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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 6.2.djvu/455

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HELVÉT1US — HELVIDIUS


toert, etc., Correspondance ; lord Broughan, Voltaire et Rousseau, ouvrage accompagné de lettres inédites de Voltaire, Helvétius, Hunu, etc., Paris, 1845 ; Garât, Mémoires historiques sur le A VIII’siècle et sur Suard, in-8°, Paris, 1821 ; Dictionnaire philosophique, art. Esprit, Homme ; Palissot, Mémoires sur la littérature, art. Helvétius, t. i, Paris, an XI1803 ; Lemontey, Notice sur Cl.- A. Helvétius, dans la Revue encyclopédique, 56e cahier, t. xiv, août 1823 ; Damiron, Mémoire sur Helvétius, lu dans les séances des 6, 13, 20 et 27 novembre 1852 de l’Académie des Sciences morales et politiques, 2e série, t. ix ; Biographie universelle de Michaud, art. Helvétius par Saint-Sarin, presque toujours exact ; A. Keim, Helvétius, sa oie et son œuvre, in-8°, Paris, 1907, et tous les historiens de la littérature ou de la philosophie au xviiie siècle, Bersot, Barni, Cousin, Caro, etc.

C. Constantin.

    1. HELVIDIUS##


HELVIDIUS. Vers la fin du pontificat de saint Damase (366-384), parut à Rome un libelle injurieux pour la foi chrétienne, qui ne laissa pas de provoquer quelque scandale et quelque émoi parmi les fidèles. Ce libelle avait pour auteur Helvidius, homme assez rustre, sans grande culture et d’intelligence bornée. Fut-il, comme le déclare Gennade, De script, eccl., 32, P. L., t. lviii, col. 1077, un disciple d’Auxence, l’évêque arien de Milan, et l’imitateur du sénateur Symmaque, le champion du paganisme expirant ? On ne sait d’où Gennade a tiré ce double renseignement, totalement inconnu à saint Jérôme, à saint Ambroise et à saint Augustin, qui ont condamné les erreurs d’Helvidius. Celui-ci eut-il des disciples ? Le fait est que saint Augustin range les helvidiens parmi les hérétiques. User., 84, P. L., t. xlii, col. 46.

Sur quelques textes de l’Évangile "mal compris et interprétés dans un sens contraire à la tradition chrétienne, et à l’aide de certains passages empruntés à Tertullien et à Victorin de Pettau, Helvidius soutenait dans son libelle que la Vierge Marie, après l’enfantement surnaturel du Sauveur, avait eu de Joseph, son époux, plusieurs enfants, ceux que les évangélistes désignent sous le nom de sœurs et de frères du Seigneur ; il affirmait encore que l’état de virginité ne l’emporte nullement sur celui du mariage.

De telles nouveautés, à une époque où moines et vierges se multipliaient avec l’approbation de l’Église, parurent odieuses et fausses. Sollicité d’y répondre par les chrétiens de Rome, saint Jérôme avait hésité quelque temps, non qu’il fût difficile, dit-il, de faire triompher la vérité sur un adversaire aussi médiocre qu’Helvidius, mais de peur d’élever son contradicteur par une réfutation à l’honneur d’une défaite. Devant le scandale et le trouble causés, il se résigna finalement à porter la cognée aux racines de cet arbre infructueux pour réduire au silence celui qui n’avait jamais appris à parler ; de là son traité De perpétua virginitate beatss Mariée advcrsus Helvidium. P. L., t. xxiii, col. 183-206.

Sur le terrain patristique, Helvidius n’avait trouvé en sa faveur que Tertullien et Victorin de Pettau. Tertullien, il est vrai, s’était prononcé contre la virginité de Marie in partu et post parium ; saint Jérôme se garde bien de le nier, mais il écarte résolument son témoignage comme celui d’un homme qui n’appartenait pas à l’Église. Quant à Victorin, saint Jérôme se contente de faire remarquer qu’il a parlé dans le même sens que les évangélistes des frères du Seigneur sans jamais dire qu’ils fussent les fils de la sainte Vierge. Et sans insister autrement il se contente d’ajouter : Numquid non possem tibi lolam velerum scriptorum seriem commovere : Ignalium, Polycarpum, Irenœum, Justinum martyrem, multosque alios apostolicos et éloquentes viros, qui adversus Ebioncm, et Theodo’.um Byzantium, Valentinum, hœc eadem senlientes, plena sapicnlise volumina conscripserunt ? Quæ si legisses aliquando, plus saperes. De perp. virginitate, 19.

