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nous qui, emportés par le fleuve du temps, sommes trop loin d’eux pour les juger.

Le sentiment qu’éveille l’image de la vieillesse a quelque chose de saint et de réfléchi. Non-seulement elle nous offre l’achèvement du sort de l’homme, une victoire sur les maux de toute espèce qui abrègent la vie l’accomplissement des dernières lois du créateur sur son plus noble ouvrage ; mais elle nous met en présence d’un auguste exilé qui est prêt à porter au ciel un message de cette terre. Le vieillard est sur la limite de deux mondes : nourri dans les secrets du nôtre, il sera demain initié à ceux de l’éternité (1).

L’une des plus tristes découvertes que l’on fasse en avançant en âge, c’est que vous ne pouvez plus vous fier à votre mémoire qui s’obscurcit, à votre entendement qui défaille, à votre esprit dont la pénétration s’émousse. Notre âme est désarmée. Nous appelons nos souvenirs, ils ne répondent pas ; nous cherchons à lier nos idées, leur chaîne rompue nous échappe ; il faut suivre un raisonnement, c’est un dédale où nous nous perdons démêler une affaire les fils s’embarrassent ; saisir les nuances d’un objet, tout se confond et ne revêt qu’une même teinte. N’en concluons rien contre l’essence spirituelle et indéfectible de l’âme. Les

(1) Idée de vérité.