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CLÉMENT IX — CLÉMENT X

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autrement cet événement dans la bulle Vineam Bomini Sabaoth, et montrait en Clément IX « une adhésion très ferme aux constitutions de ses prédécesseurs » . Bullarium, t. xxi, p. 231. Il reste vrai cependant que la condescendance du pape, fermant les yeux sur la duplicité des quatre évêques et de leurs protecteurs, eut de funestes effets. Elle permit aux jansénistes de soutenir que leurs doctrines avaient son approbation, et que la distinction du droit et du fait était tolérée par Rome. Protégés par un arrêt du conseil d’État qui défendit le 23 octobre 1668 « à tous les sujets du roy de s’attaquer ni provoquer les uns les autres, sous couleur de ce qui s’est passé, usant des termes d’hérétiques, jansénistes et semipélagiens, ou de quelque autre nom de parti » , Relation, t. H, p. 230 sq. ; du Mas, Histoire, t. ii, p. 226, ils répandirent leurs doctrines pendant trente ans, et créèrent un parti que les plus rigoureuses mesures furent dans la suite impuissantes à anéantir.

A l’affaire des quatre évêques se rattache un épisode qui mérite d’être traité à part. La traduction française du Nouveau Testament, dont Saci était l’auteur principal, avait été terminée en 1667 ; le chancelier Séguier ayant refusé le permis d’imprimer en France, l’ouvrage fut publié sous le nom d’un libraire de Mons, avec les approbations d’un docteur de Louvain et de deux évêques, et un privilège du roi d’Espagne ; il sortait des presses des Elzévir à Amsterdam. La vente commença à Paris en avril 1667, et la mode s’en mêlant, le succès fut immense. Le Père Maimbourg, jésuite, attaqua l’ouvrage dans une série de sermons prêches à l’église de la maison professe de Paris ; Arnauld riposta par une Défense de la traduction dit Nouveau Testament imprimée à Mons contre les sermons du P. Maimbourg, jésuite. Deux ordonnances de Hardouin de Pérétixe, archevêque de Paris (18 novembre 1667 ; 20 avril 1668), interdirent la lecture de la traduction. Enfin un décret de Clément IX la condamna le 20 avril 1668 « comme téméraire, dangereuse, en désaccord avec la Vulgate, et contenantdes propositions scandaleuses pourles faibles » . Bullarium, t. xvii, p. 637. Quelques jours auparavant une condamnation analogue avait frappé le rituel d’Alet, édité par Pavillon, lbid., p. 629. Ces deux constitutions ne furent pas publiées en France ; et le parlement les supprima comme contraires aux libertés gallicanes ; les réclamations de Clément IX n’eurent aucun résultat. Gérin, Louis XIV, t. ii, p. 245 sq.

IV. Autres actes.

Quelques actes intéressants de Clément IX restent encore à signaler. Il accorda à Louis XIV, par plusieurs brefs, le droit de nomination aux évéchés et à d’autres bénéfices dans les pays récemment conquis par ses armes. Bullarium, t. XVII, p. 637, (317, 702, 701. Lorsque la paix, signée le 15 février 1668 entre l’Espagne et le Portugal, eut consacre l’indépendance de ce royaume, Clément confirma les élections faites aux évéchés et aux bénéfices en Portugal depuis la révolte, el reçut un ambassadeur portugais. Artaud, Histoire, p. 97 sq. Une Congrégation romaine a été créée par lui : celle des Indulgences et Reliques (6 juillet 1669), irium, t. xvii, p. 805 ; une autre, celle des Réguliers, çanisée et confirmée fil avril 1668). lbid., p. 655. On ne lui doit qu’une seule béatification, celle de Rose de Lima, le 12 février 1668. lbid., p. 628. Il a concédé à l’Étal pontifical et à plusieurs ordres religieux l’office et la messe de la conception de la sainte Vierge, lbid.,

Il accorda à la Compagnie de Jésus, le 20 septembre la suspension de l’ordonnance d’Innocent X qui imposait la convocation il une congrégation générale tous les neuf ans, ibid, p. 721 ; supprima les cou galions de Saint-Georges m Alga à Venise, desjésuates, i i de Saint-Jérôme de Fiésoles (6 décembre 1668), ibid., p 737 ; par contre il rétablit l’ordre des pauvres clercs d’li mère de Dieu pour les écoles pies, sécularisé

par Innocent X et Alexandre VII (23 octobre 1669). lbid., p. 827. Plusieurs ordonnances réprimèrent divers abus qui s’étaient introduits dans les missions : interdiction de tout commerce aux missionnaires des Indes Orientales et de l’Amérique (17 juin 1669) ; ordre aux réguliers de la Chine d’obéir aux vicaires apostoliques dans l’exercice de leurs facultés, et de subir leur visite quand ils exerceraient les fondions curiales (13 septembre 1669) ; confirmation de décrets d’Alexandre VII et de la Propagande pour le rétablissement de la discipline sur plusieurs points délicats à Goa et dans les Indes Orientales (13 septembre 1669). lbid., p. 798, 815, 819. Clément IX favorisa l’établissement de la Société des missions étrangères de Paris en approuvant, sur le rapport du cardinal Bona, ses instructions ou Monita ; il régla en même temps que les membres de la Société ne prononceraient pas de vœux. Launay, Histoire générale, t. I, p. 163 sq.

