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ÉGLISE


L'Église, obsrrve aussi que cette proposition n’est point de foi, mais qu’elle est tellement certaine que la nier serait scandaleux, téméraire et proche de l’hérésie. Controv., 1. IV, q. ii, a. 14, concl. 2, Anvers, 1698, p. 337 sq.

Cet enseignement est dès lors communément suivi par les théologiens. Sylvius, op. cit., p. 336 sq. ; A. Barbosa, op. cit., t. I, p. 33 ; Jean de Saint-Thomas, op. cit., p. '293 sq. ; Salmanticenses, Cursus théologiens, tr. XVII, De fide, disp. IV, dub. il, n. 46, Paris, 1879, t. xi, p. 275 ; Libère de Jésus, op. cit., t. V, col. 627 sq. ; Henno, op. cit., p. 315 sq. ; Tournely, op. cit., t. i, p. 432 sq. ; Benoît XIV, De servorum Dei lieatificatione et beatorum canonizalione, 1. I, c. xlv, , ('dit., Rome, 1747, t. I, p. î-46 sq. ; Billuarl, Traclatus de regulis fidei, diss. III, a. 8 ; Murray, op. cit., t. iii, p. 312 sq. ; Mazzella, op. cit., p. 617 sq. ; Ilurter, op. cit., p. 271 sq. ; Billot, op. cit., p. 424 sq. ; Wilmers, op. cit., p. 469 sq. ; de Groot, op. cit., p. 298 sq. ; Pesch, op. cit., p. 371 sq. Voir CANONISATION DES SAINTS, t. iii, col. 1640 sq.

I) Infaillibilité de l'Église dans l’approbation des ordres religieux. — Cano affirme, non sans quelque hardiesse, que l’approbation ou la désapprobation des ordres religieux, ne relevant point seulement de la science, mais aussi de la vertu de prudence, n’est point une de ces choses dans lesquelles le souverain pontife ne peut errer. Les privilèges, conférés en cette matière par le saint-siège, ne sont point des jugements certains qui obligent tous les fidèles ; ils montrent seulement l’opinion des papes, tout comme les lettres décrétâtes dont quelques-unes ont été, après une meilleure délibération, réfutées par dis leltres subséquentes. De locis l/ieot., 1. V, c. v, Opéra, Venise, 1759, p. 140.

Bannez, au contraire, enseigne comme vérité certaine, que l’on ne pourrait nier sans hérésie que le souverain ponlife ne peut errer dans l’approbation qu’il donne à un ordre religieux, du moins en ce qui concerne la doctrine, et en ce sens que des constitutions religieuses ainsi approuvées ne peuvent rien contenir qui soit opposé à la doctrine évangélique, ou à l’enseignement de la foi ou à la droite raison. In 11™ II*, q. i, a. 10, Venise, 1602, col. 148 sq. Cependant il peut se faire que le souverain ponlife, par négligence ou par ignorance ou par suite de faux renseignements, manque, en quelque manière, de prudence en approuvant ou en confirmant plus d’ordres religieux que ne l’exigent les besoins de l'église. Toutefois cette erreur ne peut nuire à l'Église universelle, bien qu’elle soit nuisible à quelques individus, col. 149.

Grégoire de Valence enseigne également que le pape ne peut se Irompcr, en approuvant un ordre religieux comme conforme à la perfection évangélique. Anah/sis fidei calholicæ, part. VIII, Ingolstadt, 1585, p. 315. Ce ! auteur affirme même que le pape ne peut manquer de prudence, à ce point qu’il approuve un ordre que, selon toutes les circonstances, il aurait du rejeter. Ce serait imposer à l'église entière une chose qui ne serait point pour son édification, mais pour sa destruction ; ce que le pape ne peut faire. Cependant comme les circonstances de temps, de personnes et de choses changent fréquemment, il peut se faire qu’un ordre, d’abord prudemment approuvé, soit ensuite prudemment rejeté, p. 316.

