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l’ossature, ou fixés en des poses ridiculement théâtrales. De l’Exposition entière ressortaient une horreur du naturel, une absence complète d’originalité.

— C’est du grand art, remarqua Valterre, mais il faut avouer que c’est crânement embêtant. Pourquoi diable pas un de ces tailleurs de pierre ne s’avise-t-il de pétrir une femme ou un homme comme nous… On ne se promène généralement pas tout nu sur les boulevards, que je sache.

— Eh ! vous allez bien, vous, répondit ironiquement Sosthène Poix… Mon cher vicomte, vous n’entendez absolument rien à l’art. L’art, c’est la représentation du beau. Or, le beau, c’est, pour la femme, la Vénus de Milo, et, pour l’homme, l’Apollon du Belvédère. D’où il suit qu’il faut copier ces deux machines-là, faire des bonshommes nus, courir après l’idéal. C’est ce à quoi on s’applique consciencieusement à l’École, depuis qu’elle est créée. Voilà pourquoi nos sculpteurs qui reproduisent merveilleusement des Grecs et des Romains qu’ils n’ont jamais vus, ne sont pas capables de mettre sur pied un homme ou une femme de leur temps… Ça ne serait pas de l’art, ça. Voilà pourquoi vous n’êtes qu’un Philistin… Admirons le grand art… Le grand art, tenez, c’est cette idée sublime.

Il montrait un Ulysse s’accrochant aux rochers.