neuf. Quel est l’enfant de notre époque qui n’apprend pas, en épelant ses lettres :
Comme te voilà beau, monsieur le Petit Sou…
Les poésies de Mme Anais Ségalas pourraient s’appeler les annales du XIXe siècle mises en vers. Elle nous raconte notre vie, soit dans les Cartes de visite, soit dans le Bal de Charité, ou encore dans le Jardin des Tuileries et dans la poésie sur les Gens de lettres. Survient-il un événement quelconque, infatigable, elle prend sa plume légère et vive et retrace la scène dans des vers mi-satiriques, mi-plaisants qui nous la fixe dans la mémoire.
C’est ainsi qu’après l’ordonnance du préfet de police (été 1892), pour museler les chiens, elle s’est écriée, avec cette verve intarissable qui lui est si personnelle :
Avez-vous vu des chiens, courbant leurs têtes fières,
Froissés dans leur orgueil, porter des muselières ?
Paris les affranchit souvent de ce lien ;
Mais parfois, par un jour de soleil et de flamme,
L’arrêt fatal revient. C’est en vain qu’on réclame :
Saint Roch serait forcé de museler son chien.
Et la rage ! dit-on. — Mais nos chiens doux, tranquilles,
Pourquoi les opprimer, quand on voit par les villes
Tant de gens enragés sans bâillons ni réseaux ?