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BERNARD (SAINT)

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voir les cœurs. Ce n’est pas un léger dommage pour la piété, que d’être détourné, par la légèreté du chant, du prolit qui doit être attaché au sens des paroles, et de s’appliquer davantage à combiner des sons qu’à insinuer des vertus. » Epist., cccxcviii, n. 2, P. L., t. ci. xxxii, col. 610. Les leçons de l’office turent empruntées aux panégyriques de saint Victor, que composa l’abbé de Clairvaux, P. L., t. CLXXXIII, col. 371-376. Il faut y joindre douze répons, vingt-sept antiennes et trois hymnes, dont le texte seul nous est parvenu, sans la notation. Selon toute vraisemblance, Bernard ne fit qu’adapter à son texte des phrases mélodiques déjà connues. Ses vers sont loin de valoir sa prose. Il n’a tenu compte que du nombre des syllabes, sans égard pour la quantité prosodique. « Quant au chant, écrit-il lui-même, j’ai composé, ces hymnes, en négligeant la mesure, pour ne m’occuper que du sens. » Quod ad cantum speclat, hymnum capiposui, metri negligens, lit sensui non deessem. Epis/., CCCXCVIII, n. 3, loc. cit.

Tractatus (Episl., lxxvii, ad Hugoneni de S. Vietore) de baplismo aliisque quæstionibus ah ipso proposilis. P. L., t. clxxxii, col. 1031 sq. — Hugues de Saint-Victor, si célèbre par ses ouvrages théologiques, avait questionné Bernard au sujet de divers problèmes posés par un théologien dont il ne dévoile pas le nom. L’anonyme enseignait : 1. que le précepte du baptême était devenu obligatoire à partir du jour où Notre-Seigneur avait dit à Nicodème : Nisi quis renatus fwrit, etc., , Toa., iii, 5 ; 2. que personne ne pouvait être sauvé sans le baptême ou, à son défaut, sans le martyre ; 3. que les Pères de l’Ancien Testament avaient eu une connaissance de l’Incarnation, aussi claire que les chrétiens ; 4. qu’il n’y avait pas de péché d’ignorance ; 5. que Bernard s’était trompé lorsqu’il avait écrit, dans une de ses homélies Super Missus est, que le mystère de l’incarnation avait été caché aux anges avant le jour de l’Annonciation. Bernard réfute toutes ces théories. Nous verrons ce qu’il dit du baptême et de la connaissance des anges, quand nous étudierons sa doctrine sur les sacrements et sur les anges. Les théories sur le péché d’ignorance et sur la science des Pères de l’Ancien Testament ont aidé à soulever le voile de l’anonyme. Deutsch, Peler Abeilard, Beilage, p. 466-472, nous parait avoir assez bien établi que les erreurs signalées par Hugues de Saint-Victor et réfutées par saint Bernard se trouvent dans les œuvres d’Ahélard. Il faut noter les expressions dont se sert l’abbé de Clairvaux pour stigmatiser le novateur, c. ii, 7 ; iii, 11 ; iv, 10. Si cette conjecture est juste, le traité a dû être composé entre 1136 et lliO.

10° Sermo seu liber de conversione ad clericos. P. L., t. ci. xxxii, col. 834 sq. — bans un de ses voyages à Paris, en 1140, Bernard fut invité par l’évêque, Etienne de Senlis, à prêcher devant la jeunesse des écoles. Ce sermon a été’conservé ; revu et corrigé, il est devenu un véritable traité sur la conversion. La péroraison surtout offre un intérêt historique. L’abbé de Clairvaux fait de l’immoralité des clercs une peinture extrêmement vive. Lt les professeurs, mêlés à la foule des étudiants, ne sont guère mieux traités que leurs élèves : « Malheur à vous qui tenez les clefs non seulement de la science, mais encore de l’autorité ! etc. »

11° Tractatus (Epist., exc) contra quædam capitula errorum Abœlardi (adressé à Innocent II en 1140), auquel il laut joindre les Capitula hæresum Pétri Abœlardi. P. L., t. clxxxii, col. 1049 sq. Nous aurons l’occasion d’étudier plus loin ces ouvrages à propos de la lutte de saint Bernard avec Abélard.

