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CREDIBILITE


Cf. Mariufi André) Le bienheureux Raymond Lulle,

|i. 153-174. L’exécution est empreinte d’un rationalisme —.if. Cf. Noël Alexandre, llisloria ceci., Venise, 1778. sæo. xiii, c. rn, a. 20, p. 86. D’où la condamnation par Grégoire XI, dos propositions 96 sq., où est affirmée la possibilité de démontrer les articles de foi ; et par contre, le manque de certitude de la foi surnaturelle. Ces propositions manifestent l’absence de la notion de la crédibilité, de sa preuve rationnelle propre, et de son évidence chez tout croyant. Cf. Denzinger, Encliiridion, n. 47 i sq.

Gilles Columna, 0. S. A. († 1316). — Il résume sa pensée dans ces trois curieuses propositions : toutes les objections de raison faites par un homme contre la foi sont solubles par l’homme ; un homme donné ne peut les résoudre toutes sans un inllux spécial de Dieu ; s’il venait à les résoudre, il ne prouverait pas quand même la vérité de la foi, car ce principe d’Aristote : la solution des raisons de douter manifeste la vérité, ne s’applique qu’aux raisons intrinsèques et non aux extrinsèques. Or, les raisons dont il s’agit sont extrinsèques, quia cum fides sit supra rationem mtlla ratio potest eam atlingere nec probans nec improbans. In IV tient., 1. III, dist. XXIII, q. ii, p. 589. Mais cette exclusion ne concerne pas les motifs de crédibilité. Judœi non cognoverunt personam Christi ; cognovemnt tamen opéra quæ probabant Christum esse lalem qualem Cliristus se esse dicebat. Nunquam enim est visunt a sœculo ut aliquis mendacium dieens et falsam docIrinam docens vera miracula fecerit. Dist. XXIV, q. i, » . 1, Rome, 1625, p. 590. Cette dernière phrase est imitée de saint Thomas.

Durand de Saint-Pourçain (fl334). — Il résout la foi aux mystères en la foi à l’inspiration de l'Écriture sainte qui les contient, la foi à l’inspiration de l'Écriture sainte en la foi à ce dogme premier : Ecclesiam régi a Spiritu Sanclo, en harmonie avec le dicton de saint Augustin, Cont. epist. Fundamenli : Evangelio non crederem nisi Ecclesise me moverel aucloritas. L'Église dont il s’agit est l'Église des apôtres qui furent remplis du Saint-Esprit : et nihilominns viderunt miracula Christi et audierunt ejits doclrinam et on hoc fuerunt convenientes testes omnium quæ Cliristus fecit aut docuit, ut per eorum testimonium Scriptura continens fada et dicta Christi approbaretur. In IV Sent., i. III, dist. XXIV, q. i, n. 8, 9. Quel est le rapport de la preuve humaine du témoignage divin à l’assentiment de la foi ? Réponse : Si non est processus in in/inilum, oportet igitur quod devenitur ad primum quod appareat rationi verum in se et secundum se, et taie, seemidum se, concordat rationi. Igitur /ides non excluait rationem sed prxviam supputât, licet non rationem démons tralivam, unde ipsemel Salvator doctrinam fidei quam prxdicabat reduxit ad quædam apparentia in se, scilicel ad miracula, ut ex apparentibus et visis ratio assentiret dictis non apparentibus… Eo : his igitur palet primum scilicel quod credere est meritorium, supposita charilate, cum sit aclus liber et bonus et concors rationi. Ibid., q. iii, n. 8. Talis ralio in nullo facit evidenliam de r<> crédita. Ibid., n. 9. On le voit, si Durand résout la foi en l’autorité de l'Église, il veut que la foi à l’autorité de l'Église soit appuyée sur la preuve rationnelle de la crédibilité.

Dans l’explication de la manière dont celle-ci indue, il suit les conceptions d’Alexandre de llalès. Il tient que la foi infuse ne saurait entrer en acte sans une foi acquise antérieure, car elle n’a pas le pouvoir de faire apparaître l’objet de foi. Preuve : le texte de l'Évangile de saint Jean, xv, 22. Constat autern quod mm /tablassent excusalionem de peccato incredulilalis, dalo quod Cliristus itou fuisset cis loculus, aut miracula J’ecisset, si (ides infusa suft’ecisset ad credendum dum modo credibilia fuissent cis proposita… Prsedicatio autem non est simplex propositio credibilium sed est cum persuasione ex Scripluris, vel signis, vel aliquo apparenti. Jn IV Sent., 1. III, dist. XXV, q. ni, Lyon, 1556, p. 224, recto.

