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prit les idées ; enfin, quoique prêtre, il »j>uu^.< secrètement à Nuremberg La nièce du théologien luthérien Osiander. Pendant ce temps l’archevêque-primat de Cantorbéry, Warham, mourut, et Henri VI II. désespérant d’amener le pape à se prononcer, résolut de faire annuler son mariage, on mettant sur ce siège, le principal du rovaume, un prélat tout disposé à favoriser son désir. Il y nomma donc Cranmer dont il ignorait le second mariage et les idées luthériennes très avancées. Celte nomination vint surprendre Cranmer à Mantoue où il plaidait la cause de son maître auprès de Charles(Juint, oncle de Catherine d’Aragon ; il hésita quelque temps, sachant ce qu’on attendait de lui, et parce qu’il serait obligé de jurer obéissance au pape lors de sa consécration. Enfin à Westminster, il déclara que son serment ne pourrait l’engager à faire rien de contraire aux droits du roi ou aux réformes nécessaires à l’Eglise d’Angleterre. Cependant la curie romaine avait appris son attitude peu catholique en Allemagne, mais pour ne point susciter de nouvelles causes de mécontentement de la part du roi, le pape lui fit envoyer ses bulles avec le pallium. 1533.

II. L’ÉPISCOPAT sous Henri VIII. — Ainsi élevé à la première dignité ecclésiastique du royaume, le nouvel archevêque prouva sa reconnaissance, en ilattant de toutes manières les passions et les caprices du roi. En qualité de légat du saint-siège, il réunit son synode métropolitain, et malgré l’appel de la reine au pape, cassa solennellement le mariage du roi, 1533, confirma ensuite le mariage secret avec Anne de Boleyn, bien qu’il eût été célébré avant l’annulation susdite du mariage de Catherine. Enfin, pour empêcher toute excommunication de le frapper, il renia le titre de légat attaché à sa dignité, et fit appel au futur concile de toute censure lancée à l’avenir contre lui par Rome ; de sorte que, quand Clément VII, le 23 mars 1534, déclara le premier mariage de Henri VIII valide, la séparation était un fait accompli. En outre, l’acte de suprématie, décrété par le parlement sur l’instigation de Cranmer, ordonna « que le roi fût accepté, regardé, reconnu comme unique et suprême chef, sur la terre, de l’Église d’Angleterre » . Les évêques durent recevoir de nouvelles nominations, où il était spécifié que toute leur autorité spirituelle leur venait du roi, dont ils étaient les lieutenants pour prêcher l’Évangile et administrer les sacrements.

Dès lors aussi, Cranmer travailla à transformer l’Église anglaise d’après les nouveautés religieuses d’Allemagne, en favorisant la suppression des monastères et la destruction des images ; il persécuta les catholiques romains aussi bien que les novateurs qui refusaient de croire au purgatoire et à la transsubstantiation ; en 153fi, il proclama la nullité du mariage d’Anne de Boleyn avec autant de complaisance qu’il l’avait fait pour celui de Catherine d’Aragon ; du reste, il annula aussi en 1540 l’union d’Anne de Clèves avec Henri VIII, et en 1541 celle de Catherine Howard. En même temps, excité par ses amis les réformés allemands, il s’efforçait, mais en vain, d’inspirer leurs idées au roi, toujours très attaché au dogme, à la liturgie, à la discipline catholiques. En sa qualité de défenseur de la foi, titre dont il restait très fier, Henri avait horreur des opinions nouvelles, tl il sembla s, . laisser plutôt influencer à ce point de vue par l’évêque de Winchester, Gardiner, qui se contentait de la rupture avec Rome. Ainsi, en 1536, Cranmer ne parvint pas à faire adopter par rassemblée du clergé, ">ll articles 1res favorables aux idées luthériennes ; il fut au contraire obligé de souscrire les dix articles de religion. première Confession de foi anglicane publiée par le roi pour arrêter les discussions sans fin des évéques anglais. Voir t. i. col. 1283-1284,

