Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 5.djvu/354

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

683 ESPRIT-SAINT 684

elle. Celle relation ne peut être que l’identité de nature. Schell remarque que l’Esprit, qui vit dans la Sagesse et qui établit sa communion avec les âmes, ne peut jaillir que de la Sagesse elle-même, parce que la Sagesse divine ne peut rien avoir en elle qui ne lui appartienne. La Sagesse ne pourrait pas prendre possession des âmes et être acceptée par celles-ci, si l’Esprit qui est en elle n’avait pas jailli d’elle-même, n’était pas une émanation de son être, t. ii, p. 47. La Sagesse donc et l’Esprit de la Sagesse représentent, dans ce livre de l’Ancien Testament, deux personnes distinctes, où l’identité de la nature divine n’absorbe pas la personnalité distincte dans l’une et dans l’autre. Et si le Saint-Esprit est distinct de la Sagesse incréée, il est aussi distinct de Dieu le Père, qui l’envoie, qui l’associe à son Verbe dans l’œuvre de la création. Par la parole de Jéhovah, les cieux ont été faits, et toute leur armée par le souflle de sa bouche. Ps. XXXIII, 6. Ce texte, pris au sens littéral, signifie que Dieu crée par la toute-puissance et la sagesse infinie de sa volonté ; mais les Pères et les théologiens y voient une allusion au mystère de la sainte Trinité, à la distinction des trois personnes en Dieu : quamvis autem per verbum Domini et spiritum oris ejus, dit Bellarmin, possit imperium Domini simpliciter accipi, tamen sine dubio Spiritus Sanctus insinuare voluit per hœc verba mysterium sanctissimæ Trinitatis, quod tempore Novi Testamenti revelandum erat. In Psalmos, Ps. xxxii, 6 ; Heinrich, t. iv, p. 115.

Nous croyons inutile de citer ici les autres textes, où la théologie chrétienne découvre des allusions au Saint-Esprit. Ceux que nous avons rapportés suffisent à montrer que la subsistance de la troisième personne en Dieu n’était pas du tout inconnue aux Juifs, au moins de quelques-uns, aux approches de la révélation chrétienne. Cette connaissance a été sans doute tardive, restreinte et progressive. D’abord, obscure et ambiguë, elle s’est éclaircie graduellement ; elle est devenue plus commune, et les Juifs étaient ainsi préparés à la révélation complète du Nouveau Testament ; ils ne pouvaient pas considérer comme une nouveauté doctrinale l’enseignement plus clair et plus parfait du Christ sur l’Esprit de Dieu et sur ses œuvres.

H. Wendt, Die Begriffe Fleisch und Geist im biblischen Sprachgebrauch, Gotha, 1878 ; H. Gunkel, Die Wirkimgen des hl. Geisles nach der populären Anschauung der apostolischen Zeit und der Lehre des Aposlels Paulus, Goettingue, 1809 ; J. F. Wood, The Spirit of God in biblical literature, Londres, 1904 ; Le Saint-Esprit dans l’Ancien Testament, dans le Bulletin de littérature ecclésiastique, Paris, 1901, p. 163-167 ; L. Hackspill, Étude sur le milieu religieux et intellectuel du Nouveau Testament, &4, Le Saint-Esprit, dans la Revue biblique, 1902, t. xi, p. 66-71 ; M. Hetzenauer, Theologia biblica, Fribourg-en-Brisgau, 1908, t. i, p. 481-482 ; J. Lebreton, Les origines du dogme de la Trinité, Paris, 1910, p. 100-110. — Sur la doctrine du Saint-Esprit dans la littérature juive extracanonique, qui sert d’intermédiaire entre les linéaments de l’Ancien Testament et la révélation du Nouveau, voir E. Tisserant, Ascension d’Isaie, Paris, 1909, p. 13-15 ; J. Lebreton, op. cit., p. 137-143. Cf. F. Weber, Judische Théologie auf Grund des Talmud und verwandter Schriften, 2e édit., Leipzig, 1897, p. 190-194.

3o La divinité et la personnalité du Saint-Esprit d’après le Nouveau Testament.

