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95 dont le grand âge laissait la porte ouverte à toutes les espérances (29 avril 1670) ; son nom ne figurait même pas dans l’instruction remise par Lionne au duc de Chaulnes. Cf. Hanotaux, Recueil des instructions, t. 1, p. 227 ; Gérin, Louis XIV et le Saint-Siège, t. II, p. 401 sq. CLEMENT X Clément X et son neveu d’adoption, le cardinal Paluzzi Altieri, s’efforcérent d’encourager le commerce et l’industrie dans les Etats pontificaux ; un décret du 15 mars 1671, Bullarium, p. 229, statua que les nobles romains pouvaient, sans déroger, se livrer au commerce de détail. Il éleva à Rome un hospice pour les nouveaux convertis, construisit le palais Altieri, embellit le pont Saint-Ange et la place Saint-Pierre, et secourut avec une grande charité les victimes du tremblement de terre qui éprouva l’Italie en 1675. Son gouvernement ne fut cependant pas populaire, à cause des impôts nouveaux que le cardinal Altieri crut devoir établir. L’un d’eux surtout, un droit de 3 0/0 qui frappait toutes les marchandises entrant à Rome, même à l’adresse des cardinaux ou des ambassadeurs, causa un mécontentement universel ; les ambassadeurs protestèrent avec une telle violence qu’Altieri ne put parvenir à faire observer son décret. Gérin, op. cit., p. 546 sq. D’autres graves démêlés surgirent entre la curie et l’ambassade de France, gérée alors par le duc d’Estrées, et son frère, le cardinal évêque de Laon, protecteur des affaires du royaume. Nominations de cardinaux et de bénéficiers, exemptions des taxes auxquelles la cour de Rome prétendait, droit d’asile réclamé par l’ambassadeur, non seulement dans son palais, mais dans le quartier avoisinant, tout devint prétexte aux plus blessantes entreprises des d’Estrées contre le pape et celui qu’ils appelaient « son neveu postiche » >. Gérin, op. cit.. p. 538-610. En même temps commençait en France cette série de mesures arbitraires. et contraires aux droits de l'Église qui devaient aboutir sous Innocent XI à une rupture ouverte avec la cour de Rome. En août 1670, Clément X dut répondre à l’arrèt d’Agen, dont il a été question précédemment, voir col. 88, par une importante constitution qui règle les rapports entre évêques et réguliers pour la confession et la prédication ; on en trouvera plus bas l’analyse. En 1673, Louis XIV décréta de sa propre autorité la suppression de divers ordres militaires et hospitaliers, et la transformation de ceux de Saint-Lazare et de Notre-Dame du Mont-Carmel, dont le roi prenait la grande maitrise ; il établit la même année à Paris et dans tout le royaume des officiers à charges vénales, dont le ministère était nécessaire pour toutes les expéditions et provisions ecclésiastiques et spirituelles émanées de Rome et d’Avignon » . L'édit allait jusqu'à déclarer « nuls et de nul effet » les décrets pontificaux obtenus par une autre voie. Procès-verbaux du clergé, t. v. p. 262 sq. Cf. Gérin, Louis XIV, p. 197. Un envoyé spécial, l’abbé Cocquelin, vint à Rome essayer d’arracher au pape la ratification de ces mesures ; il devait de plus obtenir la sécularisation d’une foule de petits monastères, l’imposition de la règle de Saint-Maur à toutes les congrégations bénédictines, la faculté pour le roi d’imposer, sur tous les bénéfices à sa nomination, des pensions perpétuelles s'élevant jusqu’au tiers du revenu. Le pape répondit, le 22 avril 1673, par une lettre qui mérite d'être placée à côté des brefs célèbres d’Innocent XI contre la régale ; tout en se montrant disposé à certaines concessions pécuniaires, il refusait absolument de ratifier les décrets portés par le pouvoir civil au mépris de l’autorité apostolique. Gérin, op. cit., p. 497, 498. En 1673 et 1675, toutes les églises du royaume furent soumises, par déclaration royale, au droit de régale qui n’atteignait jusque là que les évéchés fondés par les rois de France ; les archevêques et évêques qui n’avaient pas encore « clos leur régale » devaient accomplir celle formalité dans les six mois, en faisant enregistrer leur serment. 