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hara-kiri

Instruite par son premier échec, elle n’aborda pas de front la question et laissa deviner son plan à Estourbiac, qui jugea prudent de s’en tenir aux réponses évasives.

L’idée de voir entrer sa maîtresse au théâtre ne souriait point à Fidé : jaloux déjà des amis avec lesquels elle soupait en sa présence, il ne pouvait s’habituer à la pensée qu’elle mènerait la vie lâchée des coulisses, que ses camarades et, qui sait ? peut-être d’autres, pourraient la contempler là, demi nue, que chaque soir enfin, une salle entière recueillerait ses paroles, ses larmes et ses sourires. Il trouvait rares les moments où elle lui appartenait, à lui seul : que serait-ce donc alors ?

Contre l’ordinaire, il laissa longtemps Juliette lancer des allusions répétées à son désir de monter sur les planches. C’était la première fois qu’il ne courait pas avec empressement au-devant de ses caprices. Lasse de tergiverser, elle exposa un jour clairement son idée. Ils eurent une explication assez vive, puis, comme toujours, Fidé céda. Il promit de faire des démarches. Par exemple, il ne déploya qu’une médiocre activité. C’est alors que progressivement, avec une prudence de chatte, Juliette hasarda le nom d’Estourbiac, répétant tenacement cette phrase obsédante :

— Si Fracasse pouvait !