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.JEROME (SAINT). LETTRES

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mention n. 124, Le travail en somme paraît hâtif ; tant que Jérôme a Eusèbe pour guide, il est relativement exact ; mais sur les auteurs dont Eusèbe n’a pu parler, les renseignements sont moins complets it plus confus, l’ourlant l’auteur, dit Zôckl t. a ouvert une voie nouvelle, et il peut revendiquer pour l’histoire de la littérature théologique le même honneur qu’Eusèbe dans le domaine de l’histoire ecclésiastique.*

3. Trois biographies de solitaires nous ont été laissées par Jérôme, P. L., t. xxiii, col. 17-60 : celle de saint Paul, l’initiateur de la vie érémitique, qui mourut plus que centenaire dans sa caverne, à l’ombre du palmier qui lui avait fourni pendant de longues années de quoi se nourrir et se vêtir ; celle du moine Malchus, que l’on pourrait intituler La chasteté récompensée, fait figure de roman pieux : celle enfin de saint Hilarion, un peu plus étendue que les deux autres et puisée à la fois à une source orale et dans des documents écrits, s’inscrirait dans la liste des récits de voyage à tendance édifiante.

4° Œuvres épislolaires. — On n’aurait qu’une idée très incomplète de l’activité et des mérites littéraires de Jérôme, si l’on ne tenait compte de sa vaste correspondance. Elle a fourni la matière de tout un volume, P. L., t. xxii, sans que nous puissions nous flatter de la posséder complète : Dom De Bruync l’enrichissait naguère de quatre lettres importantes, découvertes par lui dans les bibliothèques d’Espagne et publiées dans la Revue bénédictine, 1910, p. 1-11. Elle est d’ailleurs telle que M. Ebert, op. et loc. cit., y voit le plus ancien et « le vrai modèle du style épistolaire moderne ». « Elle faisait », continue-t-il « les délices du moyen âge ; elle fit aussi le bonheur de la Renaissance. » Les lettres de Jérôme sont à la fois poui le fond, d’une richesse et d’une variété étonnantes, et, pour le style, d’une allègre vivacité, d’une élégante souplesse dont, ni avant ni après, on ne trouve guère d’exemple. On y rencontre de véritables morceaux de choix, des tableaux qui peuvent être proposés a l’imitation des artistes de la plume : tel le récit de la prise de Rome par les Goths, Epist., cxxvii, ad Principiam, 11-13, col. 1093 sq. ; telle la description de l’île déserte où Bonose s’élait retiré pour vivre tout à Dieu, Epist., iii, ad Ruffinum, col. 333, 334. Il est à peine besoin d’ajouter qu’un des principaux avantages de la collection est de nous faire connaître à fond l’âme de Jérôme : elle nous découvre les trésors de sensibilité exquise qui s’unissaient dans cette riche nature a la pénétration de l’intelligence, à la force de la volonté, a un caractère impressionnable, à l’austérité des principes et des mœurs, à la rudesse du langage et des formes dans certaines circonstances. Par les lettres de Jérôme, nous pénétrons mieux le secret de son inlassable activité, le but et la portée de ses grands travaux, exégétiques OU autres, d’autant que beaucoup d’entre elles traitent de questions s’y rattachant directement OU même ont été écrites pour leur servir soit d’introductions soit d’annexés explicatives ou justificatives. Enfin, dans cette correspondance nous possédons les annales d’un demi-siècle, puisqu’elle va de 370 à 419 ; et, selon la remarque de M. Ebert, « nous y trouvons une galerie de portraits îles plus intéressants et un tableau des plus riches au point de vue de la civilisation de cette époque, (.’est tout un défilé de personnages, les uns illustres, les autres

Obscurs, qui liassent devanl nous. Pour ne citer que quelques noms parmi les plus en vue, et sans parler

de ces femmes vaillantes jusqu’à l’héroïsme, qui s’appelaient Paula, Eustochium, Marcella, etc., au nombre des correspondants de Jérôme figuraient le pape Damase, Augustin d’Hippone, Chromatius d’Aquilée, Héliodore, Paulin de Noie. Théophile i Vlexandrie, Mutin. Pammachius.

