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hara-kiri

mées des bosquets, en regardant rêveusement les touffes de beaux lis bleus sur les toits des maisonnettes et, derrière, la tête perdue dans les amoncellements de vapeurs, les flancs majestueux aux couleurs magnifiquement fondues de la montagne sacrée.

Un seul souci refusait de s’envoler avec les petits nuages bleus qui s’échappaient de la pipe de Taïko-Naga. Le fils de ses entrailles, ce Fidé qui étudiait à Kioto et qu’il chérissait de toutes les forces de son âme, paraissait suivre le courant général et incliner vers les idées nouvelles. Même, la dernière fois qu’il était venu passer quelques jours à Mionoska, il avait manifesté le désir d’aller à Yedo où, disait-il, il devenait indispensable d’achever ses études.

Tout de suite, le vieux samouraï repoussa cette proposition avec colère. Aller à Yedo, la ville semi-européenne, la cité profanée, où il avait résolu, pour son compte, de ne plus retourner !… Jamais ! Mais maintenant, il se demandait avec anxiété s’il n’avait pas eu tort, et s’il ne mettait pas son fils dans une situation inférieure à celle de ses camarades, en lui refusant ce complément d’instruction, peut-être utile, après tout. L’affection paternelle et la vieille haine du samouraï pour l’étranger se livraient combat dans sa tête. Enfin, l’amour l’emporta. Il l’aimait tant, ce Fidé, ce fils unique, cet héritier d’un nom il-