Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/399

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En suivant la principale rue de Thonon j’ai aperçu une petite boutique de libraire, dans l’étalage de laquelle se faisait remarquer un mince in-12 vert, dont le titre a suffi pour fixer mon attention :

Pèlerinage aux Allinges en 1843, par l’ermite de Bange[1].

Il va sans dire que j’ai acheté cet ouvrage, car venant d’explorer la noble ruine des Allinges, tout ce qui traite de ce sujet devait naturellement m’intéresser, puis il fallait saisir l’occasion qui se présentait d’apprécier sur un échantillon la littérature savoisienne, la littérature permise, bien pensante, orthodoxe, ou, en d’autres termes, la littérature fausse, plate, timide, niaise et béate ;— j’allais faire cette étude moyennant deux francs.

Qu’est-ce après tout que 96 pages d’inepties pour qui lit vite !

Ce livre, pensai-je en l’empochant, ne peut être qu’une production de sacristie, une œuvre de tonsuré... qu’importe ! voyons... il n’est pas de mauvais écrit qui ne contienne quelque chose de bon, de profitable, d’utile.

Là-dessus je me rendis à la promenade de la ville qui touche l’Hôtel de l’Europe, c’est une terrasse plantée de gros arbres et fort élevée au-dessus du bas quartier, misérable réunion de chaumières que l’on nomme Rive,

  1. Annecy, Joseph Prévost, libraire-éditeur, 1844.