Page:Alfred de Vigny - Cinq-Mars, Lévy, 1863.djvu/72

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Ils répondirent qu’on n’entendait plus rien.

— C’est bon, c’est bon ! cria l’abbé, ne faites plus de bruit.

Il referma la fenêtre et mit ses deux mains sur ses yeux.

— Ah ! quel cri ! mon enfant, dit-il (et il était fort pâle), quel cri ! il m’a percé l’âme ; c’est quelque malheur. Ah ! mon Dieu ! il m’a troublé, je ne puis plus continuer à vous parler. Faut-il que je l’aie entendu quand je vous parlais de votre destinée ! Mon cher enfant, que Dieu vous bénisse ! Mettez-vous à genoux.

Cinq-Mars fit ce qu’il voulait, et fut averti par un baiser sur ses cheveux que le vieillard l’avait béni, et le relevait en disant :

— Allez vite, mon ami, l’heure s’avance ; on pourrait vous trouver avec moi, partez ; laissez vos gens et vos chevaux ici ; enveloppez-vous dans un manteau, et partez. J’ai beaucoup à écrire avant l’heure où l’obscurité me permettra de prendre la route d’Italie. Ils s’embrassèrent une seconde fois en se promettant des lettres, et Henry s’éloigna. L’abbé, le suivant encore des yeux par la fenêtre, lui cria : — Soyez bien sage, quelque chose qui arrive ; et lui envoya encore une fois sa bénédiction paternelle en disant : — Pauvre enfant !