Page:Allier - Le protestantisme au Japon, 1908.djvu/47

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sation de mon idée »[1] Mais il est clair que l’on ne se rend bien compte des états de ce genre qu’après les avoir traversés. Ceux qui en étaient là ne s’analysaient pas eux-mêmes avec précision. Il était souvent difficile aux missionnaires de se reconnaître dans le fouillis des sentiments contradictoires qu’ils constataient et de distinguer ceux qui étaient superficiels et passagers ou profonds et durables. Pour un Utchimura qui devait approfondir ses convictions, combien n’en seraient jamais capables ?

Aussi bien était-il visible qu’il n’y avait pas lieu de compter sur le mouvement provoqué par M. Foukouzawa. Le journaliste lui-même n’y tenait pas beaucoup. À maintes reprises, auparavant, il avait manifesté son antipathie pour le christianisme pris en lui-même. Il le recommandait maintenant comme on prône un moyen provisoire de progrès. Mais il ne retirait aucune des critiques sarcastiques qu’il avait, naguère encore, dirigées contre lui. Il avait poursuivi de ses railleries la ligue de Hanaoka-Yama, qu’il appelait la « bande de Kumamoto ». Il avait dénoncé ces enthousiastes qui s’érigeaient en « directeurs des intelligences », en « pourvoyeurs de bonheur céleste », en « agence de moralité ». Il les avait traités de « mendiants qui savent lire et écrire » et les avait accusés de « vivre aux crochets des étrangers rouges ». Cela ne lui donnait pas une grande autorité pour prêcher l’adhésion au protestantisme. Il continuait, d’ailleurs, à définir la religion — et il

  1. Voir plus loin, p. 246.