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des barricades au bagne

Las d’attendre, mon frère revint rue Levert, suivi par les policiers et, moins d’un quart d’heure après, notre demeure se trouvait cernée par une troupe de soldats et de sergents de ville. Notre surprise ne fut pas trop grande lorsque, violemment, on heurta à la porte d’entrée ; nous comprîmes de quoi il s’agissait et nous sautâmes sur nos revolvers. Mais le malheur voulut que M. Gomot et le jeune fils de mon frère — par suite d’une visite inattendue — couchassent cette nuit-là dans le petit logement que nous occupions, et M. Gomot, devinant nos intentions, nous supplia de ne pas résister, de ne pas mettre en périt l’enfant et lui ; que, du reste, tout s’arrangerait.

Nous étions ses hôtes et nous n’avions pas le droit de i demeurer sourds à ses prières : nous fîmes disparaître nos armes et nous l’invitâmes à aller ouvrir la porte. Ce qu’il se hâta de faire.

En moins d’une minute, en une ruée, soldats et policiers envahirent le local et s’emparèrent de nous. Contrairement à son attente, M. Gomot fut aussi appréhendé ; seul, le jeune enfant de mon frère put se rendre chez Mme Gomot.

Le poste de police de la rue Julien-Lacroix, déjà rempli de prisonniers, devait marquer notre premier pas dans cette voie douloureuse qui devait mener mon frère à la presqu’île Ducos et moi à l’Ile Nou, l’enfer néo-calédonien.