Saint Cyrille de Jérusalem remarque que, lorsqu’il est question du Saint-Esprit, il ne faut pas séparer l’Ancien Testament du Nouveau, il ne faut pas croire que la doctrine contenue dans les deux Testaments ne soit pas la même. Cat., xvi, P. G., t. xxxiii, col. 920-921. L’un et l’autre, déclare saint Athanase, nous attestent avec une merveilleuse concordance que le Saint-Esprit n’est pas une créature, mais une hypostase qui participe à la divinité du Père et du Verbe de Dieu. Epist., I, ad Serapionem, n. 33, P. G., t. xxvi, col. C07. Mais le Nouveau Testament contient, sur la divinité et la personnalité du Saint-Esprit, des témoignages beaucoup plus explicites que ceux du Vieux Testament. Ces témoignages n’ont pas sans doute la valeur d’une révélation de tout point nouvelle, n’introduisent pas dans l’histoire de la vraie religion un élément essentiellement nouveau. À plusieurs reprises, en effet, l’autorité de l’Ancien Testament est invoquée pour rendre témoignage à la personne divine du Saint-Esprit ; mais, dans le Nouveau Testament, nous sommes bien loin des ombres, des incertitudes, des termes ambigus de l’Ancien. L’Esprit-Saint y rayonne, pour ainsi dire, dans la pleine lumière de la divinité.

Dans le Nouveau Testament, nous trouvons à plusieurs reprises les expressions de Paraclet, Esprit de Dieu, Esprit du Père, Esprit du Seigneur, Esprit de Dieu et du Christ, Esprit du Fils de Dieu, Esprit-Saint, Esprit de vérité, etc. Cet Esprit nous est révélé comme agissant dans l’ordre surnaturel et dans l’ordre naturel. Les textes qui se rapportent à sa vie et à son action mettent en évidence qu’il n’est pas uniquement l’être divin dans son ineffable unité et identité de nature, ni l’action de Dieu, l’influence divine sur le monde des êtres créés, ni la grâce dans l’ordre surnaturel, ni la ressemblance morale de la créature avec Dieu. Heinrich, t. iv, p. 235. Dans le Nouveau Testament, l’Esprit-Saint se révèle au cœur et à la pensée chrétienne comme une troisième personne divine, consubstantielle au Père et au Fils ; subsistant avec le Père et le Fils dans la même unité de l’être divin, dans la participation pleine, entière, absolue des mêmes attributs divins ; en d’autres termes, la théologie du Nouveau Testament nous affirme de la manière la plus explicite et la plus absolue la divinité et la personnalité du Saint-Esprit.

1. Divinité du Saint-Esprit.

Les textes du Nouveau Testament, qui prouvent la divinité du Saint-Esprit peuvent se ramener à quatre classes :
a) ceux qui montrent le Saint-Esprit agissant comme Dieu dans la vie de Jésus et des apôtres ;
b) ceux qui montrent le Saint-Esprit agissant comme Dieu dans l’Église primitive et dans la propagation de l’Évangile ;
c) ceux qui montrent le Saint-Esprit agissant comme Dieu dans l’ordre surnaturel par l’élévation des âmes à l’état de grâce et la distribution de ses charismes ;
d) ceux qui appliquent au Saint-Esprit les attributs de Dieu.

a) Textes qui montrent le Saint-Esprit agissant comme Dieu dans la vie de Jésus et des apôtres. — Dans une phrase d’une concision admirable, saint Grégoire de Nazianze décrit l’action constante et variée du Saint-Esprit dans la vie de Jésus. Le Sauveur naît, il annonce sa naissance ; le Sauveur est baptisé, il lui rend témoignage ; le Sauveur est tenté, il l’arrache à la tentation ; le Sauveur opère des miracles, il le pousse à agir ; le Sauveur monte au ciel, il lui succède. Il accomplit toutes ces merveilles parce qu’il est Dieu. Orat., xxxi, n. 29, P. G., t. xxxvi, col. 159. Les Synoptiques et l’Évangile de saint Jean attestent bien des fois l’intervention surnaturelle du Saint-Esprit dans la vie de Jésus. Les auteurs inspirés lui attribuent des œuvres qui supposent en lui la pleine participation de l’être divin. Ils rappellent qu’il a été l’inspirateur des prophéties messianiques, qu’il a poussé les hommes de Dieu à parler du Christ, II Pet., i, 21 ; à raconter au préalable les épisodes de sa passion et de sa vie, Act., i, 16 ; le soulèvement des rois de la terre contre sa céleste royauté. Act., i, 26, 27. L’Esprit donc, écrit Didyme l’Aveugle, qui a parlé par la bouche de saint Paul, qui a engagé l’apôtre à écrire, ne diffère point de celui qui, par la bouche des