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demanda-t-on de marcher au pas et de garder les rangs ? L’homme, portant sur sa tête le poids de la nécessité, fut forcé et non injuste. Et par un effet merveilleux de l’harmonie et de la bonté qui règnent ici bas, dès que l’homme est dans une situation supportable, il l’aime et s’y habitue ; il en saisit les douceurs, il y met des beautés. Ainsi, quand la société se trouva si inégalement partagée, le peuple attacha un devoir religieux à son obéissance ; les chefs se chargèrent des vertus, et leur position, agrandissant leur ame et leur esprit, forma cette aristocratie chevaleresque à laquelle le monde moderne dut sa valeur, son élégance et son éclat.

Comme en Orient, la richesse et d’autres causes produisirent enfin des monarchies considérables ; pour plus de sûreté on fit quelques trônes héréditaires : l’usurpation en enleva plusieurs ; la pauvreté en maintint quelques autres électifs : les individualités perdirent leur première influence.

Cependant des causes de vitalité firent différer beaucoup l’Occident de l’Orient et le portèrent au dessus de toute comparaison : au lieu d’un climat énervant et des mille délices qui précipitèrent l’Orient civilisé, l’Europe, sous une autre latitude, eut partout un climat supportable, délicieux au midi, rude au nord, qui, par des moyens différens, développa également les forces ; la division du terrain, la proportion des empires, les lois féodales, secondèrent l’activité ; une religion fondée sur l’ancienne sagesse orientale, mais devenue si différente de l’Orient que l’Orient ne put la supporter, développa les esprits par ses livres admirables, depuis le Pentateuque jusqu’aux apôtres ; les plus grands hommes s’y laissèrent prendre ; elle disciplina les barbares avant que l’Occident, retrouvant les richesses originelles qu’il possédait dans son sein, ne s’appuyât de nouveau sur les lettres grecques et romaines. Tant de causes hâtè-