Page:Alletz - Harmonies de l’intelligence humaine, tome 2.djvu/327

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

322


nous permet seulement d’entrevoir devient une image mobile de l’infini (1).

Aussi perd-on, en voyage, la mesure des heures. Leur durée change au gré de nos sensations ; nous veillons la nuit ou dormons le jour ; les instants coulent trop vite ou trop lentement ; la quantité d’objets qui sollicitent nos regards et qui rompent l’équilibre de nos souvenirs, rendent impossible toute appréciation du temps, et la vie n’a plus son balancier (2).

Combien s’offrent à nos yeux de tableaux supérieurs aux plus admirables qu’aient produits les plus grands peintres ! Ils semblaient composés pour nous ; leur beauté dépendait d’une certaine lumière, d’une certaine heure, d’une certaine position. On ne les retrouvera plus ; ils sont détruits à jamais. Quels levers du jour sur les montagnes, quels couchers de soleil sur la mer, quelles nuits argentées dans les bois, quels effets de la transparence des lacs, quels clochers gothiques dans le lointain, quelle grandeur dans les landes désertes, quelles menaces de rocs prêts à crouler ! Tantôt c’était le beau qui nous souriait avec harmonie, tantôt le sublime qui nous subjuguait avec majesté (3).

(1) Idée d’infini. (2) Idée d’éternité. (3) Idée de beauté.