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nin le Pieux [138-161] furent encore plus favorables, comme le prouva sa conduite envers quelques villes grecques[1], et bien plus encore l’étonnant edictum ad commune Asiæ, promulgué à l’occasion d’une persécution dirigée contre les chrétiens par le peuple d’Asie, qui attribuait à la colère des dieux contre cette secte nouvelle un terrible tremblement de terre. Cet édit portait « Que si quelqu’un inquiétait désormais un chrétien pour sa croyance, celui-ci devait être renvoyé de la plainte, quand même il se déclarerait ouvertement chrétien, et l’accusateur devait être puni[2]. »

Sous Marc-Aurèle [161-180], la condition des chrétiens empira. Leur enthousiasme religieux excitait la haine du froid et stoïque empereur, qui attribuait à un vain entêtement, et non à leur conviction, la facilité et la joie avec laquelle il les voyait mourir (ϰατἁ ψιλἠν παράταξιν)[3]. Aussi ne prit-il aucune mesure contre les violences du peuple, dont la fureur, excitée par les malheurs continuels de l’empire, éclata dans l’Asie Mineure, la Gaule méridionale (Lyon, Vienne), et il confirma par son silence les vieilles accusations d’athéisme, d’inceste et d’orgies ensanglantées. Avant de faire mourir les chrétiens, on leur faisait subir, pour obtenir leur apostasie, les plus cruelles tortures. L’empereur finit par porter des lois plus sévères contre eux que contre des ennemis barbares, entretenu et poussé qu’il fut dans sa haine par l’hypocrite Crescens, et surtout par l’infâme Peregrinus Proteus, qui, après avoir flatté les chrétiens, les trompa, et termina sa carrière par le suicide[4]. Le der-

  1. D’après Eusèbe, Hist. ecclesiast., IV, 26, aux villes de Larisse, Thessalonique, Athènes et à tous les Grecs.
  2. Eusèbe, IV, 13, qui l’attribue par mégarde à Marc-Aurèle. L’authenticité de cet edictum ad commune Asiæ soulève du reste des doutes graves, le langage en étant tout à fait chrétien et une sorte de développement de l’édit d’Adrien. Aussi a-t-il été combattu par Hoffner, de Edicto Antoniano pro Christ. Argent., 1781. Cf. Mosheim, de Reb. christ. ante Const. Max., p. 240. Antonin le Pieux reprocha à plusieurs villes leur fureur contre les chrétiens, au rapport de Meliton, dans Euseb. IV 26.
  3. Conf. Julius Capitolinus, in Vita Marc. Aurel. Monol. (εἰςἑαυτόν), XI, 3.
  4. Meliton, év. de Sardes, s’en plaint dans son Apologie. (Euseb., Hist. eccl., IV, 26.)