96 Ces ordonnances étaient en contradiction avec un décret du II concile général de Lyon qui, en autorisant la régale dans les évéchés où elle existait, avait détendu de l’introduire dans d’autres. Voir REGALE. Les prédécesseurs de Louis XIV, malgré les prétentions contraires des parlements, avaient respecté cette déiense. Gérin, Recherches historiques sur l’Assemblée de 1682, Paris, 1870, p. 39. Deux prélats, Caulet, évêque de Pamiers, et Pavillon, évêque d’Alet, dont nous avons raconté dans l’article précédent l’obstination janseniste, voir col. 90-91, furent cette fois mieux inspirés ; ils refusérent de préter le serment demandé et de recevoir les bénéficiers pourvus en régale par le roi dans leurs diocèses. Clément X avait été informé de cette allaire ; mais elle ne fut réglée que par ses successeurs. Les efforts faits par le pape pour maintenir ou rétablir la paix entre les princes chrétiens, et les liguer contre les Turcs, qui depuis la prise de Candie menaçaient l’Italie, contrarièrent souvent la politique française. On voit ainsi, en 1672. Clément X s’entremettre pour réconcilier Gènes et la Savoie, et écrire à l'électeur de Cologne pour le détourner de se joindre à la France contre la Hollande. Gérin, Louis XIV et le saintsiège, t. 11, p. 483. En 1675 et 1676, il offre sa médiation pour apaiser la guerre rallumée entre la France et la maison d’Autriche ; pendant que ses ouvertures étaient bien accueillies à Vienne et à Madrid, Louis XIV n’y faisait que des réponses dilatoires, et le pape mourut sans avoir vu la réunion du congrès d’où devait sortir la paix de Nimègue. Gérin, op. cit., p. 626, 642, 643. En même temps, Clément X aidait de ses subsides et de ses encouragements les Polonais qui, sous la conduite du grand maréchal Jean Sobieski, remportèrent sur les Turcs la victoire de Choczim (10 novembre 1673). L’incapable roi de Pologne, Michel Korybuth, étant mort ce même jour, Jean Sobieski fut élu pour lui succéder, à la grande joie du pape (21 mai 1674). Malheureusement, sous l’influence de l’ambassadeur de France en Pologne, Forbin-Janson, évêque de Marseille, le nouveau roi entama presque aussitôt avec les Turcs des négociations qui devaient aboutir à la funeste paix de Zurawno (1676). Gérin, op. cit., p. 521 sq. En 1673, le grand duc de Moscovie, Jean Basilitz, envoya une ambassade au pape pour lui deinander la confirmation de son titre de tsar ; l’attachement du grand duc au schisme empêcha le succès de sa requête. Malgré son grand åge, Clément X avait conservé ses forces et sa lucidité d’intelligence, et il n’est pas exact qu’il ait abdiqué son pouvoir entre les mains du cardinal Altieri, comme le lui reprochait l’ambassadeur de France. Cf. Mémoire des intrigues, p. 15 sq. ; Gérin, op. cit., p. 435 sq. Au commencement de juillet 1676, il fut pris d’hydropisie ; le 22 juillet, il reçut l’extrêmeonction, sans que le cardinal d’Estrées, qui lui devait la pourpre, eut voulu paraitre à la cérémonie ; il mourut. le même jour. On doit à Clément X la canonisation, déjà préparée par Clément IX. de saint Pierre d’Alcantara et de sainte Madeleine de Pazzi (Il inai 1670), Bullarium, t. XVIII, p. 1, 11 ; celles de saint Gaëtan de Thienne et de saint François de Borgia (Il juin et 3 juillet 1671), ibid., p. 233, 236 : de sainte Rose de Lima et de saint Louis Bertrand (12 avril 1671), ibid., p. 187, 215 ; de saint Philippe Beniti ( juillet 1672). Ibid., p. 314. Il a béatifié Pie V (27 avril 1672), ibid., p. 301 ; Jean de la Croix et François Solano (25 janvier 1675), ibid., p. 526 ; les martyrs de Gorcum (14 novembre 1675). Ibid., p. 600. Il a créé le siége épiscopal de Québec en faveur de Mar de Laval (1675). Les querelles du jansénisme semblaient assoupies par la paix de Clément IX ; le seul acte important de Clement X contre la secte est son approbation du décret de l’Index condamnant l'écrit d’Adam Widenfelt,