit le rituel romain, le curé célébrera la messe pro sponso et sponsa, comme elle est au missel romain, en observant toutes les prescriptions qui s’y trouvent. » (’.est d’ailleurs ce que la s. C. des Rites a répondu plusieurs luis, particulièrement le 31 aoûl 1839 à l’évêque de Montpellier, et le 23 juin 1853 à l’évêque de Limbourg. Voici le texte de la seconde réponse : Benedictio, ji<.n<i rubricas, non <-si impertienda nisi in missu. Décréta auth. S. C. P., n. 2797, 3016, Rome, 1898, t. n. p. 288, 381.