12° Liber de præcepto et dispensatione. P. L., t. clxxxii, col. 860 sq. Ouvrage composé avant 1143. — Bernard avait été consulté par les moines de Saint-Pierre de Chartres, à l’insu de leur abbé, sur divers points de règle, notamment sur la gravité des fautes commises contre la règle bénédictine. Il envoie sa réponse à Boger, abbé de Colombe, du même diocèse, pour que celui-ci la transmette aux pétitionnaires, en passant par les mains de leur abbé. L’un des points sur lesquels porte son examen, c’est la gravité d’une faute contre le silence. Si la transgression n’est que l’effet de l’oubli et de la distraction, elle constitue à peine une faute, vi.r peccatum repulatur. Si elle est commise en mépris de la règle ou du supérieur, elle peut constituer un péché mortel. Mais il laut bien remarquer que la négligence, qui vient de la langueur et de l’inertie, n’est pas mépris, lequel procède de l’orgueil et d’une volonté’délibérée. Mabillon, Admonitio, loc. cit., col. 859, montre que cette doctrine de l’abbé de Clairvaux. est, en tout point, conforme à celle de saint Thomas, Svm. theol., II a II æ, q. lxxxvi, a. 9. L’ouvrage forme un admirable traité d’obéissance monastique et fait valoir les avantages et les mérites d’une vie soumise à la règle. Bernard admet une hiérarchie entre les ordres religieux. Leur dignité se mesure sur le degré de perfection morale et la somme de sacrifices que chacun d’eux représente ; les ordres les plus sévères l’emportent sur les ordres d’une observance plus large. Les chartreux, par exemple, occupent, au regard de l’Église, un rang plus élevé que les chanoines réguliers ; et dans le seul ordre bénédictin l’abbé de Clairvaux n’hésite pas à attribuer la prééminence aux cisterciens, non par un vain sentiment d’amour-propre ou par esprit de corps, mais parce que ces religieux observent la règle plus strictement et plus littéralement que ne le font les clunistes et les autres moines noirs : Districtionctn litteratoriam profitentur cister denses, c. xvi, n. 47. De cette théorie, en apparence frivole et bonne à entretenir dans l’Eglise l’esprit de coterie et une inégalité contraire à l’Evangile, découlent au contraire des conséquences pratiques fort justes et appropriées aux besoins de l’àme qui tend à la perfection. Si cette âme n’a jamais le droit d’aspirer à descendre, il ne lui est pas toujours interdit d’aspirer à monter. De là pour elle la possibilité de commuer ses vœux. Bernard admet en principe, comme légitime et agréable à Dieu, le passage des prémontrés et des moines noirs dans l’ordre cistercien. En pareil cas, « quitter son monastère, c’est encore une manière de déserter le siècle » (cf. Epist., xxxiv, n. 1). cela forme en quelque sorte une seconde conversion. A lire, sur ce point, Le prœcepto et dispensalione, c. xvi en entier. Mais tout changement qui serait l’effet d’un pur caprice est à réprouver. Pour qu’un religieux puisse sans péché abandonner sa résidence et rompre son vœu de stabilité, il faut qu’il montre des signes incontestables de vocation extraordinaire et soit muni, s’il est possible, du consentement de son supérieur. La même liberté s’étend au profès qui se verrait dans l’impossibilité morale de remplir dans son monastère les engagements qu’il a pris devant Dieu.

13° Liber de vitae et rebus gestis sancti Malachiæ, Hiberniæ episcopi. P. L., t. clxxxii, col. 1073. — Malachie, archevêque d’Armagh, en Irlande, mourut à Clairvaux, en 1 148. Sur le désir de Congan, abbé dTnislounagh, et des communautés cisterciennes de l’Irlande, Bernard raconta la vie de son ami défunt. C’est une très importante page d’histoire. Dans le c. xix, il trace un magistral portrait du saint archevêque. Il ne lait aucune mention de la fameuse prophétie attribuée à saint Malachie. Sur le caractère apocryphe de cette prophétie, composée en 1590, voir Vacandard, Revue des questions historiques, juillet 1892, p. 50-53 ; Harnack, Ûeber Verfasser und Ziml ; der Prophctia Malachiæ, dans Brieger, Zeitschrift fur Kirchengeschichte, t. iii, p. 319.

14° Libri quinque de consideratione ad Eugenium III. P. L., t. clxxxii, col. 727 sq. — C’est le plus important des traités de saint Bernard. Le I er livre fut composé en 1149 ; le II » en 1150 ; le IIP en 1152 ; les IVe et Ve peu