Page:Alletz - De la démocratie nouvelle, ou des mœurs et de la puissance des classes moyennes en France - tome II.djvu/128

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tous les dangers de la solitude, au milieu d’une foule étrangère ; les mœurs du foyer domestique perdent leur sainte autorité ; l’ardeur de l’étude, les espérances de l’ambition, la poursuite de la fortune, la recherche de la gloire, font battre, dans un même lieu, des milliers de cœurs où ces passions se redoublent, mêlées à l’inexpérience, aux illusions et au feu de la jeunesse.

On se dispute l’espace : les imaginations, pressées les unes contre les autres, s’enflamment par le seul effet du voisinage ; il se trouve dans Paris un superflu dangereux d’efforts et de pensées, tandis que les provinces, dépourvues de moyens d’instruction, condamnées à une triste et solitaire obscurité, renferment une autre partie de la jeunesse qui, trop pauvre pour venir participer aux grandes études de Paris, s’agite et se désespère dans une oisiveté corruptrice.

La répartition du haut enseignement offre donc de graves dangers à l’endroit de son inégalité. On ne saurait trop se hâter de faire tourner la lumière dans un plus vaste orbite. Paris est le gouffre, la tête énorme, l’abîme immense, le réservoir unique, le foyer dévorant, le cratère. Mettez la France dans une ville, faites-la resplendir de mille feux éblouissants, au risque même de la voir s’embraser de ses propres clartés, et laissez le reste du pays dans la nuit, la