Page:Allais - À l’œil.djvu/20

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qui semble une coulée de rubis en fusion, pendant qu’un cruel païen, vêtu d’un vert exorbitant, attise le feu avec un acharnement coupable. Sur le saphir délicieusement pâle du firmament s’enlève le front radieux de la martyre et de tout son beau visage émane une mansuétude tendre et résignée qui excitait en moi la plus intime émotion.

Tout de suite, je ne sais pourquoi, je m’étais pris pour sainte Christine d’une affection violente et presque maladive, au point d’attendre fiévreusement le dimanche et de rêver une vengeance éclatante contre l’affreux homme vert qui brûlait ma pauvre aimée.

Sous le vitrail, c’était l’orgue.

En face, de l’autre côté de l’autel, le banc de ma tante où j’assistais aux offices avec mes petites cousines.

Un vieil aveugle tenait l’orgue et en tirait des sons d’une harmonie mélancolique que ne chasseront jamais de mon souvenir les plus fameux orchestres.

Pauvre vieil organiste, j’adorais sa musique et, pour moi, ses grands morceaux n’étaient jamais trop longs.

Un dimanche, — oh ! je me le rappelle comme si j’y étais encore, — quand retentit la sonnette de l’enfant de chœur pour l’élévation, tous les