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573 COMMUNION EUCHARISTIQUE (SPIRITUELLE) - COMMUNISME 574

l’eucharistie, non pas en le recevant sacramentellement, mais par un désir procédant d’une foi animée par la charité. Concile de Trente, sess. XIII, c. vin.

o On sait que la justification est produite par l’acte de charité ou par celui de contrition parfaite en tant que cet acte inclut chez le non-baptisé le vœu de recevoir le baptême et, chez le baptisé, le vœu de confesser ses fautes pour en être absous. Voir Charité, t. il, col. 2236-22’t5. Ainsi, pour opérer l’effet de ces sacrements, le désir implicitement contenu dans l’acte de contrition ou de charité suffit ; il n’en est pas de même pour l’eucharistie. La communion spirituelle exige essentiellement le désir explicite de s’unir à Jésus-Christ sacramentellement. Ce désir suppose donc la foi à l’eucharistie et comme il a été dit, il doit être accompagné de la charité.

2 » Il suit de là que ni les anges ni les bienheureux dans le ciel ne peuvent communier spirituellement. Développant cette pensée, saint Thomas, Sum. tlieol., III a, q. lxxx, a. 2, ad l um, 2um, fait remarquer que l’on peut communier spirituellement de deux façons : 1. en s’unissant au Christ en personne naturelle ; c’est ainsi que communient les anges en tant qu’ils sont unis au Christ par la charité et par la vision face à face ; c’est là le pain que nous mangerons un jour dans la patrie ; 2. on peut se nourrir spirituellement du Christ en s’unissant à lui en tant qu’il est présent sous les espèces, c’est-à-dire par la foi au Christ jointe au désir de recevoir le sacrement où il est présent : or ce mode de communion n’existe pas pour les anges.

3 » Trois actes constituent la communion spirituelle : 1. l’acte de foi à la présence réelle de Jésus-Christ au sacrement de l’autel ; 2. l’acte de désir, dont une forme très recommandable consiste à s’imaginer que l’on s’approche de la sainte table et que l’on reçoit l’hostie de la main du prêtre ; 3. l’acte d’action de grâces, le même que si l’on avait réellement communié. 4° Le moment où la communion spirituelle est particulièrement indiquée est naturellement celui de la communion du prêtre à la nrtesse ; mais on peut communier spirituellement à tout moment de la journée, autant de fois que l’on veut et en n’importe quel lieu. Celui qui serait en état de péché mortel n’est nullement tenu dese confesser ; il suffit qu’il fasse un acte de contrition parfaite. Et si la contrition était imparfaite, il ne pécherait point, mais, au contraire, il ferait une chose bonne en faisant les actes de la communion spirituelle ; seulement il n’obtiendrait point les grâces spéciales attachées à ce mode de communion, attendu qu’il manquerait d’une disposition essentiellement requise. Scavini. Tlicologia moralis, lr. IX, n. 167.

5° Les effets de la communion spirituelle sont identiques à ceux de la commnuion sacramentelle, sauf leur intensité, qui est moindre. S.Thomas, Sum. theol., lll a, q. i.xxx, a. 1, ad 3°" 1. Toutefois, ceci doit s’ent. mire à égalité des dispositions, car, autrement, une communion spirituelle, faite avec plus de ferveur, pourra produire plus de fruit qu’une communion sacramentelle faite avec tiédeur. Il n’est pas besoin de dire que les fruits de la communion spirituelle sont uniquement ex opère operanlis.

t’y In raison des fruits excellents de la communion sacramentelle et de l’effet qu’elle a d’aviver la foi et d’enflammer l’amour des fidèles envers l’auguste sacrement ainsi que de les porter à s’approcher de la sainte table fréquemment et avec ferveur, la commuIl spirituelle est hautement approuvée et recommandée par l’Église. Ainsi, parmi les motifs que le concile de Trente, sess. XXII, c. vi, invoque pour prouver que les messes où le prêtre seul communie sont néanmoins des messes communes à tous les les. il allègue la communion spirituelle que le peuple fait aces messes, signifiant ainsi clairement que

communier spirituellement c’est participer très véritablement aux fruits du sacrement de l’autel.

