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EUCHARISTIE D’APRÈS LA SAINTE ECRITURE


ce service unique ; le lavement des pieds représente… et le service essentiel de Jésus et son mémorial. » Loisy, op. cit., p. 702-722. Lu bouchée de pain trempe ollerte à Judas et qui fait entrer en lui Satan, xiii, 26-27, est une allusion à la parole de Paul sur le communiant qui mange et boit sa condamnation. Loisy, op. cit., p. 728. L’ordre intimé au traitre de faire vite ce qu’il a à faire est une invitation à distribuer des aumônes et rappelle les actes de charité qui, chez les premiers chrétiens, suivirent la cène. Loisy, op. cit., p. 731. Le nouveau commandement d’amour plusieurs fois inculqué par Jésus au cours du dernier entretien, c’est, avec la recommandation de la charité, le précepte de l’ai/apé, c’est-à-dire de l’agape eucharistique, Loisy, op. cit., p. 736 ; le Paraclet promis, c’est l’Esprit de Jésus qui agit dans le baptême et l’eucharistie, par l’eau et par le sang. Loisy, op. cit., p. 753. « Je suis la vraie vigne, » dit le Sauveur ; cette allégorie correspond à la doctrine de Paul sur le sang du Christ ; l’eucharistie unit à celui sans lequel on ne peut rien, grâce à la présence duquel on peut tout. Loisy, op. cit., p. 762-764 ; Gogucl, op. cit., p. 197. La prière faite au nom du Seigneur et qui sera infaillible, XIV, 12-14, c’est surtout celle qui accompagne la cène, et qui est d’une manière spéciale prononcée en union avec Jésus. Loisy, op. cit., p. 750. L’oraison sacerdotale, xvii, 1-26, que le Sauveur adresse à son Père, en levant les yeux vers le ciel, est euchiu^istique, car elle ressemble étrangement aux prières de la Didaché : « Je me consacre moi-même pour eux, » affirme Jésus, xvii, 19, c’est-à-dire je me voue à la mort en victime expiatoire, « afin qu’ils soient eux aussi consacrés dans la vérité, » ajoutc-t-il, en d’autres termes, afin que le sang du Calvaire et de l’eucharistie les purifie de leurs péchés. Et à la fin de sa prière, le Christ demande à son Père la conservation de l’unité chrétienne, dans l’amour et par le sacrement de la charité. » Loisy, op. cit., p. 815.

Toutes ces conjectures paraissent hardies, la plupart de ces rapprochements ne sont guère justifiés. Quoi qu’il en soit, il est impossible de dégager de ces divers passages un enseignement précis et certain sur l’eucharistie. Nous n’oserions, de l’examen des c. xiii-XVII, tirer qu’une seule conclusion. Les paroles de Jésus à la cène, qui déjà répondent fort bien à la situation et au moment, se comprennent encore mieux si, au cours du dernier repas, lia institué leucharistie, présenté réellement aux siens son corps et son sang. Il donne un suprême témoignage d’amour. Illeur montre qu’une dernière purification est nécessaire. La trahison de Judas et le reniement de Pierre revêtent un caractère de gravité exceptionnelle. Le commandement de la charité ne pouvait être mieux placé : « Aimez-vous comme je vous ai aimés. > Jésus ne laisse pas les disciples orphelins ; lorsque le monde ne le verra plus, ils le verront. Ils connaîtront qu’il est en eux et eux en lui. Il est le cep, ils sont les rameaux, qu’ils lui restent unis. Grâce à lui, ils auront paix, calme du cœur et joie. Ils ne sont plus des serviteurs, mais des amis. Et la magnifique prière du Christ pour son œuvre, ses disciples et son Église acquiert une signification plus haute, se réalise avec une vérité plus saisissante si elle accompagne le don eucharistique. Aussi, les liturgies, ancienne et actuelle, ont-elles cherché dans ce discours d’adieu de Jésus des formules pour encadrer l’acte de la communion.

