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hara-kiri

contrées lointaines le fils de Taïko-Naga. En l’apercevant, le vieillard lança un regard brillant de haine farouche, et des larmes lui vinrent aux yeux. Ému, le cœur torturé par ses craintes, il adressa à son fils une dernière adjuration.

Se sentant gagner par l’attendrissement, il se laissa tomber sur la natte de l’hôtel où l’on était arrivé, et sans vouloir rien manger, sans chercher un sommeil impossible, il se mit à parler au jeune homme du passé, de vieux souvenirs de son enfance, qui, à mesure, l’attendrissaient davantage, et lui mettaient dans la voix plus d’abandon. Fidé, pleurant lui-même d’émotion, rassurait le vieillard, lui prodiguait des caresses enfantines, lui causant, avec des intonations douces et persuasives comme autrefois, lorsque, bambin capricieux et gâté, il désirait obtenir un jouet, une tortue aux pattes branlantes, une poupée masquée, un cerf-volant ou un petit feu d’artifice.

Taïko-Naga, toujours soupçonneux, feignait de le croire, pour ne pas lui donner le souci de ses craintes.

La nuit passa ainsi.

Le jour apparaissait à l’horizon infini, dissipant la brume grisâtre, donnant aux objets noyés dans les demi-teintes des aspects indécis qui se précisaient peu à peu, jusqu’à devenir bien distincts.

L’activité des préparatifs de départ régnait sur