S. Thomas, Sum. theol., III 1, q. lxxx, a. 1, 2 ; Suarez, In UI’" Sum., dUp. LXII, sect. i, n. 2 ; Salmanticenses, Cursus theologicus, disp. II, dub. i, n ; Gihr, Die heiligen Sakramente, t. il, §22.

H. MOUREAU.

    1. COMMUNISME##


COMMUNISME. — I. Définition. II. Compétence de l’Église et des théologiens. III. Le communisme évangélique. IV. L’essai communiste de Jérusalem et l’enseignement des apôtres. V. Les Pères et le communisme. VI. Los scolastiques et le communisme. VU. Les papes modernes et le communisme.

I. Définition.

Dans un sens large, communisme dit l’opposé de propriété individuelle : celle-ci est l’exclusive attribution d’une chose à un maître ; le communisme inclut l’égal droit de plusieurs, collectivement exercé. Plus précis que le grand public, les sociologues et les économistes distinguent en outre deux formes de possession en commun : le communisme strict et le collectivisme. Ce dernier restreint la propriété commune aux moyens de production — la terre et tout ce qui s’en extrait, avec tout le matériel du travail ; mais le domaine de l’individu s’étend sur ses moyens de consommation (nourriture, habits, logement), que lui délivrent ou lui reconnaissent à proportion de son travail les administrateurs de la communauté. Ce régime constitue un communisme mitigé, et il comporte lui-même des variétés sur lesquelles discutent les savants et les réformateurs. Dans le régime du strict communisme, au contraire, « tous les biens, y compris les objets de consommation, sont communs à tous les membres de l’État, de la commune ou de l’association ; de telle sorte que les produits sont à la discrétion de tous ou distribués à chacun selon ses besoins. » Maurice Bourgain, Les systèmes socialistes et l’évolution économique, Paris, 1904, Introduction, p. VIII.

Mitigé ou plénier, le communisme intéresse l’Église par ses aspects moraux et religieux, lors même qu’il vise simplement une réforme économique ; à plus forte raison, lorsque son but est religieux.

II. Compétence de l’Église et des théologiens relativement au communisme. — i" cas.- Le communisme économique (compétence indirecte). Avant d’être un système de réforme sociale, théoriquement proposé, le communisme, au sens large du mot, se présente dans l’histoire et s’observe de nos jours encore à titre de fait réalisé. Les historiens nous décrivent le collectivisme agraire du mir russe ou des anciens communaux français ; les sociologues regardent fonctionner aujourd’hui le collectivisme paroissial des pâturages dans le Jura bernois ; le collectivisme familial de l’habitation dans les Zadrugas sud-slaves. Robert Pinot, La propriété, dans La science sociale, 1891, t. xii, p. 34, 114, 210.

A première vue, ces formes contingentes d’un communisme spontané ne semblent pas intéresser le moraliste. Elles s’établissent en raison du lieu où vit une population, du travail nourricier que ce lieu facilite ou impose, des groupements ouvriers qui s’organisent en vue de ce travail, des travaux antérieurs qui ont plus on moins préparé les générations successives à l’adoption du travail et des groupements actuels. Le communisme spon-I. iiii relevé ainsi directement des conditions naturelles qui inlluencent une société dans le choix et l’exercice de son gagne-pain : c’est un fait de vie économique et de vie sociale. Comme institution, il relève de la coutume ou de la loi, des habitudes privées ou de l’État : comme objet de science, il intéresse l’économiste ou le sociologue. Il est, de ce chef, étranger à la compétence propre du moraliste et du théologien.

Mais, indirectement et à raison de ses effets moraux, il s’y rapporte, comme tout acte humain. Les conditions