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DOCTEUR


mémo, chef de l'école, sous les noms d' « écolâtre », « scolastique », « capiscol », et plus généralement ensuite, sous celle de « chancelier ». C’est ainsi qu’il appartenait aux chanceliers de Notre-Dame et de Sainte-Geneviève d’examiner les professeurs et les maîtres qui se présentaient pour enseigner dans ces écoles, et de « licencier » après leurs études ceux qui prétendaient élre « maîtres » et régents. Par les bulles de Grégoire IX nous apprenons également qu’outre la licence un grade universitaire, celui de bachelier (bacchalarii) existait à cette époque, c’est-à-dire dans la première moilié du xiiie siècle. Le doctorat, comme grade universitaire bien distinct, avait-il déjà fait son apparition ? On ne peut l'établir sans conteste. Il est vrai que dans la huile de Grégoire IX, datée de la première année de son pontificat et adressée au chancelier de l'Église de Paris, il est question des doi : lores théologie ac decrelorum ac liberalium artium : mais ce terme doit-il être pris dans le sens général de « maîtres », expression consacrée pour désigner les professeurs ? On ne saurait préciser davantage. Cf. Féret, La faculté de théologie de Paris, Paris, 1894, t. I, Introduction, p. lvi, note 1. Quoi qu’il en soit de la question des origines, voici comment, dans l’ancienne université, s'échelonnaient les grades académiques. On distinguait trois classes de bacheliers : les biblici, les sententiarii, les formati, voir Grades. Pour les bacheliers formait, commençait la préparation immédiate à la « licence ». Quatre années furent d’abord assignées à cette préparation ; puis ce laps de temps fut réduit à trois ans. Durant cet intervalle, le candidat à la licence devait être présent aux actes publics de la faculté, faire des conférences, et soutenir des argumentations. L'époque révolue, le candidat à la licence demandait à la faculté de le présenter au chancelier qui, au jour fixé, proclamait solennellement les noms des lauréats. « Par la licence on entrait dans la période des actes solennels pour la maîtrise ou le « doctorat ». Ils étaient au nombre de trois : les « vespéries », 1' « aulique », la « résompte ». Ces noms avaient leur origine dans trois mots latins : celui de « vespéries », dans vespera, soir, parce que l’acte avait lieu une après-dinée ; celui d' « aulique », dans aida, parce ; qu’il avait pour théâtre la salle de l'évêché (c’est alors qu’il y avait remise des insignes du doctorat) ; celui de « resompte » dans resumpta de resumere, parce que c'était, pour une partie, la thèse adoptée par le licencié dans ses « vespéries ». Féret, op. cit., Moyen âge, t. iii, p. 79. La collation des grades académiques pouvait s’opérer dans les diverses facultés. C’est qu’en effet la classification des connaissances avait bientôt amené dans l’ancienne université la division en facultés. Celles-ci sont nées graduellement, et, par suite, on ne saurait déterminer de façon précise leurs commencements. Le célèbre ouvrage d’un moine de Bologne, La concorde des canons discordants, connu sous le nom de Décret de Gratien, avait entraîné un partage dans la science théologique. « Jusqu’alors la discipline de l’Fglise n'était pas séparée de la théologie proprement dite : on les étudiait ensemble. Mais cette vaste collection fit sentir le besoin de cours spéciaux. On commença naturellement à Bologne, où l’on professait le droit romain. En France, Orléans d’abord, Paris ensuite, virent s'élever des chaires de droit canonique, lesquelles étaient d’ordinaire, à la fois, chaires de droil civil. La capitale du royaume pouvait déjà s’enorgueillir, dans ce nouveau professorat, avant la fin du XIIe siècle, des Gérard ou Girard la Pucelle, Mathieu d’Angers, Anselme ou Anselle de Paris. » Féret, op. cit., Introd., p. xv. Kn somme, si on doit noter que la faculté de médecine est la dernière venue, il faut reconnaître que 1rs quatre facultés sont formellement désignées dans une lettre adressée, en février 1254, par l’université, aux prélats de la chrétienté. On y parle, en effet, « de la théologie, de la jurisprudence, de la médecine, et de la philosophie rationnelle, naturelle, morale. » Du Boulay, Hist. univ. Paris., t. iii, p. 255. Dans sa bulle Quasilignum, avril 1255, le pape Alexandre IV fait mention, avec la « faculté de théologie », des autres facultés, à savoir des facultés des canonistes, des physiciens, et des artiens. Ibid., p. 285 ; Féret, op. cit., Introd., p. i.i. L’institution de la faculté et du doctorat es lettres date seulement de la fondation de l’Université de France (art. IG et 21, décretdu 17 mars 1808). « Avant 1789, les facultés de théologie, de droit et de médecine, recevaient seules les docteurs. On considérait cependant comme équivalente au doctoral la maîtrise es arts qui n'était qu’une conséquence de la licence, pour l’obtention de laquelle on soutenait un examen. Après que le candidat avait été déclaré licencié, le chancelier de Notre-Dame ou celui de Sainte-Geneviève lui plaçait sur la tête le bonnet doctoral en prononçant ces paroles : Quapropter in hujus potestatis signum liane lauream magislralem capili tuo impono. Etienne Pasquier, Recherches de la France, l. IX, c. x, etc. ; Taranne, Xotice historique sur les collèges de l’ancienne Université de Paris ; voir Journal de l’Instruction publique, 26 mars 1815, n. 23. » Les maîtres es arts exerçant étaient réputés el appelés c docteurs de la faculté des arts ». Cette dénomination qui était encore en usage au commencement du xviie siècle finit par tomber en désuétude. Elle fut renouvelée en I7(16 par l’institution du concours de l’agrégation qui conféra, avec le droil d’enseigner, le titre de « docteur agrégé ». Cf. Mourier et Deltour, Notice sur le doctorat es lettres, Paris, 1880, p. IV sq. La faculté de théologie de Paris tomba avec l’ancienne université sous les coups de la Dévolution. Bientôt, par le décret du 17 mars 1808, Napoléon I" établit un centre unique d’enseignement, l’Université de France, pour remplacer l’ancienne université de Paris et les autres universités de province. La nouvelle Université comprenait cinq facultés : lettres, sciences, droit, médecine et théologie. Toutes ces facultés pouvaient conférer le doctorat, mais d’après des règlements particuliers à chacune. Si la faculté de théologie survécut à Paris et en quelques villes de France, elle devint l'œuvre du gouvernement, sans l’assentiment du Saint-Siège ; et, n’ayant point reçu l’investiture canonique, sa nomination aux grades académiques, spécialement au doctorat, resta toujours sans effet, et son enseignement fut condamné à peu près à la stérilité. Cf. Féret, op. cit., Époque moderne, t. VI, passim.

