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Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/86

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s’anéantir tout ce qui pourrait témoigner du rang primitif ; une fois tombé bas, on ne doit guère espérer de remonter haut ; je me suis étonné — et tu aurais fait comme moi assurément — de voir un blason au front d’une chaumière, un signe aristocratique sur une demeure d’apparence plus que médiocre, et cela dans un pays démocratique ! — Quel singulier amalgame, quel antithétique assemblage ! Cependant il n’y a pas dans ceci que de l’ostentation ridicule et déplacée ; je comprends l’utilité de cette peinture et j’approuve jusqu’à un certain point celui des Ducret qui en conçut l’idée et la fit mettre à exécution. Voici la leçon qu’il voulait transmettre à sa postérité :

« Rappelez-vous votre origine, mes enfants, n’en perdez jamais la mémoire ; tachez de remonter les échelons de l’échelle sociale et de reprendre la place d’où la fortune vous a précipités. Conservez en vous cette fierté légitime, cette estime secrète de vous-même, ce sentiment de votre dignité qui vous détourneront de tout acte mauvais ou simplement répréhensible. Relevez notre race tombée, mais qui, moralement, n’a pas dérogé. — Apprenez ou n’oubliez jamais que noblesse oblige. »

Le jeune Albert m’a fait ses adieux et a reçu les miens au sortir de Saint-Sulpice ; nous nous tournons le dos maintenant, il marche vers Lausanne et moi vers