M. Ebert divise ces lettres en six catégories qu’on se gardera bien toutefois de concevoir à la façon de compartiments étanches. Ce sont d’abord les lettres où Jérôme raconte les faits de sa vie ou de la vie d’autrui ; ensuite les lettres consolat’ires, ainsi qualifiées par l’auteur lui-même, lorsqu’il dit, par exemple : Scripsi consolatoriam (cpistolam) de morte filiæ ad Paulam ; les éloges funèbres ou epitaphia, dont les plus célèbres sont celui de Népotien, Epist., lix. col. 589-002, celui de Paula, Epist., c.vm, col. 878-900. celui de Marcella, Epist., cxxvii, col. 1087-1095 ; lis lettres c.iiiortaloires, comme la xive, col. 347-355, à Héliodore, pour le ramener à la vie monastique, la N.xir’, col. 394-425, à Eustochium, De custodia virginitatis, la lii<", col. 527-540, à Népotien, sur les devoirs de la vie cléricale et monastique, la un 8, col. 540-549 et la Lvme, col. 579-586, toutes deux adressées à Paulin de N’oie, pour le décider à rompre complètement avec le siècle, et tourner toute son application du côté des études script uraires ; la liv « col. 550-560, à Furia. De viduilale servanda, la cxxx c, col. 1107-1121, a Démétriade, De servanda virginitate ; les lettres polémico-apologétiques, dans lesquelles l’auteur se défend OU même attaque ; enfin les lettres didactiques ou doctrinales.

Comme échantillons du genre polémique et apologétique, indiquons, entre autres, les lettres xii, col. 474-476. à Marcella, contre les erreurs de Montan ; xlii, col. 477-478, à la même, contre les Novatiens ; XLviu, col. 493-511, à Pammachius, pour dissiper les malentendus et les griefs nés de la réfutation de Jovinien ; lvii, col. 568-579, au même, exposé de la meilleure manière de traduire, en réponse à des critiques malveillantes ; les cinq lettres à Augustin, mentionnées et caractérisées plus haut, col. 903 ; lxxxi, col. 735-736, à Ru fin, à propos de sa traduction du Tlepl àpxwv ; Lxxxii, col. 736-743, à Théophile d’Alexandrie, pour repousser les accusations de Jean de Jérusalem ; lxxxiv, col. 743-752, à Pammachius et à Océanus, pour combattre les erreurs d’Origène et justifier l’attitude observée antérieurement à son égard.

La catégorie des lettres didactiques est peut-être la plus nombreuse ; du moins est-elle la plus importante. La plupart sont spécifiquement exégétiques, et beaucoup ont l’allure et l’ampleur de petits traités sur des questions bibliques spéciales. Nous ne pouvons songer à les énumérer toutes. Donnons cependant ici une brève indication des principales, qu’on pourra compléter d’après J. Van den Gheyn, art. Jérôme, dans le Dictionnaire de la Bible, t. iii, col. 1313 sq. La lettre xviii, au pape Damase, P. L., t. xxii, coi. 361-376, est consacrée à la vision du Séraphin au charbon ardent, De Seraphim et calculo, Isaïe vi. L’auteur, selon son propre témoignage, nous transmet les explications du Juif qui lui avait appris l’hébreu. Il suit aussi Origène dans l’interprétation allégorique du texte, avec un certain éclectisme toutefois. Ainsi, Origène avait vu dans les deux séraphins qui se tiennent aux deux côtés du trône de Dieu, le Fils et le Saint-Esprit. Cette opinion pouvait être tournée contre la notion catholique de la Trinité divine, c’est-à-dire contre l’égalité parfaite des trois personnes. Jérôme en propose une toute différente, suivant laquelle celui qui est assis sur le trône est le Christ, assiste de deux an^es. Aujourd’hui d’ailleurs, pour apprécier comme il convient cette lettre xviii, il est nécessaire de la comparer à une autre explication de la vision d’Isaïe, que le P. Amelli a retrouvée, en 1900, dans les manuscrits du mont Cassin et qui est attribuée à saint Jérôme. Mise en suspicion par quelques-uns, la découverte « lu p. Amelli a une garantie sérieuse dans la lettre LXXXIV de notre auteur,