Page:Allart - Les Enchantements de Prudence.djvu/81

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Il reçut ma réponse, il écrivit :

« Tout rempli du bonheur qu’elle me donne, je m’assois pour y répondre. Je ne vis pas au jour le jour aujourd’hui, mais de lettre en lettre ; il y a des moments de silence où je suis mort. Votre main vient alors me retirer de l’état où je suis plongé : les forces de mon âme prosternées se raniment et se relèvent ; je vis ! et je reconnais la puissante influence qui me fait revivre, influence douce et divine : si elle venait à se retirer un jour, il ne resterait plus rien pour moi sur la terre. » Les impressions heureuses maintiennent, en dépit de quelques craintes passagères, toute l’énergie de leur empile ; elles. sont mêlées à des jouissances plus grandes encore, jouissances qui défient toute expression, et que,, mille fois trop heureux d’éprouver, il faut se résigner à ne pas dire.

Telle est la loi de cette passion inconcevable qui remue la partie la plus secrète de mon existence, qui ébranle mon âme dans ses profondeurs, qui signale son approche comme celle d’une vie nouvelle, réunissant sensation sur sensation, impression sur impression, émotion sur émotion, sans relâche et sans repos., me faisant vivre dans un instant plus que je n’ai vécu dans des années, me forçant à douter de mon existence avant de l’avoir connue, en un mot, reléguant impérieusement le passé au néant, en m’ordonnant de ne croire à l’avenir qu’autant que je crois à elle.

» Les yeux fixés sur cet avenir, l’âme remplie de cette religion, je m’abandonne à cette espérance qui colore le moment actuel, qui, d’une main si puissante, adoucit ou