III. Droits et privilèges.

Le droit romain et le droit des Décrétales reconnaissaient aux docteurs un certain nombre de droits et de privilèges dont plusieurs sont aujourd’hui tombés en désuétude. Ainsi :
1° Le doctorat était réputé un titre de noblesse, Jus Rom., l. II, §dernier ; I. IV, § 1, De excusât. tutor. ; en sorte que les personnes pourvues de ce grade jouissaient par le fait même, et sans autre autorisation spéciale de l’empereur, des insignes et des prérogatives accordées aux nobles. Telle fut, au moins pendant longtemps, la pratique en usage en Allemagne. Cf. Schmalzgrueber, Jus ecclesiaslicum, l. V, lit. v, §1, De gradibus et honoribus litterariis, n. 5. —
2° Les docteurs étaient en outre exemptés des impôts tant réels que personnels. Cf. Schmalzgrueber, loc. cit., n. 8. —
3° Les docteurs, s’ils s'étaient rendus coupables de quelque crime, étaient punis avec une rigueur mitigée ; et certaines peines infamantes, telles que les galères, la llagellation, leur étaient épargnées, liien plus, on ne pouvait leur inlligerla peine de mort sans qu’ils aient été auparavant l’objet d’une dégradation solennelle. Cf. Leurenius, Forum ecclesiaslicum, 1. Y. lit. v, q, cxxv. n. 1 ; Schmalzgrueber, loc. cit., n. 9. — A ces droits et pré