I. Sources.

Bullarium romanum, Turin, 1869, t. xvii ; Becueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France, Paris, 1888, t. i, p. 213 sq. ; Procès-verbaux des assemblées du clergé de France, Paris, 1767 sq., t. i.

H. Travaux. — Artaud de Monter, Histoire des souverains pontifes, Paris, 1847, t. vi, p. 90 sq. ; Audisio, Histoire religieuse et civile des jiapes, Paris, 1896, t. v, p. 104 sq. ; Beani, Clémente IX, notizie storiche, Prato, 1893 ; Bower, Historg of tlie roman popes, Londres, 1746, t. x ; Bozon, Le cardinal de Retz à Borne, Paris, 1878, p. 79 sq. ; Brosch, Geschichte des Kirchenstaates, Gotha, 1889, t. i, p. 434 sq. ; Cauchie, La paix de Clément IX, dans la Bévue d’Iiist. et de Utt. relig., 18’J8, t. iii, p. 481 sq. ; Chanlelauze, Le cardinal de Betz et ses missions diplomatiques. Paris, 1879 ; Haconius, Vitœet res gestæ pontiftcum romanorum, Rome, 1677, t. lv ; Dubois, Henri de Pardaillan de Gondrin, .’lençon, 1902 ; du Mas, Histoire des cinq propositions de Jansénius, Trévoux, 171 12 ; Gazier, Les dernières annéesdu cardinal de Retz, Paris, 1875 ; Gérin, Louis XIV et le saint-siège, Paris, 1894, t. ii, p. 178 sq. ; Jungmann, Disserlationes selectse in historiam ecclesiasticam. Ratisbonne, 1887, t. vii, p. 262 sq. ; Launay, Histoire générale de la Société des missions étrangères, Paris, 1894 ; Muratori, Annali d’Italia, Milan, 1749, t. xi ; Palatius, Gesta pontificum romanorum, Venise, 1688, t. iv, p. 623 sq. ; Petrucelli délia Gattina, Histoire diplomatique des couclaces, t. iii, p. 197 sq. ; Rankc, Dierômischen Ptipste, Leipzig, 1874, t. iii, p. 33 sq., 71 sq., 101 sq. ; Relation de ce qui s’est passé dans la paix de l’Église (par l’abbé Véret, grand-vicaire de Sens), Paris, 1706 ; Reumont, Geschichte der Stadt Bom, t. iii, p. 634 sq. ; Sainte-Beuve, Port-Royal, Paris, 1888, t. iv ; Sandinus, Vit<v pontificum romanorum, Ferrare, 1754, t. il, p. 690 sq. ; Terlinden, Clément IX et la guerre de Candie, Louvain, 1904.

J. DE LA. SERVIÈRE.


11. CLÉMENT X, pape (1670-1676), successeur de Clément IX. Emile Allieri naquit à Rome, le 15 juillet 1590, d’une noble famille dont il était le dernier rejeton mâle ; devenu pape, il assura la continuation de son nom en le transmettant, avec ses armes et sa fortune personnelle, au cardinal Paluzzi el à son neveu Gaspar, qui avait épousé Laure-Catherine Allieri.

Après de bonnes études de droit civil et de droit canon, il lit ses débuts dans la diplomatie, comme auditeur de la nonciature de Pologne, puis fut nonce à Naples et en Pologne ; en 1627, il était évêque de Camerino. Alexandre’|| le lii secrétaire (le la S. C. des Évêques et Réguliers, Clément IX, président de la Chambre apostolique ; un mois avant sa mort.ee dernier pape lui donna la pourpre en lui disant gaiement : « Vous serez notre successeur. »

Le conclave qui suivit la mort de Clément IX fui long et agité, à cause des rivalités des factions de France et d’Espagne. Le duc de Chaulnes, qui avait contribué à l’élection de Clément IX, avait été de nouveau envoyé à Rome par Louis XIV connue ambassadeur extraordinaire auprès du conclave. Il fui moins heureux qu’en 1667, et ne put enlever l’élection d’aucun de ses candidats ; après cinq mois de luîtes, les divers partis réunirent par lassitude leurs suffrages sur le cardinal Allieri.