C’est surtout sur le terrain scripturaire que saint Jérôme insiste, suivant pas à pas Helvidius et lui montrant, non parfois sans quelque ironie, combien il avait mal entendu et interprété les textes évangéliques.

Helvidius alléguait d’abord ces deux textes : antequam convenirent et non cognoscebat eam donec pepcrit filium suum primogenitum, Matth., i, 18, 25, pour eu conclure, comme ils semblent le laisser entendre, que Joseph connut Marie après l’enfantement de Jésus. Imperitiæ arguant, an lemerilatis accusent, demande saint Jérôme ? Pas plus antequam que donec ne permet de conclure à des relations conjugales subséquentes entre Joseph et Marie ; c’est là une manière de s’exprimer fréquente dans l’Écriture, et saint Jérôme en rapporte plusieurs exemples, qui équivaut ici à la négation même de tout rapport conjugal dans la suite.

De ce que saint Matthieu et saint Luc qualifient l’enfant Jésus de primogenitus, premier-né, Helvidius, dit saint Jérôme, nilitur approbare primogenitum non posse dici, nisi eum qui habeal et jralres ; sicut unigenitus ille vocatur qui parenlibus solus sit fdius. De perp. virginitate, 10. Il en est bien ainsi dans le langage ordinaire, un premier-né suppose d’autres enfants ; mais tel n’est pas le cas dans le texte sacré. Ici, primogenitus a un sens purement légal, qui s’applique au premier enfant mâle né de la femme, même quand cet enfant est seul, comme c’était le cas pour Jean-Baptiste et pour Jésus ; la naissance d’un tel enfant mâle imposait aux parents l’obligation de le présenter au Seigneur et de le racheter. Dans ce sens, observe saint Jérôme, De perp. virginitate, 12, tout fils, même unique, est primogenitus, et par là même soumis à la loi de la présentation et du rachat aussitôt après sa naissance. Et s’il fallait entendre, comme le prétend Helvidius, ce terme de primogenitus d’un premier-né qui a des frères, l’obligation de la présentation et du rachat ne s’imposerait à lui qu’à la naissance d’un second fils, chose manifestement contraire au texte même de la loi.

Reste la question des sœurs et des frères du Seigneur ; dans quel sens l’entendre ? Dans l’Écriture, on donne ce nom de frères à ceux qui sont unis par les liens de la nature, ou de la parenté, ou de la nationalité, ou de l’affection. Selon la nature, il ne convient qu’à ceux qui sont nés du même père et de la même mère, et tel était le cas pour Pierre et André, pour Jacques et Jean ; selon la parenté, il vise ceux qui sont nés d’un même père, mais non d’une même mère, ou réciproquement, que nous appelons des demi-frères, et tel eût été le cas, si saint Joseph avait eu des enfants d’une première femme, hypothèse parfois émise, mais qui n’est pas celle de spint Jérôme ici ; ou bien encore ceux qui sont nés de proches parents, comme ceux que nous appelons des cousins germains ; ou enfin ceux qui appartiennent à une même famille, comme Abraham et Lot, Laban et Jacob, qui sont parfois appelés frères dans l’Écriture, bien qu’en réalité ils fussent oncle et neveu ; selon la nationalité, tous les juifs sont frères ; et selon l’affection spirituelle, tous les chrétiens sont frères. Quant à ceux que les évangélistes nomment les frères du Seigneur, ce terme ne doit s’entendre ni de la nationalité, ni de l’affection, mais de la nature ou de la parenté. Or, il faut écarter la fraternité selon la nature, parce que nulle part dans l’Évangile les frères du Seigneur ne sont dits fils de Joseph et de la Vierge Marie ; reste donc que Jacques, Joseph, Simon et Jude, en réalité fils d’une sœur de la sainte Vierge, qui s’appelait Marie comme elle, et qui n’est autre que celle qui est désignée sous le nom de Marie de Cléophas ou Marie d’Alphée, étaient les cousins germains de Jésus. Mais, en divergence avec cette solution de saint Jérôme, Hégésippe avait