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AGAVE, CANNE A SUCRE

uniquement agricoles et économiques ; mais pour l’habitation primitive de l’espèce, qui nous intéresse particulièrement, c’est le meilleur guide, et les faits observés depuis quarante ans appuient, en général, ou confirment ses opinions.

La Canne à sucre est cultivée aujourd’hui dans toutes les régions chaudes du globe, mais il est démontré par une foule de témoignages historiques qu’elle a été employée d’abord dans l’Asie méridionale, d’où elle s’est répandue en Afrique et plus tard en en Amérique. La question est donc de savoir dans quelles parties du continent, ou des îles du midi de l’Asie, la plante existe ou existait quand on a commencé à s’en servir. Ritter a procédé selon les bonnes méthodes pour arriver à une solution.

Il note d’abord que toutes les espèces connues à l’état sauvage et rapportées, avec sûreté, au genre Saccharum, croissent dans l’Inde, excepté une qui est en Égypte[1]. On a décrit depuis cinq espèces des îles de Java, la Nouvelle-Guinée, Timor ou les Philippines[2]. La probabilité est toute en faveur de l’origine en Asie si l’on part des données de la géographie botanique.

Malheureusement aucun botaniste n’avait trouvé à l’époque de Ritter et n’a encore trouvé le Saccharum officinarum sauvage dans l’Inde, dans les pays adjacents ou dans l’Archipel au midi de l’Asie. Tous les auteurs anglo-indiens, Roxburgh, Wallich, Royle, etc., et plus récemment Aitchison[3] ne mentionnent la plante que comme cultivée. Roxburgh, qui a herborisé si longtemps dans l’Inde, dit expressément : « Where wild I do not know. » La famille des Graminées n’a pas encore paru dans la flore de sir J. Hooker. Pour l’île de Ceylan, Thwaites a si peu trouvé l’espèce spontanée qu’il ne l’énumère pas même comme plante cultivée[4]. Rumphius, qui a décrit soigneusement la culture dans les possessions hollandaises, ne dit rien sur la patrie de l’espèce. Miquel, Hasskarl, Blanco (Fl. Filip.) ne parlent d’aucun échantillon sauvage dans les îles de Sumatra, Java ou les Philippines. Grawfurd aurait voulu en découvrir et n’y est pas parvenu[5]. Lors du voyage de Cook, Forster ne trouva la Canne à sucre qu’à l’état de plante cultivée dans les petites îles de la mer Pacifique[6]. Les indigènes de la Nouvelle Calédonie cultivent une quantité de variétés de la Canne et en font un usage con-

    la belle époque de la science allemande, lorsque les ouvrages anglais ou français étaient cités par tous les auteurs, avec le même soin que les allemands.

  1. Kunth, Enumeratio plantarum (1838), vol. 1, p. 474. Il n’existe pas de travail descriptif moins ancien pour la famille des Graminées, ni pour le genre Saccharum.
  2. Miquel, Flora India batavæ (1855) vol., 3, p. 511.
  3. Aitchison, Catalogue of Punjab and Sindh plants, 1869, p. 173.
  4. Thwaites, Enum. Ceyloniæ.
  5. Crawfurd, Indian archip., 1, p. 475.
  6. Forster, Planta esculentæ.