Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 9.1.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
11
12
LAURENT D’AOSTE — LAURENT DE SAINTE-THÉRÈSE

de 1847 à 1865, elle fit de rapides progrès. Pendant ces années, le P. Laurent monta dans beaucoup de chaires importantes, prêcha des stations et des missions dans nombre de grandes villes, faisant reparaître avec honneur l’habit de son ordre jadis si populaire, mais disparu depuis plus d’un demi-siècle. En 1867, il rentrait en Savoie, mais bientôt, sur un ordre du pape, il quittait son couvent pour aller prêter son concours à Mgr Jans, évêque d’Aoste. Celui-ci le plaça à la tête de son grand séminaire, le nomma vicaire général honoraire, et l’emmena comme théologien au concile du Vatican. En 1872, il était appelé à Rome pour y remplir les fonctions de procureur général de son ordre, il n’y resta que quelques mois et revint prendre la direction du séminaire d’Aoste. Ses frères ne consentaient pas à se priver de ce sujet remarquable, et au chapitre de 1875, le P. Laurent était élu provincial. Les trois ans de sa charge expirés, l’évêque d’Aoste le rappelait de nouveau, mais en 1880, ses infirmités le forcèrent au repos. Il se retira alors au refuge des pauvres qu’il avait lui-même fondé dans cette ville. C’est là qu’il rendit son âme à Dieu, le 27 septembre.

Membre de la Société géologique de France, de l’Académie de Savoie et de celle d’Aoste, dont il était président depuis 1868, le P. Laurent a publié les ouvrages suivants : Les ombres de Descartes, Kant et Jouffroy, à M. Cousin, in-12, Lyon, 1844, fiction dans laquelle il suppose que ces personnages apparaissent à M. Cousin, alors grand maître de l’Université, et lui reprochent ses erreurs philosophiques ; Manuel du tiers ordre de saint François, in-18, Lyon, 1848 ; 3e édition, 1850, 1855, 1865 ; Dissertation sur l’indulgence de la Portioncule, in-12, Lyon, 1850 ; Bruges, 1854 ; Paris, 1864, traduit en flamand sous ce titre : Verhandelung over der oflaat van Portiuncula, Bruges, 1854 ; Études géologiques, philologiques et scripturales sur la cosmogonie de Moïse, in-8° Paris, 1863 ; Conférences ecclésiastiques prêchées dans un grand nombre de diocèses à propos des retraites pastorales, 2 in-8°, Paris, Bruxelles, Genève, 1881 ; commencée par l’auteur, cette édition fut achevée par l’abbé Fenoil, prêtre du diocèse d’Aoste. On lui attribue encore un Traité élémentaire de géologie.

En 1861 le P. Laurent commençait la publication des Annales franciscaines, revue mensuelle destinée aux tertiaires de saint François ; c’était pour eux, comme pour ses confrères qu’il éditait la Vie du P. Ange de Joyeuse, in-12, Paris, 1863, ouvrage dénué de critique historique et Le bienheureux Laurent de Brindes, général de l’ordre des fr. min. capucins, Paris, 1867 ; ces deux biographies furent traduites en italien, Storia del P. Angelo da Giojosa, Milan, 1890 ; Vita di S. Lorenzo da Brindisi, Rome, 1881.

Annales franciscaines, t. xii ; E. Duc, Le clergé d’Aoste de 1800 à 1870 ; Eugène de Bellevaux, Nécrologe et annales biographiques des frères mineurs capucins de la province de Savoie, Chambéry, 1902.

