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ANTHOLOGIE FÉMININE

sous ce rapport. Mme  la marquise de Blocqueville était implacable. Et je pourrais citer plus d’une femme portant des noms connus, accueillies partout avec empressement, qu’elle a obstinément refusé, devant moi, de recevoir en dépit des supplications de ses meilleurs amis.

« C’est une intrigante, disait-elle, je ne veux pas la voir. »

D’ailleurs, elle repoussait avec la même fermeté les hommes qui avaient transigé, à sa connaissance, aux lois de l’honneur. La moindre tare, le plus petit scandale, vous faisait expulser nettement. Elle était aussi tenace dans ses inimitiés que fidèle dans ses amitiés. Cependant, elle était bonne et bienveillante plus qu’on ne pourrait l’imaginer, mais sans banalité aucune. D’une inépuisable charité que l’on ne sollicitait jamais en vain, ne jouissant que d’une fortune très limitée pour ses obligations de grande dame, elle savait, par ses habitudes d’ordre, décupler les moyens dont elle disposait. Généreuse et d’une délicatesse exquise, elle obligeait avec adresse et sans jamais froisser.

Que d’anecdotes curieuses je pourrais citer ! que de paroles spirituelles, de mots exquis, de fines appréciations j’ai notées lorsque je revenais de chez elle ! Mais la profession d’écrivain tournerait à l’état d’espionnage si nous racontions tout ce que nous entendons, et il doit se passer au moins de nombreuses années avant que nous puissions le faire.