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ETHIOPIE (ÉGLISE D’)


prêchée au monde païen et qui, une fois admise, autorisait la révélation des mystères de la foi chrétienne. La conversion d’Aïzanas et de Saïzanas, ou Abraha et Atsabaha, est célébrée par un culte qui leur est rendu en Ethiopie. A Aiba, dans l’Inderta, une grande église monolithe, creusée dans le roc, leur est dédiée. On fait remonter à leur règne la construction de la cathédrale d’Aksum ; et ce ne peut être que dans ce sens que les chroniques impériales attribuent à Abraha et Atsabaha la fondation de cette ville ; car, désormais, Aksum n’a d’importance qu’à cause de ce sanctuaire, Eda-Sion ou Donms Sion. Peut-être saint Frumence n’a-t-il eu qu’à consacrer un temple païen pour le convertir en église. Détruit au xe siècle par les flammes, on ne peut en retrouver des vestiges certains ; mais la conjecture de l’existence d’un ancien temple est fondée sur l’antériorité proliable des obélisques qui, à voir les débris couchés sur le sol, paraissent en avoir formé le cadre. Les carrières où ils se taillaient étaient d’ailleurs en activité sous l’empereur Aïzanas ; les tables ou stèles de ses inscriptions en font foi. Enfin, la Tarika-Nagasl célèbre le roi Kaleb (vi » siècle) comme un génial tailleur de roche ou excavateur. — 2. Du Tigré, le mouvement religieux s’étendit de proche en proche dans l’intérieur de l’empire, au delà du fleuve Tâkâzé, en Lasta, en Amârâ, etc., selon que s’exerçait l’influence directrice du pouvoir impérial sur ces contrées. De fait, le berceau du christianisme dans la principale des îles du lac Sana, au centre de l’emjjire, fut la fameuse kalîs ou Aklîs (i/./.}.r, ’y{it), dont on fait remonter la fondation au ve siècle.

Élut informe et inorganique.

Il serait plus

exact de dire que cette Église est restée constamment à l’état de mission et d’évangélisation, état primordial où elle n’est ni victorieuse, ni dégagée des religions et des mœurs hétérogènes qu’elle combat. Et il est dillicile d’y reconnaître un diocèse constitué, une province ecclésiastique organisée à l’instar de toutes les Églises régionales, soit en Orient, soit en Occident, et jouissant de son self-government. C’est plutôt un vicariat apostolique in parlilnis infidelium.

— 1. L’aspect de mission, c’est-à-dire d’un champ encore à défricher, se retrouve, même aujourd’hui, à peu près comme à l’origine. En elTet, le christianisme cohabite en Ethiopie avec un fond de paganisme idolâtrique ou de fétichisme persistant, partout entremêlé et disputant le pas au vrai Dieu ; avec des mœurs et des coutumes judaïques qui attestent de l’immigration de la religion d’Israël, mais comme simple superfétation, laissant intact le fétichisme préoccui )ant ; enfin avec un culte à base chrétienne mais déformé par des idées et des pratiques superstilicuses. Cf. Piolet, Missions catholiques, l. i. Missions il’Abussinie, par Coulbeaux, p. 3. Aux émanations (le ces miasmes malfaisants qui déteignent sur la vérité et la purcté de l’Évangile en Ethiopie, s’ajoutera encore plus tard l’inflltration envahissante de l’islam. — 2. L’aspect d’un vicariat aposloli([Uc apparaît également dans l’informe et anormale organisation de cette Église ; car si l’on y constate une certaine autonomie dans ses cadres administratifs, c’est une autonomie apparente, liée par un servage radical, originel, qui assujettit tout le fonctionnement de sa vie, la tient rivée à un vasselage qui la prive du droit primordial, essentiel au selj-governmrnl : l’élection dans son sein de son évêque, droit qui est le principe même de l’autonomie.