Suarez enseigne, comme Grégoire de Valence cl Bannez, que le pape est infaillible dans le jugement qu’il porte sur tel ordre, comme capable de conduire véritablement à la perfection. Cette assertion est principalement appuyée sur ce que le pape ne peut induire les fidèles en erreur, en une telle manière qui concerne gravement leur conduite morale, ou leur ache minement effectif vers la perfection. De fide, disp. V' sect. viii, n. 9 ; De religione, tr. VII, 1. II, c. xvii, n. 17. Comme Bannez et contrairement à Grégoire de Valence, Suarez admet que les jugements du pape peuvent n'être pas infaillibles en ce qui concerne l’utilité ou l’opportunité d’un ordre. Mais il estime qu’il y aurait témérité à affirmer en fait une telle erreur, à moins qu’elle ne soit manifestement prouvée. Quant aux assertions de Cano en cetle matière, il les juge d’une sévérité excessive. Al hic gravissimus excessus est, ne quid majus dicam. De religione, tr. VII, 1. II, c. xviii, n. 22.

La doctrine de Bannez et de Suarez est dès lors communément suivie par les théologiens. Sylvius, op. cit., p. 339 sq. ; Jean de Saint-Thomas, op. cit., p. 311 ; Tournely, op. cit., t. i, p. 433 sq. ; Murray, op. cit., t. iii, p. 320 sq. ; Mazzella, op. cit., p. 018 ; Ilurter, op. cit., p. 271 ; de Groot, op. cit., p. 303 sq. ; Wilmers, op. cit., p. 474 sq. ; Pesch, op. cit., p. 370.

s. Infaillibilité de l'Église relativement aux faits dogmatiques. — Les faits et les documents précédemment cités montrent que, jusqu’au XVIe siècle, on avait pratiquement admis l’infaillibilité de l'Église, dans les jugements du magistère ecclésiastique concernant des faits dont la vérité est intimement liée avec la défense ou l’explication d’un dogme révélé, comme la légitimité' des conciles œcuméniques reconnus par l'Église, et le caractère hérétique des doctrines ou des ouvrages réprouvés comme hérétiques par les définitions ou décisions de l’Eglise.

En même temps, l’on reconnaissait avec saint Thomas, dont le texte a été précédemment cité, Quodlibet., IX, a. 16, que l'Église ou le saint-siège n’est point infaillible dans les jugements portés sur des faits particuliers, n’intéressant point la foi et dépendant uniquement de l’information et du témoignage des hommes. Nous avons cité, en ce sens, l’appréciation du cardinal Turrecremata sur le jugement de plusieurs papes, concernant les ordinations faites par leur prédécesseur Formose.

Au xvie siècle, l’attitude des théologiens reste la même, comme on peut particulièrement le constater chez Bellarmin. Le savant controversiste admet l’infaillibilité des jugements de l’Eglise sur la légitimité des conciles approuvés par elle et sur l’authenticité de leurs décrets, Controv., Desacramentis in génère, 1. II, c. xxv, Lyon, 1699, t. ii, col. 175, et sur le fait que tel saint canonisé jouit certainement de la gloire du ciel. De sanctorum bealitudine, 1. I, c. IX, t. I, col. 1452 sq. En même temps Bellarmin reconnaît que les papes r.tienne VI et Sergius III ont erré sur le fait de la validité des ordinations de leur prédécesseur Formose, qu’ils ne considéraient point comme pape légitime. De romano pontifi.ee, 1. IV, c. xiii, col. 747.

Bellarmin admet également que les Pères du VIe concile œcuménique ont pu se tromper sur le fait de l’héréticité personnelle du pape llonorius, si toutefois il est vrai que ce passage des actes du concile soit réellement authentique. De romano ponlifice, I. IV, c. xi, col. 743.

Sans doute, sur cette question des faits dogmatiques, l’on ne rencontre pas, chez Bellarmin, la précision des théologiens postérieurs à la controverse du xviie siècle ; mais, en dehors de ce défaut de terminologie, sa doctrine est bien orthodoxe. De la Servière, La théologie de Bellarmin, Paris, 1908, p. 121 sq. Aussi nous croyons qu’il est inexact de citer Bellarmin, ainsi que le fait M. Turmel, Histoire île la théologie positive du concile de Trente au concile du Vatican, Paris, 1906, p. 80, comme affirmant, sans distinction ni restriction, que l'Église peut errer dans les questions de fait.

Au xviie siècle, à l’occasion de la condamnation portée par Innocent X, le 31 mai 1653, contre cinq propositions extraites de VAuguslinus de Jansénius, la-