Cette doctrine est loin d’avoir lo développement et la précision de celle de saint Thomas.

Raymond de Sebonde († 1437). — Il ne faut pasjuger du Liber creaturarum, Lyon, 1540, par l’illustration singulière qu’en a faite Montaigne, Essais, 1. II, C. III. Rien de plus traditionnel que l'œuvre de Sebonde, spécialement dans sa partie apologétique, tit. cevn, De vera fide c/tristiana, p. 120 ; tit. CCVIII, Con/irmatio credenlium et increpalio non credentium. C’est, comme le dit à Montaigne Adrien Turnebus, « quelque quintessence tirée de saint Thomas. » Sebonde a insisté, il est vrai, sur un argument repris par les pragmatistes utilitaires modernes, à savoir l’harmonie de la foi avec le bien de l’homme, tit. lxxx, p. 41 b, d’où Pascal a tiré' son idée qu’il faut rendre tout d’abord la religion aimable, faire désirer qu’il soit vrai. lia aussi un chapitre inspiré du dicton de Richard de Saint-Victor, où il avance que, en cas d’erreur, on sera excusé d’avoir cru ce que croient universellement les hommes les plus saints. Mais, de là, à fonder l’apologétique sur un certain scepticisme fidéiste, il y a loin. L'œuvre de Raymond est avant tout théologique, et la défense entachée de scepticisme que fait de ses arguments son apologiste, Essais, Paris, 1844, t. il, p. 37. S ; aulcuns disent, etc., n’est nullement dans son esprit. Par contre, dans la première partie du même chapitre, § La première appréhension, ibid., p. 26, Montaigne a pittoresquement rendu, bien qu’encore avec des exagérations fidéistes, la notion de crédibilité qui se dégage des parties apologétiques de l'œuvre de Sebonde, par exemple lorsqu’il dit que les arguments de Sebonde sont capables de servir d’acheminement et de premier guide à un apprentif. pour le mettre à la voie de cette cognoissance ; ils le façonnent aulcunement, et rendent capable de la grâce de Dieu, par le moyen de laquelle se parfournit, et se perfect aprez, nostre créance » . Ibid., p. 36. Cf. Marins André. Le bienheureux Raymund Lulle, p. 17 : i.

Holkott, O. P. († 1349), est cité par Suarez comme soutenant le déterminisme rationnel de l’acte de foi. De fide, disp. III, sect. vii, n. 2. Il n’y a pas lieu de le défendre et ce n’est pas le seul point où le tirs érudit maître de Cambridge s'écarte de la doctrine de son école. Cf. Werner, Der heilige Thomas von A quino, t. iii, 1. I, c. ii, Ratisbonne, 1859, p. 122. Il tient en effet que : credere articulos fidei non est in libéra hominis potestate. Super IV Sent., 1. I, q. I, B, a. 1, l a concl. Il le prouve par des raisons qui semblent n'établir que la nécessité d’une présentation objective fondée, ainsi celle-ci : soit ce fait mis en question : le roi est-il assis ou non ? C’est douteux, répond Holkott, donec cogatur assentire tel propler evidenliam rei, vel propler testimonium aliquorum quibus ralionabiliter débet credere. Et il cite le mot d’Aristote qui met à nu la portée réelle de son argumentation : imaginari possumus quod volumus, opinari non possttmus. On voit qu’il veut tout simplement. dire que la volonté de croire ne donne pas à la foi sa détermination objective, qu’il v faut une présentation objective évidemment motivée. Mais comme il ne possède pas la distinction thomiste de l'évidence simple et de l'évidence de la crédibilité, ainsi que le remarque justement Suarez. loc. cit., pour garantir les droits de l'évidence rationnelle sur la détermination de l’acte de foi. il se croit obligé de nier la liberté de celui-ci. Son procès contre Vimperium delà volonté dans la foi comprend dix chefs de preuves, par exemple : ad 5°"', si l’opinion contraire est vraie, on pourra dire tout ce que l’on veut sans jamais mentir ; ail 6°"'. c’est nlors inutile de prêcher aux infidèles les