P. Édouard d’Alençon.

3. LAURENT DE PARIS revêtit l’habit des frères mineurs capucins dans les premières années de leur établissement en France, le 7 octobre 1581. De bonne heure nous le voyons entrer dans les dignités et jusqu’à la fin de sa vie il était gardien, définiteur et custode. Il fut en outre lecteur en philosophie et en 1611, après que le pape Paul V eut ordonné dans tous les ordres religieux l’étude de l’hébreu, du grec et de l’arabe, le P. Laurent fut le premier chargé du cours d’hébreu. Dans la préface de son Traité de l’amour de Dieu, saint François de Sales, passant en revue les ouvrages sur le même sujet, écrivait : « Nous voyons de plus un grand et magnifique palais que le R. Père Laurent de Paris, prédicateur de l’ordre des capucins, bastit à l’honneur de l’amour divin, lequel estant achevé sera un cours accompli de la science de bien aimer. » Quand l’évêque de Genève écrivait ces lignes, le P. Laurent avait déjà publié Le palais d’amour divin de Jésus et de l’âme chrétienne, où toute personne tant religieuse que séculière peut apprendre à aimer Dieu en vérité, in-4°, Paris, 1602, 1614. Ce tome premier devait être suivi de la Salle de l’amour divin en deux tomes et du Cabinet de l’amour divin en un tome. Ces ouvrages ne furent jamais publiés par l’auteur qui donna seulement : Les tapisseries du divin amour ou la Passion de Noire-Seigneur Jésus-Christ Rédempteur des humains, Fils de Dieu vivant, selon la vérité de l’histoire, in-4°, Paris, 1631. La même année le P. Laurent, mourait au couvent de Meudon, où il était gardien, le 12 avril, sans avoir achevé ce dernier ouvrage. Loué par saint François de Sales, le Palais de l’amour divin l’a été également par le docte et pieux cardinal Bona, Via compendii ad Deum, c. xx, De amore Dei, 4 ; néanmoins ces livres, aujourd’hui fort rares, sont d’une lecture difficile et le style de l’auteur, prétentieux et ampoulé, est loin d’avoir la grâce qui caractérise les bons écrivains de son époque. On y rencontre cependant de fort belles pages sur le Sacré-Cœur, qui font placer à bon droit le P. Laurent parmi les précurseurs de sainte Marguerite-Marie.

Bernard de Bologne, Bibliotheca scriptorum ord. min. capuccinorum, Venise, 1747 ; Annales franciscaines, juin 1891, t. xvii, p. 433 sq.

P. Édouard d’Alençon.

4. LAURENT DE SAINTE-THÉRÈSE, carme déchaussé et théologien du xviie siècle. — Fils unique de parents nobles et catholiques, il naquit à Drogheda (Irlande), en 1626. Son père, chef de milice, ayant été tué, toute l’éducation de l’enfant retomba sur la pieuse veuve ; celle-ci l’éleva si bien dans la crainte de Dieu que Laurent, nonobstant sa grande jeunesse et la persécution religieuse, se joignit aux carmes déchaussés, qui, traqués par les fanatiques adeptes de Cromwell, habitaient la moitié de sa maison maternelle. Ayant prononcé ses vœux, il fut envoyé en France pour faire ses études philosophiques et théologiques, études qu’il acheva à Rome au séminaire des Missions, alors séminaire de Saint-Paul ou de la Victoire ; il s’y préparait avec ardeur à la vie de missionnaire, objet de tous ses vœux. Au chapitre général de 1650, il soutint avec grand succès des thèses publiques et se gagna tous les cœurs autant par son humilité que par la perspicacité et vivacité de son intelligence. Le nouveau général, François du Saint-Sacrement, désirant doter sa province de Lombardie d’un sujet aussi remarquable, le nomma professeur de théologie au collège de Bologne. Laurent s’acquitta si parfaitement de son lectorat que les supérieurs le conservèrent dans sa charge tant à Bologne, qu’à Crémone ; et, malgré sa jeunesse, ils l’élurent définiteur provincial. Afin de mettre un terme aux revendications de la province romaine sur le séminaire des Missions, d’accord avec la Sacrée Congrégation de la Propagande, le général Dominique de la Très-Sainte-Trinité, de la province de Paris, abandonna en 1662 à la province romaine le séminaire de Saint-Paul ou de la Victoire ; il décida de transférer ailleurs le séminaires des Missions et de ne le faire dépendre que du général, du définitoire général et de la Sacrée Congrégation de la Propagande. Le cardinal Maidalchi, abbé commendataire du monastère de Saint-Pancrace-hors-les-Murs, fit don à l’ordre des carmes déchaussés de l’église Saint-Pancrace, du monastère et des terres adjacentes, donation qui fut confirmée par une bulle pontificale, le 1er mars 1662. Dès le 6 du même mois eut lieu la prise de possession. Le général soucieux du progrès du nouveau séminaire, jeta les yeux sur le jeune Laurent de Sainte-Thérèse, l’agrégea