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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Maurice et Jean pensaient pouvoir se passer de tout secours, et cependant le sentier n’était guère marqué çà et là que par une pierre légèrement polie par le frottement, une motte de gazon un peu affaissée… Pour ne pas perdre l’équilibre, ils étaient forcés de saisir de la main gauche les herbes que la pente du terrain mettait à leur portée.

Le plus difficile du trajet n’était pas fait. La pente cessait, il est vrai, le terrain devenait uni ; mais le passage se présentait étroit au point d’en être effrayant : il n’avait pas un mètre de large. C’était comme un pont sans parapet.

D’un côté, la chute menaçait d’être verticale ; de l’autre, un talus rapide dégringolait vers des rochers reposant par assises les uns sur les autres, comme un gigantesque escalier écroulé. Dans lequel des deux gouffres valait-il mieux tomber ? La pensée effrayée flottait entre ces deux hésitations, entre ces deux craintes.

Maurice, courageusement voulut passer le premier. Il le fit en se baissant un peu pour éviter le vertige.

— Le sentier n’est pas d’une solidité parfaite, observa-t-il, en sentant trembler sous ses pieds le basalte miné par les eaux des pluies.

Il revint sur ses pas et offrit la main à son camarade ; mais Jean, tout à fait rassuré, suivit le chemin sur lequel Maurice s’était hasardé.

Le périlleux passage franchi, la montagne se relevait ; c’était une sorte d’échelle qu’il fallait gravir en s’aidant des pieds et des mains. Enfin un étroit plateau, couvert d’une herbe touffue, se présenta et leur permit de se reposer à l’abri du piton qui forme la tête du Sancy. La vue y planait au loin ; mais le regard s’attachait avec persistance sur les points où des dangers avaient été courus.

Comme les deux jeunes garçons se réjouissaient du résultat atteint, et que Jean très satisfait et très fier battait des mains, deux jeunes filles de quinze à dix-huit ans, pleines de joie et d’animation, passèrent près d’eux en courant : elles descendaient du sommet du puy avec beaucoup trop d’élan.

— Prenez garde, mesdemoiselles, leur cria Maurice, la pente est rapide, et elle conduit à des précipices…

Entendirent-elles ? Ces jeunes filles devaient être Anglaises et sœurs. L’aînée fit un mouvement de la main qui pouvait signifier : Merci ! ou encore : Nous savons !

Et elles poursuivirent leur course.

Mais Jean s’était levé. Il vit la plus jeune poser sur le terrain un pied hési-