Cranmer ne se tint pas pour battu. Une première

fois, il excita le roi à entrer dans la ligue de Smalkalde. 1536 ; ce fut en vain, malgré les motifs politiques qui ! i neourageaient. Henri s’obstina à rejeter la Confession d’Augsbourg. En 1538, il essaya de nouveau, et le roi consentit à recevoir une délégation de théologiens allemands qui discuteraient une formule de foi avec une commission d’évêques anglais présidés par Cranmer. Un manuscrit de Cranmer indique 13 articles rédigés par ce dernier sur les questions traitées dans cette conférence ; or, c’est à peu près la reproduction des idées de la Confession d’Augsbourg. Kri fait, l’accord n’eut pas lieu. Henri refusa d’accepter la communion sous les deux espèces, d’abolir les inesses propitiatoires et le célibat ecclésiastique : non seulement les théologiens allemands durent s’éloigner, mais le 2 juin 1539, malgré les instances de Cranmer. le roi accentua sa réaction vers le catholicisme par une déclaration que le parlement publia sous ce titre : Acte pour abolir la diversité des opinions, et que les anglicans appellent ordinairement -.Statuts des articles de 1639, ou encore Bill du sang, Fouet à G queues contre le* hérétique* allemands. Voir t. i, col. 1284. Ces (i articles firent loi jusqu’à la fin du règne. En vain, Cranmer les avait-il combattus avec énergie au parlement, il dut les signer et renvoyer sa femme en Allemagne. De même, en 1539, il s’opposa avec autant d’insuccès à la saisie des revenus des monastères au profit du roi : il aurait voulu les consacrer à des bourses pour étudiants ecclésiastiques, à des chaires de langues et de théologie, à des hôpitaux.

Il semble que ces tentatives auraient dû indisposer Henri VIII contre lui, surtout que ses idées luthériennes étaient alors manifestes, sa mollesse à faire exécuter le bill du sang assez visible, qu’il se montrait favorable aux novateurs qui agitaient l’Angleterre ; aussi, quand son ami le vicaire général Thomas Cromwell eut été disgracié et exécuté en 1540, tous pensaient qu’il aurait le même sort.

Il n’en fut rien ; Cranmer semble en effet être le seul favori pour qui ce roi sanguinaire ait éprouvé un véritable attachement. Un jour il arriva par la Tamise au palais de l’archevêque à Lambeth, et il lui dit gaiement : « Eh ! notre chapelain, j’en ai appris de belles sur votre compte ; il paraît que vous êtes le plus grand hérétique du Kent, » et il lui fit voir une dénonciation du clergé de Cantorbéry et des justices du Kent. Le crédit de Cranmer et son orthodoxie furent également attaqués au Conseil privé et à la Chambre des communes, mais le roi se refusa toujours à sévir contre son favori. Une fois l’archevêque sollicita d’être conduit à la Tour de Londres alin de s’y laver, devant ses y de toutes ces accusations : « Ah ! pieuse naïveté, lui dit Henri. Ne pensez-vous pas que si vous étiez une fois en prison, vos ennemis vous y garderaient ? l’es langues, qui sont muettes maintenant, parleraient : des personnes, qui tremblent de lever les eux vers vous, vous accuseraient, et vous seriez perdu ! » Cranmer conserva donc jusqu’à la mort du roi, en 1547. une influence prépondérante dans les affaires religieuses et même politiques de l’Angleterre ; c’est pour plaire a Henri VIII qu’en 1516 il publia le premier Primer, livre de prières officiel de l’Église anglicane, avec des litanies en anglais pour être chantées aux processions.

III. Sors Edouard VI.

A son avènement en 1517. le nouveau roi, fils de Jeanne Seymour, n’avait que dix ans ; son oncle, le protecteur, duc de Sommerset, se trouva d’accord avec Cranmer pour activer le mouvement de réformes en Angleterre, l’ourlant ils n’osèrent pas agir aussi vile qu’ils le désiraient : le parti conservateur restait puissant, tandis que les anabaptistes et les réformés venus d’Allemagne se discréditaient par leurs exagérations ; enfin dans son propre parti, le primat rencontrait une opposition jalouse, d’où naitra