Cette condition est celle du berceau, du bas âge, comme dit saint Paul, (ial., iv, 1, quanta tempore li ?res pnriHilus est, niixil differl a servo. On la conçoit naturellement dans la période tl’évangélisation et d’éducation chrétienne ; mais elle est surannée, anor male après la conquête de l’Église, surtout quand il s’agit d’un vaste empire bien plus considérable par la puissance et le nombre que le domaine propre du patriarcat d’Alexandrie. Or, cet état primitif et inorganique est demeuré au cours des siècles et demeure encore en Ethiopie. Infériorité humiliante consacrée par un des pseudo-canons de Nicée forgés par les jacobites au vWe siècle et admis par les Abyssins. Ceux-ci, grands naïfs, se plaisent à l’interpréter, non comme une loi d’ostracisme, mais comme un droit près du patriarcat. D’après ce canon -.a) l’évêque chargé de l’Église d’Ethiopie a le titre de catholicos ou métropolitain sur cette province ecclésiastique et les honneurs attachés à cette qualité, à l’instar de l’évêque de Séleucie, primitivement légat du patriarche d’Antioche ou catholicos ; ainsi, ce titre ne représente qu’une délégation patriarcale, et non pas une autorité sui juris ; — b) son caractère de catholicos est essentiellement moindre que celui de Séleucie, car ce n’est pas seulement la consécration épiscopale, mais même l’élection qui appartient uniquement au patriarche d’Alexandrie, à l’exclusion de tout choix par les Éthiopiens. Le métropolitain une fois nommé n’a pas non plus, comme l’évêque de Séleucie, le pouvoir de nommer des évêques suffragants ou auxiliaires dans son immense province ; toutes ces nominations sont réservées au patriarche d’Alexandrie. On en a conclu à l’incligibilité des membres du clergé éthiopien et, de fait, la candidature est réservée aux moines égyptiens de Saint-Macaire. 36 « canon, selon la rédaction d’Antioche ; 47’= selon la rédaction arabe ; 42 « dans la version d’Abraham Ecchellensis. Ludolf, Comm. ad hist.

IL Après le concile de Chalcédolne (451). — 1° Providentielle prcscruation de la défection copte.


Les discordes théologiques, après les condamnations du nestorianisme et de l’eutychianisme, dégénérèrent bientôt en Orient en des luttes acharnées et même sanguinaires, et elles bouleversèrent toutes les Églises, durant le V et le vie siècles, comme pour y préparer l’assujétisscment le plus scrvîle qui allait suivre sous le joug musulman. Durant cette période confuse, que devient la jeune Église d’Ethiopie rivée à la remorque de celle d’Egypte ? Les documents histori ques se réduisent à quelques notes brèves des chronicpies éthiopiennes et à d’autres très peu claires et précises des auteurs grecs et syriens de ces temps troublés. Ce n’est pas chose facile d’y démêler le fond vrai, c’est-à-dire les faits tels qu’ils ont dû avoir lieu, les personnages et les circonstances caractéristiques qui mettent en lumière les conditions de vie de l’œuvre de saint I-’rumencc, à travers les périls qu’elle courut sous les contre-coups inévitables des tempêtes de l’Egypte et de tout le Levant. Providentiellement, ri’^thiopie recevra des soutiens, des défenseurs qui la jiréserveront de la défection et de la révolte des copies et des syriens.

Xouveaux apôtres.

Dans la seconde moitié

(lu V siècle, sous le règne de l’enqîereur d’Ethiopie Al-Ameda (l.’iô-IOô), eut lieu l’arrivée à Aksum de neuf saints de Rome, romawiân, c’est à-dirc roums ou grecs de rcmjiire byzantin, la nouvelle Home. Leurs noms oui été conservés par le culte qui leur est rendu et les églises qui leur sont dédiées dans le Tigraï. aux alentours d’Aksum : abba Michaël dit.ragâwi ou le ieillard, abba Pantaléwon, abba Isaâc dit Garimâ, abba Afsé, abba Cuba, abba Alêf, abba Yeniata ou par abréviation abba Mata, abba Likanos et abba Sâmâ. Les chroniques ajoutent : Ils ont rectifié la foi, nrtaii hagmanota. Tarika-Xagast sur Al-Amêda. I-es églises qui leur sont dédiées ont été élevées aux endroits qu’ils ont sanctifiés jiar leurs vertus et par le zèle avec lequel ils se consacrèrent à