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Page:Alzog - Histoire universelle de l’Église, tome 1.djvu/264

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tanisme prétendit que l’objectivité du Christianisme devait absorber complétement l’individu, avec sa pensée et sa volonté. L’inspiration seule pouvait donner à l’homme une certitude personnelle et véritable. De là le caractère extérieur de cette secte, qui menaçait de transformer le Christianisme en un monachisme exagéré, comme le gnosticisme en avait fait une théosophie mystique. Montan, son fondateur, né à Pépuse, en Phrygie [vers 170], d’abord vraisemblablement prêtre de Cybèle, fut à peine reçu dans le sein du Christianisme qu’il se fit passer comme particulièrement inspiré par le Saint-Esprit, comme l’organe le plus puissant du Paraclet qui eût jamais paru, et menaça des jugements les plus sévères et les plus prochains ceux qui s’élevèrent contre lui et le persécutèrent. L’inspiration dont il se prétendait doué n’était que momentanée : c’étaient des ravissements passagers qui lui enlevaient toute réflexion et toute conscience de lui-même, disait-il. « Voici le Dieu, voici le Saint-Esprit qui parle, » s’écriait Montan, dans ses extases prophétiques (necesse est excidat sensu). Mais la conduite du prétendu prophète était loin de ressembler à la vie pure et céleste de ceux qui, dans les temps apostoliques, recevaient les dons de vision et de prophétie. Ses révélations avaient principalement pour objet des préceptes moraux très-rigoureux, et dont la réalisation devait amener l’Église à sa maturité, à l’âge viril. Il fallait renoncer à toute activité scientifique, fuir toutes les joies terrestres, rechercher le martyre. L’impureté, le meurtre, les secondes noces excluaient à jamais de l’Église. L’esprit de prophétie devait être permanent dans la vraie Église du Nouveau Testament, comme il l’avait été dans l’Ancien Testament ; et les disciples de Montan en étaient, en effet, les dépositaires et les organes. Des apôtres ce don avait passé à Agabus, Judas, Silas, aux filles de l’apôtre Philippe à Hiérapolis ; à Ananie de Philadelphie ; à Quadratus, à Montan et aux deux saintes femmes Priscille et Maximille. Tout en prétendant conserver la doctrine de l’Église catholique[1], Mon-

  1. Tertull., de Virginib. veland., c. 2 : « Una nobis et illis fides, unus Dominus, idem Christus, eadem spes, eadem lavacri sacramenta. Semel dixerim, una Ecclesia sumus. Ita nostrum est quodcumque nostrorum est ; cæterum dividis corpus. » P. 193.