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CONSTANCE (CONCILE DE)


fissent autant. Le mode, la forme, les conditions et l’époque de cette cession, tout serait déterminé par les commissaires de Jean et ceux des nations.

La formule fut trouvée trop vague et trop violente pour les papes rivaux. Gerson arrive avec les représentants de l’université de Paris et s’entend avec les Allemands et les Anglais. Une nouvelle formule est rédigée. Le 1 er mars 1415, Jean est réduit à lire sa cession. Ego… profiteor, spondco… sponte et libère clare pacem ipsi Ecclesise per viam mese simplicis cessionis papatus, et eam facere et adimplere cum effeclu… si et quando Petrus de Lima.., et Angélus de Corrario… papatui quem pr se tendant… simplicité)’cédant, et etiani in quoeumque casu poterit dari unio Ecclesise Dci ad extirpalionem pressentis schismatis. Cet acte fut reçu avec allégresse.

La renonciation promise par Jean XXIII était un préliminaire essentiel à l’abdication des deux autres papes. On comptait assez sur celle de Grégoire XII, parce que ses nonces procédaient de bonne foi à l’union et que d’ailleurs les princes et les évéques de son obédience promettaient de l’abandonner s’il refusait d’abdiquer le pontificat. Benoit XIII s’était bien gardé de s’avancer si fort avec le concile. Les nonces et les ambassadeurs d’Aragon demandaient que Sigismond se transportât à Nice, pendant que Benoit et Ferdinand d’Aragon iraient à Villefrancbe.

L’empereur consentit. Mais pour abréger les négociations de Nice et de Villefrancbe, on jugea qu’il fallait engager Jean XXIII à constituer procureurs de sa cession l’empereur et les principaux prélats qui l’accompagnaient. Le projet fut approuvé par la France, l’Allemagne, l’Angleterre, rejeté hautement par Jean XXIII, soutenu par l’Italie (9 mars). Le jour même on soupçonna que le pape et les Italiens voulaient quitter le concile ; Sigismond fit garder la ville. Jean XXIII accorda qu’il ne fût permis à personne de quitter le concile, que le concile ne pût être dissous ou prorogé avant le rétablissement de l’union, mais il voulait aller personnellement à Nice. Cette proposition, qui dérangeait les plans de l’empereur, irrita fort Allemands et Anglais, auxquels se joignirent bientôt les Français qui avaient d’abord accueilli avec sympathie l’idée du pape mais qui cédèrent aux exigences, pourtant un peu trop hautaines, de l’empereur. Néanmoins les Français ne voulurent jamais adhérer à l’idée des Anglais de faire arrêter le pape.

A la suite d’une scène violente avec l’évêque de Salisbury à qui Sigismond sembla donner raison, Jean XXIII ne songea plus qu’à s’enfuir. Frédéric d’Autriche lui en facilita les moyens, en annonçant pour le 20 mars un grand tournoi. Au milieu des fêtes, Jean, déguisé en palefrenier, réussit à s’évader. Il gagna Schaffouse, où Frédéric, souverain de cette ville, se hâta de le rejoindre. D’ailleurs, il eut soin d’écrire à l’empereur et aux cardinaux qu’il ne retirait pas ses promesses. En même temps, il essaya d’intéresser à sa cause le gouvernement français et de faire venir près de lui le sacré-Collège.

La fuite de Jean XXIII avait causé une grosse émotion à Constance. Sigismond maintint l’ordre, empêcha la dissolution du concile, accusa de trahison Frédéric d’Autriche et entreprit de ramener le pape. Le sacrécollège décida de traiter les affaires avec les quatre nations et envoya une délégation à Schaffouse.

Il s’agissait maintenant de savoir si le concile réduirait le pape par la voie d’autorité. En huit jours, sous la pression des circonstances, il allait en venir à formuler la doctrine de sa supériorité. Les délégués français se signalèrent par la violence de leurs revendications en faveur du concile. Le 23 mars, Gerson exposait dans un discours les idées de son De auferibilitate papas ; d’autres membres de l’université de Paris ollèrenl

encore plus loin, ainsi que beaucoup d’ecclésiastiques du second ordre.

