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Page:Alletz - Discours sur la république de Venise.djvu/4

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la pêche et du commerce. Telle est l’origine de la ville et république de Venise. La durée d’un siècle suffit à ses habitants pour devenir un peuple aisé, industrieux et redoutable à ses voisins. Venise, bornée au midi par le Pô et Ravennes, du côté de l’orient regardait l’Adriatique. Ses maisons, pareilles à des nids d’oiseaux de mer, reposaient sur des lies coupées par des canaux. La verdure y était inconnue ; on n’y voyait d’autre mouvement que celui des barques sillonnant les lagunes ; et ce mouvement était sans bruit. Déjà le silence qui régnait dans Venise préparait au mystère qu’elle mit plus tard dans sa politique.

Les Vénitiens fournissaient alors des navires au roi des Ostrogoths pour approvisionner Ravennes de vin et d’huile. Leur ville devint l’entrepôt naturel du commerce entre l’Italie septentrionale et les ports de la Méditerranée. Placés à l’embouchure du Pô et de l’Adige, ils s’étaient assuré la libre navigation sur ces fleuves, et communiquaient vite et à peu de frais avec le nord de l’Italie, la Hongrie et l’Allemagne. Ils durent une grande partie de leur puissance à cette franchise de navigation sur toutes les rivières, telles que le Lizonza, la Livenza, la Piave, le Musone, la Brenta, qui courent vers le golfe et se rassemblent autour de l’Adige et du Pô, vers l’endroit où ces deux fleuves se jettent dans la mer. La liberté dont ils jouissaient, au milieu de leurs lagunes, pendant que l’Italie était en feu, leur donna le temps d’amasser des forces pour se défendre. Mais ce qui assurait leur indépendance faisait aussi, dans le principe, leur extrême pauvreté. Isolés au milieu des flots, éloignés de toutes villes, privés de secours et n’ayant pour subsister que le produit de leurs filets, il leur fallut un prodigieux effort pour vaincre leur misère et arracher le nécessaire. Mais la fortune souffre violence, et la nécessité incite l’esprit