Les autres textes de l’Évangile de saint Jean, des Épîtrcs, de l’Apocalypse, où on a encore parfois voulu voir des allusions à l’eucharistie, suggèrent des rapprochements qui n’ont pas une grande importance. Il n’est facile ni de prouver ni de déterminer avec précision la portée symbolique que certains critiques attribuent à l’épisode des noces de Cana ; et si l’on cherche

une relation entre ce prodige et la cène, on ne peut dire avec certitude que ce que disaient déjà des Pères de l’Église : la transformation de l’eau aide à comprendre le changement du pain et du vin. L’eau et le sang qui coulent du côté de Jésus crucifié s’expliquent par sa mort et sont présentés avant tout comme un certificat de décès, une réalisation des prophéties, xix, 32-37 ; ceci admis, on peut croire aussi que l’eau et le sang sont des figures ; encore est-il difficile de pénétrer l’intention theologique ou mystique de l’auteur, en cet endroit, comme l’a bien montré Calmes. Op. cit., p. 445. Si toutefois on pense qu’il y a en cet épisode un symbole, on peut rapprocher le sang qui coule du côté de Jésus de celui que le fidèle est invité à recevoir comme un breuvage, vi, 53-56. S. Thomas, In Joa., c. xix, lect. v, n. 4, Opéra, Paris, 1876, t. xx, p. 340.

Du verset de l’Évangile on a rapproché l’aflirmation de la P’-' Épître, v, 6 sq. : « Ils sont trois qui rendent témoignage : l’esprit, l’eau et le sang et ces trois ne font qu’un, » car Jésus « est venu dans l’eau et le sang. » Encore qu’on puisse entendre ce passage du baptême de Jésus, de sa mort et de l’action qu’opéra en lui ou par lui l’Esprit, il n’est pas téméraire de penser qu’il est fait allusion ici aux deux sacrements dont saint Jean a raconté la promesse. Mais vouloir découvrir ici la preuve qu’il y avait en Asie-Mineure, à Éphèse, des chrétiens qui, acceptant le baptême d’eau, ne communiaient pas et ne croyaient pas au Saint-Esprit (ce seraient les disciples d’Apollo dont parlent les Actes, xix, 1 sq.) ; supposer que l’auteur, par son appel au témoignage del’Esprit, montre dans l’eucharistie un rite qui n’a pas été institué par Jésus, mais qui est " né dans l’Église sous l’influence de l’esprit, » Goguel, op. cit., p. 211, c’est mettre dans les textes ce qu’on veut y trouver. L’exégèse fait place à la divination. Voir dans la communion avec Dieu, i, 6, dont parle l’Épître, la participation au sang de Jésus, i, 7, dans la charité ou àyâirr, que recommande continuellement cet écrit la cène chrétienne, et transformer ainsi ce que tout lecteur non prévenu prendrait pour des conseils de morale en « instructions pour l’agape ou repas de communion, » Goguel, loc. cit., c’est jouer sur les mots, sans même respecter leur teneur, car il est parlé d’une manière constante dans l’Épître non seulement de l’agapé ou de l’amour de Jésus pour l’homme, mais de la charité du Père et de Dieu, pour nous et de l’affection que les chrétiens doivent se témoigner les uns aux autres. Enfin, les paroles de l’Apocalypse, iii, 20 : « Voici que je me tiens à la porte et je frappe : si quelqu’un entend ma voix et ouvre j’entrerai chez lui, je soupcrai avec lui et lui avec moi » ont pu être appliquées sans doute à l’eucharistie, mais s’expliquent aussi sans qu’on recoure à cette interprétation.

En résumé, les écrits johanniqucs ne nient pas l’institution par Jésus de l’eucharistie. L’Évangile l’affirme indirectement en rapportant la promesse et, s’il ne relate pas les paroles de la consécration, il présente un contexte qui s’harmonise avec elle.

5. Confirmation de l’interprétation catholique des paroles de la consécration. — Après avoir examiné les formules : Ceci est mon corps, ceci est mon sang, les partisans de la présence réelle présentent d’ordinaire l’argument suivant : Les enseignements que donnent les Évangiles sur la personne de Jésus, sur l’état d’esprit des apôtres, sur les circonstances de la cène, obligent à entendre au sens littéral les afiirmations du Christ. Cette preuve est évidemment de valeur nulle ou peu considérable aux yeux des critiques qui n’admettent ni la divinité de Jésus ni la véracité historique ni le caractère surnaturel des récils évangéliques. Mais le catholique qui ciierche dans l’Écriture