Le 26, malgré une lettre de Jean XXIII aux cardinaux où il les déclarait tous ses procureurs dans cette affaire et l’absence de tous les cardinaux sauf deux, et de beaucoup d’évêques, le concile dans sa IIIe session adoptait conciliariter les conclusions de Pierre d’Ailly sur le droit de l’assemblée à accomplir l’œuvre commencée, malgré l’éloignement ou l’opposition du pape, et à n’être transférée que pour une raison suffisante et de son propre consentement. D’Ailly et Zabarella protestèrent d’ailleurs qu’ils demeuraient fidèles à l’obédience de Jean XXHI.

Le 29 mars, jour du vendredi-saint, à une réunion tenue chez les franciscains, les’nations de France, d’Allemagne et d’Angleterre rédigèrent quatre articles devenus fameux : 1° Le saint concile de Constance légitimement assemblé, formant un concile œcuménique et représentant l’Église militante, tient son autorité immédiatement de Dieu, et toute personne de quelque dignité qu’elle soit, même papale, est obligée d’obéir au concile, en tout ce qui regarde la foi, l’extirpation du schisme et la réformation de l’Église tant dans le chef que dans les membres. — 2° Toute personne, de quelque dignité qu’elle soit, même papale, est tellement obligée d’obéir aux décrets du concile ou de tout autre concile canoniquement assemblé, sur les points qu’on vient de dire, que si elle y résiste opiniâtrement, on pourra la punir selon les lois et les voies de droit. — 3° L’autorité du concile étant extrêmement utile et même nécessaire à l’Église pour le maintien de la foi, de l’unité et des mœurs, la fuite du pape est un scandale manifeste, une opposition formelle à tous les engagements qu’il a pris ; s’il ne se met en devoir de se jus-’tifier ou de satisfaire au concile, il se rendra extrêmement suspect de schisme et même d’hérésie. — 4° Le pape Jean XXIII et toutes les personnes invitées au concile ont joui d’une pleine liberté à Constance, et cette liberté n’a encore reçu aucune atteinte.

Les cardinaux et les membres de la nation d’Italie ne prirent point de part à la congrégation où tout ceci fut arrêté. Us prièrent Sigismond de ne pas permettre que les quatre articles précédents fussent publiés le lendemain par le concile conciliariter. Ils se plaignaient qu’on fit mention dans le premier de la réformation de l’Église tant dans le chef que dans les membres, et, pour les trois autres, ils les rejetaient absolument comme contraires à l’honneur du pape.

Sigismond essaya d’amener un accord ; à la IVe session (30 mars) Zabarella ne lut que le l « des i articles, moins le dernier membre de phrase et deux autres beaucoup moins injurieux pour le pape que les art. 2-4. Mais au même moment on apprenait que Jean XXIII venait de s’enfuira Lauffenbourg et on rapporta qu’il avait fait dresser un acte de protestation contre tout ce qui s’était pissé dans la IIe session, celle du 2 mars, où il avait lu son acte de cession. Cependant le i avril par une lettre adressée à tous les fidèles, Jean XXIII devait encore affirmer qu’il persistait dans son dessein de renoncer à la papauté.

Cette fois encore un certain nombre de cardinaux et de prélats allèrent rejoindre le pape. Ses adversaires résolurent de reprendre les quatre articles votés le vendredi-saint.

Le 6 avril 1415, se tint, sous la présidence du cardinal Orsini, la Ve session, devenue, comme la IY< célèbre dans l’histoire de l’Église gallicane, principalement à cause des conclusions qu’en tira le clergé’de France, en 1(582. Sept cardinaux y assistèrent, pour éviter le scandale, dirent-ils, mais non pour approuver ce qui se passerait ; quatre, entre autres P. d’Ailly, firent défaut ; l’empereur, entoure de princes, y parut dans tout l’appareil de la majesté impériale, el l’on compta dans